Homélie pour le 8e Dimanche du Temps Ordinaire (Année C)
Notre ménagerie intérieure
Frères et sœurs, ce 8e dimanche du Temps Ordinaire nous fait réfléchir sur la cohérence entre ce que nous portons dans notre cœur et ce que nous faisons ou disons. Les lectures d’aujourd’hui insistent sur la qualité intérieure qui transparaît dans nos paroles et nos actes. « Car c’est de l’abondance du cœur que la bouche parle » (Lc 6,45).
Comment, concrètement, laisser le Christ purifier notre cœur pour que nos “fruits” — c’est-à-dire nos paroles et nos actes — soient vraiment bons et témoignent de l’Évangile ?
Dans le livre d’Isaïe, un passage merveilleux (Is 11,1-9) nous présente une vision de paix où le loup habite avec l’agneau, où le lion mange de l’herbe comme le bœuf, où l’enfant joue en toute sécurité avec les animaux sauvages.
Ce tableau est bien plus qu’une simple image poétique : il est une promesse de restauration, de transformation intérieure. Mais avant que cette paix ne règne pleinement en nous, nous avons une véritable ménagerie à l’intérieur de notre cœur, peuplée d’animaux parfois indomptables.
Regardons-les de plus près :
- Le lion de l’orgueil qui rugit toujours « Moi, je… »
- Le coq ou le paon de la vanité qui aime briller aux yeux des autres
- Le renard de la fourberie et du manque de foi
- Le serpent de la jalousie qui s’insinue silencieusement
- L’ours de la possessivité qui veut tout garder pour lui
- La pie des commérages qui bavarde sans fin
- Le singe de la moquerie qui ridiculise les autres
- Le rhinocéros de la brutalité qui blesse sans réfléchir
- Le pachyderme insensible, incapable d’écouter avec cœur
- Le lièvre peureux qui recule devant l’effort
- Le cochon avide de plaisirs immédiats
- Le chien colérique qui aboie et mord
- Le ver du découragement qui ronge notre espérance
Si nous laissons l’Esprit du Christ entrer dans notre cœur, il met le doigt sur chacun de ces animaux intérieurs. Il veut les dompter, non par la force, mais par la douceur et l’amour.
La question est : Laisserons-nous Dieu pacifier cette ménagerie intérieure ?
- La Parole révèle ce que nous avons en nous (Si 27,4-7)
Dans la première lecture, Ben Sira nous compare à un tamis :« Au crible, les déchets restent ; de même, les défauts de l’homme apparaissent dans son raisonnement. »
Tout comme l’agriculteur secoue le blé pour séparer le grain des impuretés, les épreuves de la vie révèlent ce que nous avons vraiment dans le cœur.
Saint François de Sales disait :« L’homme est comme une éponge : il rend ce dont il est rempli. »
Alors, qu’avons-nous laissé entrer dans notre cœur ? L’Esprit de paix, ou la ménagerie indomptée de nos instincts et de nos passions ?
- La victoire du Christ : Une force qui nous libère (1Co 15,54-58)
Dans la deuxième lecture, saint Paul proclame :« Mort, où est ta victoire ? Mort, où est-il, ton aiguillon ? ». Cette parole est une explosion d’espérance ! En Christ, nous sommes appelés à la victoire. Mais cette victoire ne consiste pas seulement à vaincre la mort physique, elle concerne aussi la transformation intérieure.
Le Christ veut pacifier notre ménagerie intérieure, mais il attend notre permission. Sommes-nous prêts à déposer nos fardeaux, nos tendances mauvaises, pour accueillir la paix du Ressuscité ?
Saint Augustin disait :« Donne à Dieu ce qui est en toi, et Il te donnera ce qu’Il est. »
- L’arbre se reconnaît à ses fruits (Lc 6,39-45)
Jésus nous donne aujourd’hui deux images puissantes :
- Le danger du guide aveugle qui risque d’entraîner d’autres aveugles dans sa chute.
- L’arbre qui se reconnaît à ses fruits : « Il n’y a pas de bon arbre qui produise du mauvais fruit, ni de mauvais arbre qui produise du bon fruit » (Lc 6,43).
Jésus nous rappelle que nos paroles et nos actes révèlent l’état de notre cœur. Si nous trouvons toujours des défauts chez les autres, peut-être que nous projetons simplement nos propres luttes intérieures.
Saint Jean Chrysostome disait :« L’homme ne devient pas saint par ce qu’il proclame, mais par ce qu’il fait. »Si nous voulons être des guides éclairés et porter de bons fruits, nous devons laisser Dieu purifier notre cœur.
- Dompter notre ménagerie intérieure
J’ai commencé cette méditation avec vous par la vision d’Isaïe d’un monde pacifié et la ménagerie intérieure que chacun porte en lui. L’objectif, vous savez, n’est pas de rejeter ce que nous sommes, mais de mieux nous connaitre et de savoir comment la PAROLE DE DIEU nous aide à nous accueillir, à voir autrement les choses, à entretenir en nous une force intérieure qui vient de Dieu…ainsi…
🔹 Le lion de l’orgueil peut devenir force et courage pour Dieu.
🔹 La pie des commérages peut se transformer en parole d’encouragement.
🔹 Le renard rusé peut apprendre la sagesse véritable.
🔹 Le chien colérique peut devenir un serviteur fidèle.
🔹 Le ver du découragement peut être remplacé par la certitude que Dieu ne nous abandonne pas.
Frères et sœurs, en ce dimanche, laissons le Christ pacifier notre cœur. Laissons-Le transformer notre ménagerie intérieure pour que nous devenions des arbres qui portent de bons fruits, des artisans de paix et de lumière dans ce monde.
Seigneur, entre dans ma maison, prends place dans mon cœur, et apprends-moi à dompter ces bêtes indociles qui m’éloignent de Toi. Ainsi, je pourrai être un vrai disciple, un arbre qui porte le fruit de l’Esprit. Amen.