Mes chers frères et sœurs !

En ce dimanche qui est la Journée Missionnaire Mondiale, la Parole aborde un thème important qu’est la prière. En effet, la sainte qui nous accompagne en ce mois d’octobre, qui est le mois de la mission, c’est sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Elle est aussi la patronne des missionnaires. Et pourtant, comme je l’écrivais dans l’édito du TU d’octobre, la Petite Thérèse n’est jamais sortie de son Carmel : elle n’a fait que prier. Aujourd’hui, nous sommes appelés à prier pour tous les missionnaires et soutenir leurs œuvres. Un chrétien porte forcément le souci de la mission non seulement en la soutenant par ses moyens matériels, mais aussi en priant pour ceux qui quittent tout pour aller porter au monde le Trésor de la Bonne Nouvelle, afin que tout homme puisse entendre et rencontrer Jésus sauveur.

La liturgie de la Parole de ce dimanche de la mission revient sur le thème de la prière. Elle nous rappelle cependant qu’il y a prière et prière, celle qui plait à Dieu et celle qui nourrit notre orgueil.  Dimanche dernier, Jésus nous rappeler la nécessité de persévérer, de tenir bon de prier Dieu sans jamais se décourager. Il y a quinze jours, à travers l’histoire des dix lépreux, Jésus soulignait l’importance de la prière d’action de grâce. Souvent, nous pensons à Dieu seulement quand nous avons besoin de lui, nous lui demandons des choses, une guérison, un soutien, la réussite à un concours… et mais une fois exaucés, nous tournons la page, nous l’oublions jusqu’à la prochaine fois que nous avons besoin de lui.  C’est cela que j’appelle la relation-supermarché ou commerciale avec Dieu.

Dans l’évangile d’aujourd’hui, en nous faisant contempler le pharisien et le publicain, Jésus nous met en garde contre la prière du « faux justes », du pharisien qui se cache en chacun de nous quand nous nous présentons devant Dieu en sachant que nous sommes justes et parfaits en tout. Le pharisien de l’évangile marche dans le temple, tellement orgueilleux qu’il se tient physiquement « debout devant Dieu » c’est-à-dire qu’il se met au même niveau que Dieu. On dirait même qu’il veut même dépasser Dieu en se tenant ainsi debout devant Lui.  Ce pharisien me fait penser aux petits enfants : vous êtes à la maison, assis dans des fauteuils et lui, avec ses 5 ans, vient se mettre debout sur le canapé en vous disant : « alors, qu’il est plus grand ! », et ça lui fait beaucoup de bien qu’on lui dise que c’est lui le plus grand ! Ça flatte son égo. Voilà l’attitude de notre pharisien. De l’autre côté, il y a ce pauvre publicain, qui, au contraire, se tient « à distance », loin du Seigneur. Il n’ose même pas lever les yeux vers Dieu car il se reconnaîtpécheur et indigne devant lui. Il se frappe la poitrine pour implorer la miséricorde, comme nous le faisons dans le « Je confesse » au moment du rite pénitentiel.

Dans la vie, dans la société et dans l’Eglise, vous trouverez toujours des gens qui se croient et s’estiment « plus que » les autres. Ils se sentent supérieurs par leurs savoirs (plus intelligents), par leurs richesses (plus riches), par leur expérience (plus expérimentés), par leur vie de foi (plus spirituels, ceux qui se prennent pour les super chrétiens)… Ces gens ont l’intime conviction d’être meilleurs et « supérieurs en tout » passent leur temps à se comparer aux autres. Leurs comparaisons écrasantes ciblent certaines personnes, certaines catégories précises qu’ils méprisent sans s’en rendre compte. Mon collègue au travail est moins instruit, moins diplômé, moins expérimenté….

Lorsque nous commençons à nous considérer supérieurs aux autres en soulignant nos qualités morales et religieuses aux mépris des autres, nous sommes comme le pharisien de l’évangile se tient debout devant Dieu, lui rappelant la litanie de tout ce qu’il fait de bien par rapport aux autres. Symboliquement, rester debout devant quelqu’un, c’est refuser de s’écraser devant lui, c’est montrer sa dignité, sa propre grandeur… Quel humain pourrait honnêtement se sentir l’égal de Dieu au point de lui tenir tête ?  C’est le Diable, Lucifer qui était tellement fier de lui-même au point de vouloir prendre la place de Dieu ! Chaque fois que l’orgueil spirituel prend le dessus en nous considérant parfaits et supérieurs aux autres, nous sommes disciples de Lucifer.  Jésus lui, tout en étant l’égal de Dieu ne s’est pas considéré comme tel, mais il s’est anéanti en s’abaissant jusqu’à mourir sur une croix par amour pour nous.

« Mon voisin, ma grand-mère, ma tante, mon collègue…est une grenouille de bénitier ! Ma mère est une « brave chrétienne » ! C’est cela le pharisaïsme. Par son appartenance à ce mouvement spirituel de stricte observance de la Loi, le pharisien était « séparé et supérieur » des autres. Pour lui, même en matière de foi et de morale, on ne mélange pas les torchons et les serviettes ! Le pharisien se sait meilleur par rapport à ceux qui sont moins que lui, ceux qu’il considère comme « pécheurs », comme ce publicain qui ose même se retrouver au temple en même temps que lui : quelle horreur ! Comment ose-t-il ? Devant Dieu, le pharisien ne loupe pas l’occasion pour rappeler sasupériorité religieuse et spirituelle, avec tous les records : sa grande capacité à jeûner deux fois par semaine alors que la Loi de Moïse n’exigeait qu’un jeûne par an ! Il rappelle à Dieu sa grande générosité car il donne le dixième de tout ce qu’il possède, pendant que la Loi de Moïse n’exigeait ce dixième que sur certains produits de la terre.

L’évangile nous dit que Dieu ne regarde pas tous ces records du pharisien, mais au « rien » de ce publicain qui n’a rien à donner que soi-même, que son cœur contrit qui fait pénitence, sans la prétention d’avoir quelque chose d’autre à donner. Il sait qu’il a tout à recevoir de Dieu ! C’est pour cela qu’il en appelle à la pitié de Dieu : « prends pitié de moi, pécheur ».

L’évangile nous dit que publicain sort du temple justifié, sauvé, et non le pharisien qui n’a pas besoin de Dieu, pas de besoin de conversion : « Je ne suis pas venu pour les justes et les bien portants. Je suis venu pour les malades et les pécheurs ».  Un vrai chrétien, disciple du Christ, est humble en reconnaissant ses propres faiblesses et fragilités. Il n’est pas obsédé par ce souci de soigner seulement les apparences, à donner une image différente de ce qu’il est. Un chrétien se reconnaît forcément pécheur, et comme tel, il sait qu’il besoin d’être sauvé par le Christ parce qu’il ne peut se sauver lui-même. C’est le Christ qui, en donnant sa vie, nous sauve et nous justifie dans sa mort et sa résurrection.

Dans cet évangile, Jésus nous fait aussi comprendre l’importance de la prière sincère, celle qui plaît à Dieu : celle-ci exprime essentiellement notre besoin de conversion et de repentir. La vraie prière refuse le mépris des autres. Ce que le Christ reprouve dans la vie du pharisien, l’hypocrisie qui caractérise son quotidien et sa vie de foi.  Le pharisien est devenu un comédien qui joue un rôle pour être vu et applaudi mais son cœur n’y est pas.

On peut transposer cette parabole d’une religion d’il y a plus 2000 ans à notre vie chrétienne d’aujourd’hui, dans nos sociétés et nos communautés ecclésiales actuelles. Les vices et les vertus de la natures humaines restent les mêmes à travers l’histoire. Aujourd’hui aussi, comme à l’époque de Jésus, Dieu reprouve ceux qui se croient parfaits et justes en soulignant leurs mérites, ceux qui savent qu’ils sont « en ordre » parce qu’ils ne sont pas voleurs, injustes, adultères, ou peut-être parce qu’ils ont fait un pèlerinage à Lourdes, à Fatima ou à Méjugorge, à Taize, parce qu’ils disent le rosaire chaque jour, parce qu’ils font partie de tel mouvement de spiritualité tel que l’Opus Dei, les END, la communauté de l’Emmanuel, le Renouveau charismatique…

Tout cela est bien et louable quand c’est sincère, vient du cœur et n’est pas source de mépris pour les autres ! On ne peut s’en vanter devant Dieu au point de mépriser les autres. Quand nous regardons notre vie en vérité, avec la lumière de Dieu, nous nous rendons compte des pas énormes que nous avons encore à faire. Les saints nous rappellent que plus nous grandissons dans la foi, plus nous nous approchons du Seigneur sa lumière éblouissante nous fait voir combien notre vie est encore remplie des ténèbres par rapport à la sainteté de Dieu. Jésus, plein d’amour et de miséricorde, sauve-nous et guéris-nous de l’hypocrisie et de l’orgueil spirituel. Amen.