Frères et sœurs,
Nous célébrons aujourd’hui la Sainte Famille, ce modèle lumineux de foi, de confiance et d’amour que nous offre l’Église. En contemplant la vie de Jésus, Marie et Joseph, nous sommes invités à découvrir comment nos propres familles peuvent devenir des lieux de sainteté, même dans les défis et les épreuves de la vie quotidienne.

Les textes que nous venons d’entendre révèlent des dimensions profondes de la vie familiale : la gratitude et l’offrande, l’amour inconditionnel de Dieu- Père et sa priorité absolue dans toutes nos relations.

1. L’offrande de Samuel : une foi qui transforme la famille
Dans la première lecture (1 S 1, 20-22.24-28), nous rencontrons Anne, une femme qui avait imploré le Seigneur avec larmes pour avoir un enfant. Lorsque Dieu lui accorde un fils, Samuel, elle fait un acte d’une foi extraordinaire : elle l’offre au Seigneur en reconnaissance, en le confiant au prêtre Éli pour qu’il serve dans le Temple.
Ce geste nous enseigne que les enfants ne nous appartiennent pas. Ils sont un don précieux confié par Dieu, appelés à réaliser leur propre mission. La vocation de tout parent, tout éducateur, est de guider les enfants sur le chemin que Dieu a tracé pour eux, non de les façonner à notre image.

2. « Voyez comme il est grand l’amour dont le Père nous a comblés ! »
La deuxième lecture (1 Jn 3, 1-2.21-24) nous transporte au cœur du mystère de notre identité : « Nous sommes enfants de Dieu ! » Cette réalité transforme tout. La famille chrétienne n’est pas seulement un lieu humain d’amour et de vie. Elle est aussi une « petite église », une icône vivante de la Trinité, où chacun apprend à aimer à l’image du Christ.
Quand nous parlons de la « Sainte Famille », nous contemplons le foyer de Nazareth, mais n’oublions pas que nous sommes, nous aussi, de cette famille divine. Nous sommes fils et filles du Père, et cela change tout dans notre manière de vivre : nous avons « confiance devant Dieu » (1 Jn 3, 21). Comme un enfant confiant, nous pouvons nous tourner vers Lui et Lui remettre nos joies, nos difficultés, nos projets, nos peines et nos espérances.
Cela nous invite à voir l’autre – le conjoint, l’enfant, le frère, la sœur, le parent âgé – comme un frère ou une sœur dans la grande famille de Dieu. Notre regard sur les imperfections ou les fragilités familiales peut alors changer : nous devenons plus accueillants, plus compatissants, plus patients, comme le Père l’est à notre égard.
Comme l’écrivait Saint Jean Chrysostome : « La maison est une petite église. C’est là que commence l’école de l’amour. » Aujourd’hui, demandons-nous : comment mes paroles, mes gestes, mon attitude peuvent-ils révéler l’amour du Père au sein de ma famille ?

3. L’évangile de la priorité : « Il me faut être chez mon Père. »
L’évangile (Lc 2, 41-52) raconte un épisode unique de l’enfance de Jésus : à l’âge de douze ans, il reste au Temple pendant trois jours, alors que ses parents le cherchent avec angoisse. Lorsque Marie et Joseph le retrouvent, il leur répond : « Pourquoi me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? » Cet épisode peut sembler étrange, voire douloureux pour ses parents. Pourtant, il révèle une vérité essentielle : Dieu doit être au centre de nos vies, même au sein de nos familles. Jésus, à douze ans, montre déjà que sa priorité absolue est de faire la volonté de son Père.
Pour nous aujourd’hui, cet évangile pose une question fondamentale : Dieu occupe-t-Il vraiment la première place dans ma famille ? Lui consacrons-nous un temps de prière ? Prenons-nous des décisions en fonction de ses valeurs, ou sommes-nous parfois plus influencés par les pressions du monde ?

4. La Sainte Famille : un modèle incarné
Frères et sœurs, la Sainte Famille n’est pas un idéal inatteignable. Elle est un modèle d’amour concret et incarné :
Marie : Elle garde toutes ces choses dans son cœur (Lc 2, 51), montrant une capacité d’accueil et de méditation profonde, même face à ce qu’elle ne comprend pas immédiatement.
Joseph : Il incarne la discrétion, le service, et l’obéissance silencieuse. Il protège la vie de la Sainte Famille avec un amour fort et dévoué.
Jésus : Il obéit à ses parents, tout en étant déjà tourné vers sa mission divine. Il nous apprend que l’obéissance n’est pas une faiblesse, mais une force qui libère.

5. Trois invitations pour nos familles aujourd’hui
Avant de conclure, voici trois invitations concrètes inspirées par la Sainte Famille :
1. La prière familiale : Prenons un temps régulier pour prier ensemble, même brièvement. La prière unit les cœurs et invite Dieu à être présent dans nos vies.
2. Le pardon et le dialogue : N’ayons pas peur d’exprimer nos sentiments, mais aussi de pardonner lorsque des blessures surgissent. C’est ainsi que grandit l’amour.
3. L’ouverture à la mission : Comme Anne qui offre Samuel, soyons ouverts à donner et à partager ce que nous avons reçu. Une famille chrétienne est appelée à rayonner de l’amour de Dieu autour d’elle.

Je voudrais finir par une lettre. C’est la lettre d’un personnage illustre et inoubliable de la littérature et de la société française et même au-delà. Il s’agit d’Antoine de St Exupéry. Antoine de Saint-Exupéry (1900-1944) était un écrivain, poète, aviateur et humaniste français, célèbre pour son chef-d’œuvre Le Petit Prince. Profondément marqué par sa foi et son humanisme, il a su allier poésie et réflexion dans ses œuvres inspirées de ses expériences de vie et de vol.Ce que je vais vous lire pour finir est la lettre de ce grand homme à sa Mère.
Lettre d’Antoine de Saint-Exupéry à sa mère/(Extrait de sa correspondance, 1923)
« Ma chère maman,
Je veux te dire aujourd’hui ce que je ne te dis pas assez souvent : combien je te suis reconnaissant, non seulement pour la vie que tu m’as donnée, mais surtout pour la manière dont tu l’as remplie. Tu as semé en moi, dès mon enfance, des trésors de lumière, de bonté, et de foi, et ces trésors continuent de me guider aujourd’hui comme les étoiles guident le marin dans l’obscurité de la nuit.
Quand je regarde ma vie, je vois que tout ce qu’il y a de meilleur en moi vient de toi : ce sens du devoir, ce respect des autres, et cette soif de quelque chose de plus grand, de plus élevé que moi-même. Tu m’as appris à prier, mais tu m’as surtout appris à aimer, et cet amour, je le porte en moi comme une flamme qui ne s’éteindra jamais.
Même loin de toi, dans mes voyages ou dans les moments où la solitude me saisit, je ressens toujours cette présence douce et réconfortante de ton amour maternel, ce lien qui me ramène à l’essentiel. Sache, ma chère maman, que ce que je fais de bon dans ma vie, je le fais un peu pour toi, en écho à ce que tu as fait pour moi. Merci, maman, pour tout ce que tu es, et pour tout ce que tu m’as transmis. Je t’embrasse avec tendresse et gratitude.Ton fils, Antoine »

Frères et sœurs, cette lettre d’Antoine de Saint-Exupéry à sa mère est un témoignage vibrant de reconnaissance envers une famille qui a su transmettre non seulement la vie, mais aussi les valeurs spirituelles et humaines qui la rendent précieuse. Comme Saint-Exupéry, nous sommes tous appelés à regarder avec gratitude ce que nous avons reçu et à le transmettre à notre tour. En cette fête de la Sainte Famille, prions pour que nos foyers soient des lieux où s’enracine et grandit la foi, l’amour et l’espérance. Que chaque parent, chaque enfant, trouve dans la Sainte Famille de Nazareth un modèle de tendresse et de fidélité. AMEN !