Mes chers frères et sœurs !
Aujourd’hui, je voudrais vous inciter au harcèlement….! Attention ! Je ne parle pas de ce harcèlement qui tue, qui brise des vies, torture la victime, comme celui dont sont victimes de plus en plus d’enfants dans nos écoles. Il ne s’agit pas du harcèlement de votre secrétaire, manager, collègue, conjoint, voisin de palier, vos enfants ou votre curé ! Le harcèlement que je recommande a pour unique objet et seule victime Dieu. Oui, je vous conseille fortement de harceler le Seigneur, surtout dans notre vie de prière, au point de ne lui laisser même pas une minute de repos ! C’est lui-même lui-même qui, nous incite lui-même à le harceler sans nous arrêter dans les lectures de ce dimanche.
Nous nous sommes tous retrouvés un jour dans une situation où demandons quelque chose à Dieu avec insistance. Nous avons à ce moment-là besoin d’une grâce spirituelle particulière, ou une aide, une faveur, un soutien et du réconfort au moment d’un deuil, soutien et courage pour notre couple qui allait mal, la guérison de cette maladie, pour nous-mêmes ou pour un proche… et cela nous a paru trop long !
Tenir bon et insister dans la prière, harceler Dieu est un signe de bonne santé spirituelle, de confiance et de foien Dieu. Vous ne vous êtes pas senti exaucés par Dieu et vous vous dites, avec raison : « Mais, Seigneur, pourquoi restes-tu à rien faire ? Tu sais que nous sommes pauvres, limités dans nos moyens, incapables devant certaines épreuves de la vie… et alors, tu dois nous aider, il faut que tu viennes à notre secours ! »
Si nous faisons l’expérience d’un certain silence de la part de Dieu, ne baissons pas les bras. Contemplons Jésus sur la croix. Il fait l’expérience du même silence et de la même solitude. Il prie mais ne trouve pas de réponse immédiate mais la résurrection sera la réponse du Père. Il dit à son Père : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? », mais il ne reçoit aucune réponse ! Pourtant, cela n’atteint pas sa confiance dans le Père car il dit, avant de mourir : « Père, entre tes mains je remets mon esprit ! ». Cette confiance tenue jusqu’au bout trouvera la réponse trois jours plus tard, dans le mystère de la résurrection.
Nous devons tenir bon et insister comme Moïse et la veuve de l’évangile. La veuve de l’évangile est devant un juge qui « juge sans justice » et qui refuse de lui rendre justice. Mais elle a tenu bon jusqu’au bout ! Sa persévérancefinit par décider ce mauvais juge à lui faire justice. « Il y avait une veuve qui venait lui dire : ‘Rends-moi justice contre mon adversaire. Longtemps il refusa ; puis il se dit : ‘Même si je ne crains pas Dieu et ne respecte personne, comme cette veuve commence à m’ennuyer, je vais lui rendre justice pour qu’elle ne vienne plus sans cesse m’assommer. » Ce juge dur, sans pitié, sans compassion et ne craignant pas Dieu a cédé devant la ténacité et la persévérance de la veuve.
Contemplons cette veuve qui nous est donnée comme modèle. Dans la tradition biblique, la veuve et l’orphelin, (et l’étranger) sont une catégorie abandonnée et méprisée de la société, tellement fragiles et sans défense que tout le monde pouvait abuser d’eux, les écraser. En effet, c’est le mari qui défend son épouse ! C’est le papa qui défend et protège son enfant. Perdre le mari pour une femme ou le papa pour une enfant, c’est se trouver en situation de grande fragilité. Du coup, la veuve et l’orphelin ne pouvaient compter que sur Dieu seul. Dans cet évangile, vous voyez bien que cette veuve ne demande pas des passe-droits ! Elle ne demande pas de la pitié ni une faveur particulière…. Elle réclame tout simplement son droit : qu’on lui fasse justice, rien de plus ! Même cela, personne ne veut le lui accorder.
Normalement, la justice, dans sa nature même, est sensée défendre tout le monde. Ne lit-on pas, même dans nos tribunaux « que nous sommes tous égaux devant la Loi et que la justice est égale pour tous ! Le juge, en principe, doit être impartial. Parfois, comme vous le voyez, cela est une conception de la justice est contredite par la réalité : beaucoup d’exemples montrent malheureusement que que nous ne sommes pas tous traités de la même manière par la justice humaine qui peut paraître parfois cynique et injuste ! Un de mes chanteurs préférés, Lucky Dube, dit dans une de ses chansons, que notre société est tellement corrompue qu’elle cherche à acheter l’amour et la justice, et qu’amour et justice s’achètent… et qu’une enveloppe de dollars peut faire changer la décision d’un juge à la vitessed’une roquette ». Ceci n’est pas nouveau ! Je ne vais pas m’attirer la colère des magistrats, avocats et juristes !
La veuve croyait en la justice et elle n’a pas baissé les bras ! Elle a lutté jusqu’au bout, tenant tête au juge sans justice. Le changement d’attitude du juge n’est rien d’autre qu’une preuve supplémentaire de son égoïsme : il accepte de faire justice, non parce qu’il croit en la vertu de la justice mais bien parce qu’il veut être tranquille, sans cette casse-pied de veuve de le harcèle et l’importune.
Faisons attention ! Quand nous prions, nous ne nous adressons pas à un juge sans justice et sans pitié mais à un Père, plein de tendresse et de miséricorde, un juge plein justice et bonté. Même quand Il semble silencieux parce qu’il n’obéit pas à nos requêtes dans un temps et dans un espace bien précis, notre Dieu est toujours fidèle. Il ne ferme ni ses oreilles, ni son cœur à ses enfants. Nous le voyons dans la première lecture. Moïse prie Yahvé pendant que Josué est allé combattre les Amalécites en vue de la conquête de la Terre Promise. Le temps devient trop long. Moïse se fatigue. Mais il ne baisse pas les bras parce qu’il sait que Dieu écoute toujours nos prières. C’est ainsi qu’il demande à Aron et Hour de soutenir ses bras en prière.
Cette demande de soutien me fait penser à toutes ces personnes qui demandent de prier en communion, ensemble avec elle pour telle ou telle personne. Soutenons-nous dans la prière. Prier les uns pour les autres est un geste de solidarité, une entraide fraternelle. L’union fait la force… et cela vaut plus encore dans la prière. Les chrétiens sont appelés à se porter mutuellement et ensemble dans la prière. C’est une grande richesse de pouvoir compter sur la prière des autres. Le Seigneur nous demander de prier ensemble et avec insistance.
Prier avec insistance est une preuve de la solidité de notre foi. Baisser les bras devant ce qui semble le silence ou manque de réponse de Dieu, même devant nos lourdes épreuves, est un signe que nous sommes, au niveau de la foi, comme nos enfants qui veulent parfois « tout ici et maintenant », et qui sont capables de nous dire : « papa, maman, je ne t’aime plus parce que je tu ne me donnes pas ce que je demande ! » C’est un chantage que nous entendons souvent ! « Je ne crois plus en Dieu parce qu’il n’a pas exaucé ma prière quand je lui demandé de guérir mon enfant, mes parents, tel ami, mes grands-parents… et qui sont mort depuis ! » Je ne sous-estime pas la douleur ou la révolte de ne pas se sentir entendu par Dieu… Mais, la foi tenace nous dit que ce silence de Dieu, comme celui expérimenté par que le Christ a en croix, trouve la réponse dans la résurrection.
Saint Paul nous rappelait dimanche dernier que le Seigneur est toujours fidèle, qu’il ne peut se renier lui-même. Demandons-lui de faire grandir et de purifier notre foi, pour que rien ne vienne ébranler notre confiance totale en Lui. Même quand nous sommes dans l’épreuve, crucifiés par et sur les croix des épreuves de notre vie, Jésus est crucifié avec nous et porte sa croix avec nous, nous promettant la victoire dans la résurrection si nous lui faisons totalement confiance. Seigneur, augmente et affermis notre foi qui est parfois fragile et vacillante. Amen.