Mes chers frères et sœurs !
Voilà une des plus belles pages de l’évangile de saint Marc. D’habitude bref, timide et concis dans ses récits, il se lâche un peu plus dans la narration des faits où il mêle plusieurs histoires. On dirait qu’il veut nous faire vivre les sensations et les émotions intérieures, comme celui qui veut parler et raconter le doublé du Stade Toulousain, la Champions Cup il y a trois semaines et 23è Bouclier de Brennus. Nous avons vu la joie, l’allégresse, l’exultation, l’euphorie des Toulousains, alors que les voisins Bordelais étaient dépités, tristes, en larmes, découragés…. Dans cet évangile de ce dimanche, saint Marc nous fait vivre les sentiments, les émotions et les perceptions de ceux qui sont autour de Jésus, pour nous conduire sur un chemin de foi à la rencontre de Jésus qui nous libère et nous guérit. Il nous explique en quoi consiste la vraie foi et le fait de manière sensible et charnelle !
La foi n’est pas une doctrine qui s’adresse à la tête ni une éthique qui ne s’adresse qu’à la volonté, mais rencontre avec Jésus, Dieu fait homme, un Dieu sensible comme cette femme courageuse qui est privée de vie sociale et relationnelle à cause ses pertes de sang la rendant impure, un Dieu blesse et éprouvé comme ce chef de synagogue désespéré qui s’approche de Jésus pour demander la guérison de sa fille mourante. Jésus est le Dieu des relations sociales libérées et libres des préjugés et exclusions. En Jésus, Dieu s’est incarné et notre foi a une dimension sensible, matérielle et corporelle car notre corps est appelé à être touché par la divinité de Jésus. La liturgie a une forte dimension corporelle comme, chanter, danser, se mettre debout, à genou, s’asseoir, taper dans les mains, pleurer, crier de joie…. Une foi véritablement chrétienne et sans idéologie ne peut faire fi de la dimension corporelle et sensible. Malheureusement il y a des chrétiens dénigrent le corps, soulignant le primat de l’âme à sauver, en oubliant que Dieu s’est incarné en Jésus.
Le récit de ce dimanche commence par l’amour d’un papa qui fait face l’enfermement religieux. Jaïre est chef d’une synagogue et fille est mourante. De quoi souffre-t-elle ? Nous ne savons pas ! A sa supplication, Jésus ne dit rien mais accepte de marcher et cheminer avec lui.
Sur la route, Jésus croise une femme. Contrairement à Jaïre qui est riche (chef de la synagogue et qui a peur de perdre ce qu’il possède, la femme est pauvre et n’a même pas de nom et a perdu toute sa richesse dans les soins. Elle n’a pas et ne peut même pas avoir d’enfant à cause de sa maladie. Elle est doublement condamnée à l’exclusion et à la solitude imposées par la Loi qui la considère comme impure, ne pouvant ni se marier ni avoir des relations intimes à cause sa maladie. Dans son cœur pourtant, cette femme a un grand désir de vivre ! Elle est courageuse et lutte de toutes ses forces malgré la dégradation progressive de sa santé.
Elle a entendu parler de Jésus et cela a fait naître en elle l’espérance ! Témoigner, parler de Jésus autour de nous, annoncer les merveilles qu’il a accomplies pour nous et autour de nous est une façon extraordinaire d’évangéliser et peut donner courage et espoir à beaucoup de monde. L’évangile nous plonge dans la tête et le cœur de la femme : « Elle se disait en effet : « Si je parviens à toucher seulement son vêtement, je serai sauvée. » Ensuite, de la pensée, elle passe à l’acte : affronter la foule, passer par derrière et toucher le manteau de Jésus. « À l’instant, l’hémorragie s’arrêta, et elle ressentit dans son corps qu’elle était guérie de son mal ».
Jésus a senti une force sortir de lui. Chacun peut aussi faire l’expérience de cette force de Jésus qui guérit, libère et apaise…. La foi a une dimension communautaire et ecclésiale, comm aller à la messe, faire partie d’un groupe, un mouvement. Mais la foi, c’est d’abord rencontrer, aimer, sentir, toucher, vivre quelque chose personnel avec Jésus, comme cette femme de l’évangile Ne nous contentons pas d’une vie chrétienne qui soit seulement communautaire ou sociale. Il nous faut développer aussi la dimension personnelle. La femme cherchait à toucher l’habit de Jésus pour guérir, mais à un certain moment, c’est Jésus qui la cherche et veut la rencontrer. « Jésus lui dit alors : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix et sois guérie de ton mal ».
Jésus poursuit son chemin vers la maison de Jaïre, mais sur la route, il y a un obstacle : les prophètes des malheurs, les mauvaises langues, les pessimistes, les critiques négatives et les médisants qui veulent nous décourager : « comme il parlait encore, des gens arrivent de la maison de Jaïre, le chef de synagogue, pour dire à celui-ci : « Ta fille vient de mourir. À quoi bon déranger encore le Maître ? » Ça ne sert plus à rien ! Certains vous disent que la foi, le baptême, le mariage, la messe, tout ça ne sert à rien. Pourquoi votre Dieu ne fait rien pour tous les malheurs du monde ? Pourquoi Dieu ne t’a pas épargné de cette maladie, de cette épreuve parce que tu crois en lui ?
Ces annonceurs de malheurs ont même un côté culpabilisant quand ils parlent à Jaïre : ta fille est déjà morte et tu n’étais même pas présent ! Mais Jésus fait renaitre l’espérance : « Jésus, surprenant ces mots, dit au chef de synagogue : « Ne crains pas, crois seulement. ». Ne te laisse pas manipuler par la peur, l’angoisse et tes fragilités. Crois seulement, abandonne-toi, laisse-toi aimer et tu apprendras à aimer à ton tour.
A ce moment, nous notons quelque chose d’important : Jésus construit une communauté resserrée avec Pierre, Jacques et Jean qu’il sort de cette foule qui le bouscule, qui pleure, critique, fait des reproches. Il prend le père et la mère pour les conduire là-où se trouve la jeune fille. Il saisit la main de l’enfant (encore un geste sensible), et lui dit : « Jeune fille, je te le dis, lève-toi ! Aussitôt la jeune fille se leva et se mit à marcher. Elle avait douze ans ».
Chez les Juifs du temps de Jésus, à douze ans, on est presque majeur ! Ce n’est donc pas une petite fille comme la décrivait son père, symbole tous ces parents qui considèrent leurs enfants comme des éternels bébés, leur refusant de devenir autonomes, les appelant « mon bébé » même à 40 ans alors qu’ils sont déjà mariés. Ça crée des conflits avec les belles-filles et les gendres ! Cette jeune femme est confiée aux deux parents pour former une nouvelle communauté créée par Jésus : la famille est la première communauté ecclésiale. Si l’Eglise est une famille, elle se fonde et s’appuie sur la cellule familiale, parents et enfants qui constituent une Eglise domestique. En cette période estivale où nous allons nous retrouver en famille, puisse Jésus venir soigner nos relations, nos blessures et faire de nous familles des véritables Eglises domestiques. Amen.