Homélie du Père Joseph du Ve dimanche du TO, année C (2024)
Mes chers frères et sœurs !
Quelle que soit notre situation, Jésus nous demande de ne jamais désespérer de lui, ni de nous-même, car avec Jésus, il y a toujours des possibilités nouvelles. Voyez l’apôtre Paul ! Pour les premiers chrétiens à Jérusalem, saint Paul était d’abord un vrai criminel, un idéologue pharisien dont la mission était de persécuter et mettre à mort tous ceux qui se déclaraient disciples de Jésus. Il faisait peur et aucun chrétien ne souhaiter croiser son chemin. Pourtant, Jésus lui est apparu sur la route de Damas et Saul est devenu Paul apôtre, le témoin, le missionnaire et le plus grand défenseur de la cause qu’il combattait. Comme il le dit lui-même, tout cela par grâce ! « Car moi, je suis le plus petit des Apôtres, je ne suis pas digne d’être appelé Apôtre, puisque j’ai persécuté l’Église de Dieu. Mais ce que je suis, je le suis par la grâce de Dieu, et sa grâce, venant en moi, n’a pas été stérile. Je me suis donné de la peine plus que tous les autres ; à vrai dire, ce n’est pas moi, c’est la grâce de Dieu avec moi ».
La grâce du Seigneur peut nous toucher à tout moment pour nous guérir de toute forme de mal et de mort. C’est cela que pour demandons en ce dimanche de la santé, en particulier pour les malades qui sont parmi nous ou que nous sommes, et plus particulièrement ceux qui vont recevoir l’onction. Ne désespérons jamais car la grâce du Seigneur nous accompagne.
Ne vivons pas comme ceux qui sont sans espérance, car l’espérance ne déçoit jamais ! Jésus voit quand nous sommes fatigués, comme Simon Pierre et ses compagnons, après toute une nuit de travail infructueux, mais qui doivent de nouveaux se lever, repartir en mer pour pêcher, sur ordre d’un charpentier qui ne sait rien à la pêche…. Mais ce charpentier, c’est le Maître, le Fils de Dieu qui nous demande aussi aujourd’hui de lui faire confiance, de faire ce qu’il nous commande parce qu’il veut nous toucher par la grâce des sacrements à travers lesquels il donne et entretient la vie divine en nous.
La foule se pressait pour écouter Jésus ! Elle était assoiffée des Paroles du Christ, paroles qui construisent, illuminent, guident, secouent parfois mais qui encouragent. Ces paroles sont différentes des celles des rabbins, des guérisseurs, des scribes, des paroles sévères des pharisiens. Aucune de leurs paroles n’a pu étancher la soif profonde de cette foule. La Parole du Christ caresse nos âmes par sa tendresse et rallume en nous la confiance ! Elle nous provoque et nous blesse parfois, mais toujours dans le but de nous guérir.
Quand quelqu’un réussit à toucher notre cœur, tout en nous fleurit de nouveau. La vie devient de nouveau possible ! Je ne parle pas des paroles des tribuns, des manipulateurs des foules, des guérisseurs et magnétiseurs qui touchent notre cœur, parfois avec un effet bénéfique sur le moment mais dont l’effet est destructeur sur le long terme, nous conduisant progressivement entre dans les filets du Malin. Lorsque l’on est malade, c’est facile d’être tenté d’aller voir ces magnétiseurs, guérisseurs, cartomanciens… ! J’en connais qui sont allés ou qui vont se noyer dans ces pratiques parce que désespérés par une maladie, une épreuve, ignorant que cela nous coupe de Dieu est le seul capable de nous guérir. Ne laissons pas le désespoir nous couper de Dieu, mais approchons-nous de lui, comme cette foule de l’évangile qui se laisse toucher par ses paroles et ses enseignements du Christ au bord du lac de Génésareth.
Nous sommes parfois découragés, au fond du trou, à cause de la maladie comme Pierre et ses compagnons. Même là, Jésus nous regarde. Il a bien vu la fatigue et la déception bien visibles sur le visage de Simon Pierre et ses compagnons. Jésus voit quand nous sommes fatigués ou que nous n’en pouvons plus. Pendant qu’il parle à la foule, Jésus voit aussi ce groupe de pêcheurs, les mines défaits, les paniers vides, qui essayent de réparer les filets… et qui probablement critiquaient cette foule qui n’avait rien d’autre à faire et qui perdait son temps à écouter un charpentier devenu prédicateur. Quand on est fatigué et en colère, on a aussi la critique facile, et on s’en prend facilement aux autres. Pensez à la maladie qui vous rend irritables et vous met facilement en colère, contre l’infirmier, l’infirmière, l’accompagnant, les proches qui sont là, essayant de vous rendre service du mieux qu’ils peuvent.
Alors, Jésus remarque la délusion de Pierre et ses compagnons. Il décide de les impliquer en leur demandant une barque ! « Quel culot ! Ça ne se voit pas que nous sommes déprimés, fatigués et que nous ne voulons pas être déranger ! Il veut en plus utiliser notre barque, » murmuraient Simon Pierre et ses compagnons ! Oui, Jésus nous dérange, nous bouscule parfois même lorsque nous sommes fatigués ou déprimés par la maladie, alors que nous avons besoin d’une seule chose : être tranquille ! Jésus nous dérange et nous rejoint dans nos vies parfois lorsque nos paniers sont vides, au petit matin, déjà fatigués de nos nuits de douleurs et d’insomnies, lorsque nous n’avons plus d’énergie au lever alors que nous avons encore une longue journée qui nous semble déjà une éternité de douleur. Mais il le fait toujours dans le but de nous toucher par sa grâce !
Jésus veut monter dans ma barque vide ! Il entre dans ma vie remplie d’échecs, de jugements négatifs, de péché, de déception et d’amertume, cette vie que la société me rappelle qu’elle n’est plus digne à cause de l’âge ou de la maladie. Même là, Jésus vient nous demander notre barque pour faire renaitre de nouveau la confiance en nous. Alors, comme Pierre, dans ce moment-là, Jésus nous demande ensuite d’aller au large ! Duc in altum ! Allez au fond des choses ! Donnez du sens même à une maladie, regarder les grâces qui peuvent naître même dans des épreuves qui nous permettent de nous rendre compte de la force intérieure qui est en nous, de tout le potentiel présent dans notre vie mais qui risquait de rester caché et endormi. Aller au large, au fond des choses, ne pas s’arrêter à la superficie…. J’ai encore en mémoire les paroles de cette mamie qui souffrait d’un cancer et qui avait osé me dire que sa maladie était une grâce parce qu’elle lui avait permis de se réconcilier avec ses filles avec lesquelles elle s’était brouillée depuis quelques années à causes des questions matérielles….
Alors, comme Pierre, même fatigués, osons le saut de la confiance en Jésus ! « Maître, nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre ; mais, sur ta parole, je vais jeter les filets. » Et là, stupeur et stupéfaction ! La pêche est miraculeuse ! La barque s’enfonce devant cette pêche inattendue et surabondante ! Il nous faut de l’aide. Simon Pierre est pris de stupeur. Il pleure comme une madeleine. Jésus lui a demandé une barque vide, mais il la lui rend remplie de poissons. Le cœur de Simon Pierre est rempli ! Jésus nous demande de lui donner notre vie vide, découragée, malade et fatiguée pour nous la redonner remplie d’amour et de grâce, si nous osons le saut de la confiance et de l’obéissance. Si nos vies sont déjà remplies de tout un tas de choses, de nos gloires, nos désirs, encombrées par toute sorte d’affaires, il n’y a plus de vide que Jésus puisse remplir. Faisons le vide en nous pour que le Seigneur nous remplisse le cœur ! C’est cela que nous demandons, en ce dimanche de la santé, pour nous-même, et surtout pour tous les malades, et plus particulièrement ceux qui, ce weekend, reçoivent l’onction de malades dans nos paroisses.
Ensuite, lorsque nous avons été touchés par la grâce, comme Simon Pierre, osons témoigner ! « Jésus dit à Simon : « Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras. » Alors ils ramenèrent les barques au rivage et, laissant tout, ils le suivirent ». Jésus nous appelle aujourd’hui à le suivre, à devenir ses témoins pour raconter les merveilles qu’il accomplit dans notre vie. Dans ce monde où tant des gens sont découragés, fatigués et perdus, nous avons besoin de témoins qui osent dire que Jésus est présent et agissant dans nos vies qui semblent vides et fatiguées. La confiance et l’obéissance ouvrent devant nous de nouvelles possibilités si nous nous laissons toucher par la grâce, comme Simon Pierre et ses compagnons, comme Saul le persécuteur devenu Paul l’apôtre. Seigneur, donne-nous, donne aux malades, aux soignants et accompagnants de ne jamais désespérer de toi. Amen.