Chers frères et sœurs,
la puissance de la Parole
En ce 3e dimanche du Temps Ordinaire, nous sommes invités à méditer la force et la beauté de la Parole de Dieu. Le pape François a institué ce dimanche comme étant le « Dimanche de la Parole de Dieu », un moment fort pour nous rappeler que la Parole n’est pas simplement un texte ancien, mais qu’elle est vivante, qu’elle nous parle aujourd’hui et qu’elle nourrit notre foi. Lorsque nous ouvrons la Bible, nous ne lisons pas un récit lointain : c’est Dieu lui-même qui nous rejoint et nous parle, ici et maintenant.
- Première lecture : (Ne 8,2-4a.5-6.8-10) – La joie d’entendre la Loi de Dieu
Dans la première lecture, tirée du livre de Néhémie, nous assistons à une scène émouvante. Le peuple d’Israël, longtemps exilé à Babylone, est enfin rentré à Jérusalem. Sous la direction d’Esdras le prêtre, tous se rassemblent pour écouter la Loi de Dieu. Imaginez la joie et l’émotion du peuple : après des années de séparation et de découragement, ils se retrouvent unis autour de la Parole. Elle est proclamée, expliquée, commentée, et toute l’assemblée est bouleversée. Certains pleurent même en réalisant combien ils s’étaient éloignés du projet de Dieu.
Et pourtant, Esdras et Néhémie leur rappellent : « Ne soyez pas tristes, car la joie du Seigneur est votre rempart ! » (Ne 8,10). Le même message nous est adressé aujourd’hui : lorsque la Parole de Dieu nous touche, elle nous invite certes à la conversion, mais elle est aussi source de joie, de réconfort et de force. Cette Parole nourrit notre espérance.
- Deuxième lecture : (1Co 12,12-30) – Un seul Corps, unis dans la diversité
Dans la deuxième lecture, saint Paul insiste sur l’unité du Corps du Christ. Nous sommes tous membres d’un seul Corps : le Christ est la Tête, et nous, baptisés, nous sommes ses membres. Chaque membre est différent, avec sa fonction propre, ses charismes et sa place unique. Le bras n’est pas le pied, l’œil n’est pas l’oreille, et pourtant, tous sont absolument nécessaires au bon fonctionnement du corps.
Quelle leçon pour nos communautés ! Combien de fois sommes-nous tentés de croire que nous n’avons pas grande importance, ou bien, à l’inverse, de nous sentir supérieurs ? Paul nous rappelle avec force : nous avons besoin les uns des autres. Chacun, dans la complémentarité, apporte sa contribution. Si un membre souffre, tout le corps souffre. Si un membre est à l’honneur, tout le corps se réjouit.
Dans un monde où l’individualisme prend souvent le dessus, l’appel de Paul est plus que jamais d’actualité : redécouvrir la fraternité, la solidarité, le sens de la communion. Nous sommes tous différents, certes, mais c’est ensemble que nous devenons un, dans le Christ, grâce à la puissance de sa Parole et à l’action de l’Esprit Saint.
- Évangile : (Lc 1,1-4 ; 4,14-21) – « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture »
Dans l’Évangile selon saint Luc, nous voyons d’abord l’introduction de l’évangéliste : il explique qu’il a entrepris de « vérifier avec exactitude » tout ce qui concerne Jésus, pour consolider notre foi. Ensuite, le récit nous emmène à la synagogue de Nazareth. Jésus, rempli de la puissance de l’Esprit, se lève pour lire le rouleau du prophète Isaïe :
« L’Esprit du Seigneur est sur moi,parce qu’il m’a consacré par l’onction,pour annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres,il m’a envoyé proclamer aux captifs la libération,et aux aveugles le retour à la vue,renvoyer en liberté les opprimés,proclamer une année de grâce du Seigneur » (Lc 4,18-19).
Ensuite, Jésus referme le livre, le rend au servant et déclare : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre » (Lc 4,21).
Cette parole de Jésus est renversante. Il s’attribue la mission prophétique annoncée depuis des siècles et déclare : « Cela se réalise maintenant ! » Non seulement Jésus se présente comme celui qui apporte la libération, la guérison et la grâce, mais il affirme que cette Bonne Nouvelle est pour tous, y compris pour les plus pauvres, les plus démunis, les captifs.
Pour nous aujourd’hui, cette affirmation de Jésus résonne comme un appel : nous aussi, nous pouvons accueillir la Bonne Nouvelle qui libère, qui éclaire et qui guérit. La Parole de Dieu ne concerne pas seulement le passé, ni seulement quelques privilégiés. Elle est pour tous, et Jésus nous dit qu’elle s’accomplit encore, ici et maintenant.
- Un exemple concret : la Parole qui nous transforme
Pour illustrer cette force de la Parole, pensons à un exemple simple et quotidien. Imaginez un petit enfant qui commence à lire : tout un monde s’ouvre à lui. Il découvre des histoires, des héros, des émotions. La lecture l’aide à grandir, à former son imagination, à développer sa pensée.
De la même manière, lorsque nous ouvrons la Bible, lorsque nous écoutons l’Évangile à la messe, nous laissons Dieu nous parler, nous guider et nous transformer. Les mots de la Bible ne sont pas seulement de belles paroles ; ils changent notre regard sur nous-mêmes, sur nos frères et sœurs, sur la société. Ils nous rappellent que Dieu est vivant, qu’il veut notre bonheur et qu’il nous demande de collaborer à son œuvre.
Au fond, écouter la Parole, c’est écouter Dieu nous dire : « Je t’aime », « J’ai besoin de toi », « Sors de tes peurs pour servir tes frères ». Et cet amour touche notre cœur et le rend capable d’aimer davantage.
Un témoignage puissant de conversion par la Parole de Dieu est celui de Charles Colson, ancien conseiller de la Maison-Blanche sous le président Nixon. Homme de pouvoir prêt à tout pour réussir, il fut bouleversé par le passage de Matthieu 16,26 : « Que sert-il à un homme de gagner le monde entier, s’il perd son âme ? » Pendant le scandale du Watergate, ce verset le confronta à la vanité de son ambition. Touché par la Parole, il se repentit et trouva en Dieu une nouvelle vocation. Condamné à la prison, il transforma cette épreuve en un appel à servir : après sa libération, il fonda Prison Fellowship, consacrant sa vie à soutenir les prisonniers et à proclamer l’Évangile. Son histoire illustre que la Parole de Dieu peut libérer même les cœurs les plus endurcis et donner un sens nouveau à la vie.
« Les Écritures ne vieillissent jamais ; elles nous parlent aujourd’hui avec la même fraîcheur qu’elles parlaient hier. »
(Pape François)
- Accueillir la Parole, la partager, l’annoncer
Comment, concrètement, mettre en pratique ce que nous recevons aujourd’hui ? Trois pistes simples :
- Accueillir la Parole
- Prendre chaque jour un moment, même court, pour lire un passage de l’Évangile ou un psaume. Se laisser éclairer, interroger par cette Parole qui est vivante.
- La partager avec nos frères et sœurs
- En famille, entre amis, dans un groupe biblique ou de prière, osons parler de ce qui nous touche dans la Parole. Témoignons de ce que nous avons reçu. Comme Israël rassemblé autour d’Esdras, nous avons besoin de lire, de commenter et de nous encourager mutuellement.
- L’annoncer avec joie
- « L’Esprit du Seigneur m’a envoyé proclamer la bonne nouvelle aux pauvres… » Nous sommes tous missionnaires par notre baptême. Par nos gestes de charité, notre attention aux plus petits, par un mot de réconfort auprès de quelqu’un qui souffre, nous annonçons l’Évangile. Parfois, nous pensons que pour évangéliser, il faut être grand prédicateur. Mais ce qui touche le cœur d’autrui, c’est souvent la simplicité, l’accueil, l’écoute, un sourire qui témoigne du Christ vivant.
la Parole se réalise aujourd’hui
Frères et sœurs, cette Parole, nous la voyons à l’œuvre dans les textes de ce dimanche :
- Elle rassemble et console le peuple d’Israël, le faisant passer des larmes à la joie.
- Elle nous rappelle que nous formons un seul Corps dans la diversité de nos charismes.
- Elle s’accomplit pleinement en Jésus, le Messie annoncé, venu pour libérer, guérir et offrir une année de grâce.
Si nous l’accueillons, si nous la laissons nous pénétrer, cette Parole peut transformer notre vie quotidienne. Elle peut redonner un sens à notre existence, éclairer nos choix, réveiller notre espérance.
En cette Eucharistie, demandons la grâce de mieux aimer et écouter la Parole, de la méditer, de la savourer et de la laisser prendre chair en nous. Comme la Vierge Marie, puissions-nous la garder et la faire fructifier dans notre cœur, afin que, par nous, Dieu continue d’accomplir ses merveilles « aujourd’hui ».
Amen.