Chers frères et sœurs, cet enseignement du Seigneur dans l’Évangile que nous avons proclamé correspond à la conclusion d’un enseignement qui regarde ceux qui ont des responsabilités dans l’Église – mais qui n’est pas responsable dans l’Église ? responsable dans l’église domestique, dans la paroisse, dans le diocèse ?…

Quelques versets auparavant, Pierre demande au Seigneur Ce que tu dis, tu le dis pour nous ou pour tous ? le Seigneur lui répond en comparant les disciples en général à des serviteurs qui attendent leur patron, et ceux qui ont des responsabilités il les compare à des intendants qui ont sous leurs ordres les serviteurs. Et il dit Si l’intendant voit que son patron tarde à venir, alors il se met à frapper les serviteurs, dès lors quand son patron rentrera il recevra de nombreux coups.

Donc le Seigneur dit clairement que cela n’est pas bien que l’intendant se mette à frapper les serviteurs… Et c’est là juste après ces paroles que le Seigneur dit ce que nous avons à peine entendu Je suis venu jeter un feu sur la terre…

Voyez comme ces paroles sont fortes et importantes, le feu c’est l’Esprit Saint, c’est la grâce, c’est la vie divine. Tandis que nous, nous sommes bien entendu faits de terre, de poussière, nous sommes des créatures. Et le feu est jeté sur la terre, la vie divine est jetée dans notre vie.

Il faut bien comprendre ce que dit le Seigneur, il est en train de dire que du moment que le feu est jeté sur la terre c’est inévitable qu’il y ait des problèmes, comme il le dit ensuite, des divisions, des contrastes, des luttes.

Par exemple ce qui va se passer c’est que certains intendants, certains responsables dans l’Église, vont se croire tout-puissants, ils vont perdre la notion des réalités et des autres surtout – et ils vont les frapper. Le feu jeté sur la terre ça a comme effet chez certains de ne se reconnaitre aucune limite…

Le Seigneur n’est pas du tout en train de dire C’est très bien, vous pouvez être violents les uns envers les autres, les intendants peuvent user de violence sur les serviteurs, puisque de toute façon c’est obligé, le feu jeté sur la terre cela va provoquer presque forcément des luttes, des problèmes de toute sorte…

Non il est en train de dire Vous qui avez des responsabilités – vous à plus forte raison – vous devez savoir que vous êtes de la terre, que vous êtes faibles, que vous êtes limités, que vous êtes fragiles, que vous n’êtes pas tout-puissants. Si vous le savez, alors vous vous ferez aider. Quand vous aurez une décision importante à prendre, vous consulterez les autres réellement, d’une façon élargie, alors vous saurez comment vivre ce feu dans votre vie et ce feu va pouvoir vous éclairer et vous transformer en lui-même.

Mais si vous vous cachez à vous-mêmes votre faiblesse native, ça ne va pas fonctionner, vous tomberez, vous détruirez et vous serez détruits. Saint Paul dit la même chose, il dit que nous recevons la vie de la grâce dans des vases fragiles, dans les vases d’argile que nous sommes.

Toutes les paroles de Jésus sont très fortes…

Il continue en disant qu’il doit recevoir un baptême – pour ses contemporains c’est très clair, il s’agit d’être immergé dans de l’eau, c’est le premier sens de la parole. Lui qui est du côté du feu qu’il nous envoie, il va être immergé dans l’eau, donc son baptême c’est une mort bien sûr, mais pas n’importe quelle mort, c’est sa divinité qui meurt, sa vie divine va mourir – c’est presque fou. Et c’est en effet ce qui va se passer. Durant sa Passion sa divinité va être cachée, il va prendre sur lui tous nos péchés et il ne sera plus en présence de Dieu – c’est le grand mystère de la Passion de notre Seigneur.

Par ses paroles nous voyons que notre Seigneur est divisé, il ressent la joie et la tristesse à la fois, la hâte et l’angoisse, il est Dieu et il renonce aux privilèges de sa divinité – il est bel et bien divisé. C’est très surprenant.

Mais notre Seigneur est divisé pour nous apporter une paix profonde, une véritable sérénité que personne d’autre ne peut nous apporter. Il ne nous apporte pas la paix que le monde nous propose, la paix du pacificateur, la paix du plus fort, avec un vainqueur et un vaincu comme nous le voyons dans le monde notamment en ce moment. Non le Seigneur nous apporte une autre paix, que seul lui peut nous donner, une paix bien plus profonde.

Il est divisé pour être proche de chacun d’entre nous sans exception. Il est proche de celui qui se sanctifie et qui se laisse transformer par l’Esprit Saint. Mais il est proche aussi du pécheur endurci qui ne se soucie pas de se sanctifier – il a connu la Passion et la Résurrection pour cela, pour être avec chacun d’entre nous.

C’est ce que nous expérimentons lorsque nous sommes persécutés, quand nous sommes victime d’injustice, de calomnie. Nous sentons que le Seigneur est avec nous et nous sentons qu’il est aussi avec celui qui nous persécute – il est avec l’un et avec l’autre. Le Seigneur ne nous donne pas à vivre une guerre sainte avec Lui de notre côté contre l’oppresseur, il est des deux côtés à la fois. Dans un premier temps c’est difficile à accepter, mais quand nous l’acceptons alors nous sommes vraiment avec lui et là nous recevons une paix et une sérénité incomparables.

Chers frères et sœurs, le Seigneur nous demande de méditer cet enseignement qui est très riche pour vivre authentiquement la vie qu’il nous donne de vivre, une vie faite de terre et de feu. Si nous la vivons avec lui, dans l’humilité et la solidarité, alors vraiment l’Esprit Saint pourra nous transformer comme le feu qui transforme en lui-même tout ce qu’il touche, sans nous détruire et sans détruire autrui.