Mes chers frères et sœurs !

En ce moment où nous vivons les jeux paralympiques, nous rappelant que l’être humain ne peut être enfermé dans son handicap, l’évangile de ce dimanche nous parle d’une forme de handicap. La surdité. Dans la vie, le handicap est facteur d’exclusion. D’où notre attention à comment nous vivons l’inclusion avec les personnes porteuses d’un handicap dans nos sociétés et dans nos communautés ecclésiales. Dans l’Ancien Testament, la surdité n’est pas qu’une exclusion sociale.  Être sourd, dans l’AT signifie « exclusion du salut » parce qu’un sourd est incapable d’entendre les messages et appels du salut lancés par les prophètes, les prêtres et autres messagers de Dieu.  Très souvent d’ailleurs dans l’AT, les prophètes accusent le peuple d’Israël d’être sourd, c’est-à-dire, d’être fermé, bloqué aux appels à la conversion.

Isaïe y fait allusion dans la première lecture : « Alors se dessilleront les yeux des aveugles, et s’ouvriront les oreilles des sourds ». A notre époque et dans nos sociétés, nous sommes sollicités par tellement des choses à faire, de bruits qui nous viennent de partout, rumeurs et opinions venant de la rue, des tous les médias et les réseaux sociaux, la musique à fond, bruits de la circulation automobile…. au point de devenir presque sourds à nous-même,  aux cris de la planète, des nos frères et sœurs en humanité et aux appels de Dieu. Nous sommes parfois incapables d’entendre et d’écouter le désir profond de notre cœur, cette soif profonde qui est en nous et que rien ne peut étancher à part Dieu. Ce n’est pas pour rien que se développe toutes ces méthodes de méditations orientales qui révèlent à la fois le déficit mais aussi notre besoin profond d’apprendre à s’écouter soi-même, écouter son propre corps, son être profond.

Le protagoniste de l’évangile est un sourd. On parle, à défaut qu’un c’est un sourd muet mais ce n’est pas exactement ça. Il est sourd parce qu’il n’entend pas, mais il n’est pas totalement muet. « Des gens lui amènent un sourd qui avait aussi de la difficulté à parler ». Il a juste du mal à articuler, à communiquer correctement, à se faire comprendre. Ne pas entendre et ne pas se faire comprendre, signifie avec beaucoup de difficulté à entrer en relation. Un sourd-muet risque de s’enfermer sur soi-même, sur son handicap et se couper du monde extérieur. Combien des gens aujourd’hui se coupent des autres pour ne pas s’exposer, surtout quand on porte un handicap, un défaut physique…, aussi parce que les autres peuvent être impitoyable et horrible. Essayez de demander aux élèves du primaires, collège ou lycées. En ce période de rentrée scolaire, on parle de harcèlement scolaire ! Si nous sommes porteurs d’un quelconque handicap (et rassurez-vous, nous en avons tous un, visible ou invisible !), cet évangile de ce dimanche nous rappelle que Jésus veut nous sortir de l’exclusion, de l’isolement par sa main qui nous touche ouvrir nos oreilles et délier nos langues.  Jésus veut nous mettre en relation, avec son Père et avec les autres. C’est le sens de la religion qui veut dire relier, mettre en lien avec Dieu et avec les autres. Le salut, le vrai bonheur, dépend fondamentalement de la qualité de relation que nous arrivons à tisser avec Dieu et les autres. Quelqu’un d’isolé, sans ami ni relation ne peut être véritablement heureux.

Au temps de Jésus, le salut était conçu par rapport à Jérusalem. Les juifs de Jérusalem étaient de facto considérés comme sauvés car résidants de la ville sainte.  Pensons aux avantages des Parisiens par rapport aux les provinciaux ! Plus on s’éloignait de Jérusalem, plus on s’éloignait du salut.  Rien de vraiment bon au-delà de Jérusalem ! Au-delà du périphérique, rien de bon ! Au-delà de Tournefeuille, de Lardenne, de Plaisance, de Saint Simon, de La Salvetat, il n’y plus grand-chose ! On est les meilleurs ! Plusieurs villages en France se réclament comme étant le vrai centre de la France ! C’est le chauvinisme !

Jérusalem était comme le centre du monde. Ceux qui habitaient dans les villes païennes étaient condamnés d’avance car il y avait chez eux un mélange culturel pas orthodoxe, pas du goût des Scribes et Pharisiens. Alors, habiter la Décapole (les10 villes situées au-delà de la Samarie), cela signifiait qu’on était complétement perdu. C’est pourtant là, chez les païens, ceux qui sont condamnés a priori que va Jésus pour commencer sa mission. Oui, la mission, pour les chrétiens est une option préférentielle pour ceux qui sont exclus : les pauvres, les malades, les prisonniers, les sourds et les muets, porteurs de handicap, ceux qu’on peut facilement abandonner en chemin parce que fragiles matériellement, humainement, socialement, intellectuellement, pastoralement.  « Je suis venus pour les pauvres, les malades, dit le Seigneur ! »

La guérison du sourd-muet provoque l’action de grâce du peuple : « Extrêmement frappés, ils disaient : « Il a bien fait toutes choses : il fait entendre les sourds et parler les muets. » Jésus les sauve au moment où ils s’y attendaient le moins. Dans la vie, seuls les gens qui n’attendent pas à un cadeau savent remercier et reconnaître valeur de ce qui leur est donné. La foi chrétienne nous redit que nous ne méritons pas ni salut ni l’amour de Dieu. C’est donné gratuitement, comme ce sourd-muet sauvé de manière inattendue par le Christ.

Un autre élément de cet évangile qui m’a touché est le fait que le sourd-muet était conduit et porté à Jésus par d’autres personnes. « Des gens lui amènent un sourd qui avait aussi de la difficulté à parler, et supplient Jésus de poser la main sur lui. »  Un rappel que nous avons toujours besoin des autres pour être conduit au Christ, pour entendre parler du Christ. L’Eglise, est une famille, une grande communauté où nous avons des frères et des sœurs qui nous conduisent au Christ. Un chrétien qui se coupe des autres, qui vit sa foi sans les autres, dans la solitude (« je suis croyant mais pas pratiquant !!! je n’ai pas besoin de la communauté pour prier, pour croire »), orgueilleux et solitaire coure un grand risque. Que le Christ nous guérisse l’orgueil spirituel et pastoral quand nous croyons tout savoir, pouvoir tout faire tout seul, sans besoin d’aide des autres. La fermeture aux autres, à la communauté est la grande surdité dont Jésus veut nous guérir en cette période de rentrée pastorale.

Pour terminer, je vous invite à l’action de grâce, à la louange, comme ce peuple qui crie : « Il a bien fait toutes choses : il fait entendre les sourds et parler les muets ! » Nos contemporains ont besoin d’entendre notre témoignage de ce que Dieu fait pour nous afin de le suivre et lui ouvrir leurs cœurs. Le monde retrouvera le Seigneur s’il retrouve des chrétiens missionnaires qui croient et qui témoignent de leur foi, de la joie de l’évangile. Seigneur, guéris-nous de nos surdités pour écouter ta Parole, entendre les cris de joie et de souffrance nos frères et sœurs ! Délie nos langues, pour te louer, pour dire du bien des autres, pour te bénir et témoigner de la Joie que tu nous donnes.  Amen