Mes chers frères et sœurs !
Après trois dimanches où nous avons écouté des récits des apparitions du ressuscité, le quatrième dimanche fait un break pour nous présenter Jésus comme le vrai Berger, le Bon Pasteur. Le quatrième dimanche de Pâques est aussi appelé le « dimanche du Bon Pasteur » et nous invite à prier pour les vocations sacerdotales en particulier.
Lorsque l’on parle du Bon Berger, l’icône qui vient spontanément à l’esprit, c’est celle du chapitre 15 de l’évangile selon saint Luc. C’est le berger de la parabole de la brebis perdue. Il est plein de tendresse, de compassion, attaché à chaque brebis qu’il est capable de d’abandonner dans la prairie les 99 brebis pour aller chercher celle qui est perdue et qu’il ramène, tout joyeux, en la portant sur ses épaules ou dans ses bras.
Saint Jean, dans son évangile, nous présente un autre visage du bon berger. Ce dernier est combatif et déterminé, allant même à montrer ses muscles et sa force pour défendre ses brebis quand elles sont en danger. Aucune menace ne lui fait peur et il prêt à donner sa vie pour ses brebis, connaissant chacune par son nom. Le bon berger est au milieu de ses brebis au point d’en porter l’odeur, comme aimait le rappeler le feu pape François aux prêtres et évêques.
Jésus, notre bon Berger est différent du berger-mercenaire qui fait tout par intérêt et pour un salaire, et qui ne peut surtout pas risquer sa vie pour les brebis qui ne lui appartiennent pas. En préparant cette homélie, me sont venues à l’esprit les images de tous ces soldats-mercenaires des pays d’Europe de l’Est, gracieusement payés par le gouvernement de la RDC (10 000 dollars par mois alors que le militaire congolais ne touchait même pas 150 dollars). Quand les rebelles rwandais ont pris la ville de Goma, ces mercenaires ont simplement déposé les armes et quitté le Kivu par le Rwanda pendant que les soldats Congolais se faisaient massacrer.
Il en est de même du berger-mercenaire : quand arrive le danger, il s’enfuit, sauve sa peau. Il ne peut sacrifier sa propre vie pour le troupeau. Le bonheur des brebis n’est pas le moteur premier de son engagement.
Nous devrions nous demander comment, dans sa vie de prêtre (moi en l’occurrence), de paroissien, de parent, de professionnel, de manager…se manifestent des attitudes du berger-mercenaire, c’est-à-dire, en faisant des choses par pur intérêt personnel. Tout le monde se rappelle du pape François, en 2014, lors de ses vœux aux membres de la Curie, citant et mettant en garde contre cette longue liste des 15 maladies qui défigurent l’Eglise et dont peuvent souffrir les pasteurs et les fidèles ! Attention ! Un berger mercenaire peut se cacher en chacun !
Nous formons ensemble le troupeau dont le Christ est le bon berger. Il connait chacun de nous par son prénom et dès le sein maternel, il nous a choisis et appelés ! D’où la confiance qui devrait nous animer, quelles que soient les turbulences de notre vie. C’est cette assurance qui nous est donnée dans le baptême. Jésus nous connait personnellement. Il est au courant de nos joies et nos peines. Sa présence est rassurante, comme nous le décrit le Ps 22 : « Le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien. Si traverse les ravins de la mort, je crains aucun mal car tu es avec moi, ton bâton me guide et me rassure ».
L’enjeu de la vie chrétienne est de vivre un amour gratuit, aimer sans conditions, sans limites, sans calculs à l’exemple de Jésus bon berger. Mais, est-ce réaliste ou utopique ? Est-il humain ou héroïque d’aimer les autres sans rien attendre d’eux en retour ? Ou alors, parce que cela paraît impossible ou illusoire, devons-nous nous protéger, apprendre à être insensibles, barricader nos cœurs, détachés des autres, pour ne pas être déçus et souffrir en amour ?
Pour aimer en vérité, Jésus se présente comme le seul modèle à imiter. Il sait que les humains aiment avec une certaine dose d’égoïsme et d’amour propre, comme des mercenaires calculateurs ou pire encore, comme des vampires qui vampirisent les autres en amour en les suçant jusqu’à la dernière goûte de sang ! L’amour humain est toujours mêlé à une dose plus ou moins grande d’égoïsme. C’est cela notre nature. Cet amour a besoin de trouver sa source dans le cœur de Jésus bon pasteur.
En ce dimanche du bon pasteur, le prêtre que je suis, s’interroge, sur la dose d’égoïsme, d’orgueil, d’amour propre pouvant se cacher ou se manifester, de manière plus ou moins consciente, dans manière de vivre la mission et ma relation à l’Eglise, à la communauté pour que le Seigneur me purifie et me convertisse. S’il vous plaît, priez pour nous les prêtres que Dieu vous donne sans que vous les ayez choisis, afin que nous cherchions chaque jour à tendre à cet amour gratuit et total qui s’enracine dans le cœur de Jésus bon Pasteur. Au sein des famille, dans le mariage, les relations professionnelles et amicales, que le Seigneur nous épargne de la tentation du berger mercenaire avec ses calculs égoïstes.
En ce dimanche du bon pasteur, rappelons-nous et gravons dans notre cœur cette évidence : personne ne pourra m’aimer gratuitement et sans égoïsme plus que Jésus. Aucun pape, évêque, prêtre, aucun conjoint, aucun enfant, aucun ami…bref, personne ne pourra nous aimer d’un amour aussi grand et gratuit que Jésus bon pasteur. Seul Jésus nous aime de manière vraiment gratuite et sans calculs. On peut s’attacher à un prêtre, à un évêque, même au pape ! Mais, c’est au Christ bon Pasteur que nous devons fixer notre regard et nous attacher à lui fermement. Tous les autres pasteurs sont imparfaits et peuvent nous décevoir par nos infidélités.
Prions pour les prêtres qui nous entourent, ceux que nous avons connu dans notre cheminement, ceux qui ont marqué notre vie, qui nous ont permis de grandir dans la foi en s’attachant au Jésus, bon pasteur. Prions aussi pour les vocations sacerdotales dont l’Eglise a besoin pour vivre et célébrer les sacrements. Que le Seigneur donne à son l’Eglise des pasteur selon son cœur et dont le seul but est de conduire tout le troupeau vers son Pasteur, le Christ. Amen.