Mes chers frères et sœurs !
Hier, en la fête de la Toussaint, nous avons contemplé « la Cité sainte, la Jérusalem Céleste avec cette foule innombrable de bienheureux ». Au lendemain de cette célébration solennelle et joyeuse, nous avons le cœur encore tourné vers le ciel, entourés de tous les saints qui prient pour nous et nous soutiennent, nous qui sommes encore en marche sur terre. Mais nos cœurs sont remplis de douleur parce que nous commémorons tous les fidèles défunts qui nous ont précédé auprès du Seigneur. Leur présence nous manque, et leur absence est vécue avec douleur. Cependant, notre célébration est la manifestation de la foi et de l’Espérance chrétienne, un signe de gratitude pour ce que le Seigneur nous a donné à travers ce que nous avons partagé avec nos proches défunts.
Prier pour les morts est une nécessité pour nous, les vivants. Cela nous permet de maintenir et entretenir le lien, dans la foi, avec nos défunts, en regardant la réalité de la mort à travers la lumière de la foi. Saint Paul nous exhorte « à ne pas être tristes, à ne pas rester abattus comme ceux qui n’ont pas d’espérance ». Il nous rassure et nous console en soulignant que « si en effet, nous croyons que le Christ est mort et ressuscité, de même nous devons croire que Dieu, par Jésus mort et ressuscité, réunira ceux qui sont morts » (1Thes 4, 13-14). Nous sommes donc dans cette dialectique : la douleur de la séparation par la mort mais la joie de la promesse de l’immortalité, de la résurrection qui soutient notre espérance.
Plus que jamais, il est urgent et nécessaire aujourd’hui d’évangéliser la réalité de la mort et de la vie éternelle. Ces deux réalités sont sujettes à beaucoup de croyances superstitieuses et au syncrétisme qui masquent et dénaturent la vérité de notre foi. Nous n’avons qu’à voir le nombre croissant de ceux qui confondent résurrection et réincarnation. Trop de confusion autour de la mort et de la vie après la mort, l’au-delà. La déchristianisation de nos sociétés et les nouvelles croyances du New-Age ne font qu’amplifier cette confusion.
Il nous faut redécouvrir l’Espérance chrétienne pour en témoigner auprès des hommes et femmes de notre temps parce que la foi chrétienne doit transformer concrètement notre vie au quotidien. Dieu veut que nous vivions en hommes et femmes d’espérance et en témoigner au milieu des aléas de la vie quotidienne. En regardant nos sociétés, je me demande si les hommes et les femmes de notre temps ont encore un minimum de désir pour la vie éternelle ! Pour beaucoup de nos contemporains, l’existence terrestre est devenue la seule et l’unique perspective, une vraie impasse. Pire encore, nous voyons que notre existence est parfois caractérisée par des épreuves, des douleurs, une insatisfaction permanente qui rend parfois la vie insupportable. Dans ce contexte, l’absence de foi en la résurrection et de l’espérance en la vie éternelle conduit beaucoup de nos contemporains à concevoir la vie comme une fatalité.
Nous sommes tous conscients de ce vide, de cette soif qu’il y a en chacun de nous et qui nous fait aspirer à un bonheur infini que la vie terrestre, sous toutes ses dimensions, n’arrive et n’arrivera jamais à nous donner ! La peur, l’angoisse, l’incertitude que nous éprouvons devant la mort est signe que Dieu nous a fait pour la Vie. Nous désirons vivre pleinement, nous aspirons à la vie heureuse, la béatitude comme dit saint Augustin, à la félicité éternelle. Nous ne savons pas encore ce que c’est ni comment c’est, mais nous nous sentons attirés par cette félicité infinie. Saint Augustin dit « tu nous as fait pour toi Seigneur, et notre cœur est sans repos, tant qu’il ne demeure en toi ! »
Il s’agit là d’une espérance universelle, enracinée dans le cœur de tout humain, de tous temps et de tout lieu. Il ne s’agit cependant pas d’une succession sans fin, le passage infini d’un état à un autre, bref, il ne s’agit pas de réincarnation. La vie éternelle est quelque chose de définitif : la plongée définitive dans l’Amour infini de Dieu, en Jésus qui nous a dit, avant de mourir : « je pars vous préparer une place, et là où je suis, vous serez vous aussi ! ». Il s’agit d’une plénitude de vie et de joie auprès de Jésus ! C’est cela que nous espérons et attendons du Christ, car il nous l’a lui-même promis. Nous l’attendons nous qui sommes encore pèlerins en ce monde, et nous le désirons, le prions pour nos frères et sœurs qui ont fini leur pèlerinage en ce monde, et dont le souvenir nous plonge toujours dans la tristesse. Pour certains parmi nous, la tristesse est très récente et pour d’autre, les années n’ont pas réussi à alléger nos cœurs de cette douleur toujours aussi présente.
Nous sommes cependant tous appelés à renouveler ce soir notre espérance dans la vie éternelle fondée dans la mort et la résurrection du Christ. Redisons au Christ mort et ressuscité notre joie, notre action de grâce d’avoir été touchés concrètement par son Amour à travers la vie concrète et l’amour dont nous avons été bénéficiaires de la part de nos frères et sœurs défunts avec qui nous avons partagé un bout de la vie. Malgré leurs fragilités, chacun d’eux nous a donné de goûter un peu à une dimension de l’Amour de Dieu. N’oublions jamais de recommander nos défunts au Seigneur de la Vie. Prier pour les défunts, les recommander au Christ, Maître de la Vie, Vainqueur de la mort par sa résurrection, est signe de gratitude, une marque d’amour pour tout ce qu’ils nous ont donnés. Prier pour les défunts est un devoir pour les chrétiens, un acte de miséricorde, la manifestation de l’amour qui est plus fort que la mort.
Seigneur Jésus, dans la douleur de notre deuil, mais pleins d’espérance en toi, nous venons te recommander nos frères et sœurs défunts, dans l’espérance de les retrouver un jour, auprès de Toi, en ce lieu où il n’y a plus du deuil, ni douleur, mais la joie et la paix. Qu’ils reposent en paix. Amen