Homélie du Père Clément du XXIX° dimanche du Temps Ordinaire, année B (2024)
Chers frères et sœurs en Christ,
Les textes de ce jour nous plongent dans une des réalités les plus profondes du mystère chrétien : la vraie grandeur selon Dieu. Une grandeur qui, aux yeux du monde, semble souvent incompréhensible, car elle passe par la souffrance, l’humilité, et le service. C’est la leçon que Jésus veut nous donner dans cet Évangile de saint Marc, où nous voyons la demande des apôtres Jacques et Jean. Ils viennent avec ambition, désirant occuper les premières places dans le Royaume de Dieu. Mais Jésus les rappelle à une vérité essentielle : « Le Fils de l’homme est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude » (Mc 10,45).
- Le Serviteur souffrant
Dans la Première Lecture tirée du prophète Isaïe (53,10-11), nous sommes confrontés à la figure du « Serviteur souffrant », une figure qui préfigure le Christ. Ce passage nous décrit un Serviteur qui accepte la souffrance pour le salut de beaucoup. Cette image bouleversante de la souffrance innocente nous renvoie directement à la Passion du Christ, lui qui a été « écrasé par la souffrance », mais qui, par cette offrande, apporte la justification à une multitude. Il ne s’agit pas ici de glorifier la souffrance en elle-même, mais de voir en elle un chemin de salut, quand elle est acceptée dans l’amour et l’obéissance à la volonté de Dieu. Le véritable triomphe du Christ ne s’est pas accompli par la force des armes ou la domination, mais par la Croix, symbole ultime du don de soi.
Comme le dit saint Jean Chrysostome : « Il n’y a pas de couronne sans combat, pas de victoire sans lutte, pas de gloire sans Croix. »
- Le prêtre compatissant
Dans la Deuxième Lecture, saint Paul nous montre le Christ comme notre grand prêtre, un prêtre capable de « compatir à nos faiblesses » (He 4,14-16). Jésus, en s’incarnant, a pris sur lui nos souffrances et nos limites humaines. Il ne s’est pas contenté de nous sauver de loin, il est venu partager notre condition. Ainsi, il ne nous regarde pas de haut, mais il nous rejoint dans nos difficultés, nos angoisses, nos faiblesses. Ce grand prêtre, qui est assis à la droite du Père, continue d’intercéder pour nous. Dans notre faiblesse, il nous invite à « nous approcher avec assurance du trône de la grâce », car en lui, nous trouvons toujours la miséricorde et le pardon.
Saint Augustin disait : « Dieu n’a pas dit que nous n’aurions pas de tribulations, mais il a promis que dans ces tribulations, il serait avec nous. »
- Le service comme chemin de grandeur
Revenons à l’Évangile. Jacques et Jean cherchent la gloire humaine, mais Jésus les réoriente vers une autre vision de la grandeur. Ils doivent d’abord passer par la coupe du sacrifice, par la participation à la souffrance du Christ. Jésus rappelle que la vraie grandeur, dans le Royaume de Dieu, ne consiste pas à dominer ou à être servi, mais à se faire serviteur. Le service devient ici le chemin vers la plénitude du Royaume.
Le Pape François, dans sa simplicité, nous l’a souvent rappelé : « Le pouvoir, c’est le service. […] Il faut servir les autres. » Cette perspective nous bouleverse, car elle bouleverse nos schémas mondains : pour être grand, il faut se faire petit. Pour gouverner, il faut d’abord savoir se mettre à genoux devant son frère. L’humilité, c’est le propre des cœurs grands.
Permettez-moi de vous raconter une petite anecdote que j’ai écouté une fois d’un évêque :
Louis Pasteur et son chapelet
En 1892, un homme âgé voyageait en train, assis tranquillement en priant son chapelet. Un jeune étudiant en sciences médicales s’installa à ses côtés et remarqua le chapelet entre ses mains. Saisissant l’occasion, l’étudiant, avec un ton légèrement condescendant, lui dit :
« Monsieur, à notre époque moderne, il est vraiment dommage de voir des personnes comme vous s’attacher à ces pratiques démodées. La science a tellement progressé que ces superstitions n’ont plus leur place aujourd’hui. »
Le vieil homme, serein, écouta patiemment le jeune qui continuait à lui parler des avancées scientifiques, tentant de le convaincre d’abandonner ces « croyances dépassées ». À la fin de leur conversation, l’étudiant, certain de lui, proposa d’envoyer au vieil homme des documents pour lui démontrer comment la science rendait la foi obsolète. Il lui demanda alors sa carte de visite pour pouvoir lui faire parvenir ces informations.
Le vieil homme sourit doucement, sortit une carte de sa poche et la tendit au jeune étudiant. Celui-ci la prit et lut avec stupéfaction :
LOUIS PASTEUR
Microbiologiste, naturaliste, biologiste, membre de l’Académie française.
Le jeune homme réalisa alors qu’il avait passé tout ce temps à prêcher les mérites de la science à l’un des plus grands scientifiques de son époque, celui qui avait révolutionné la médecine grâce à ses découvertes sur les vaccins et les micro-organismes.
Abasourdi, il leva les yeux vers Pasteur, qui, avec une bienveillance profonde, lui dit : « Plus j’étudie la science, plus je crois en Dieu. Le chapelet est pour moi un moyen de rester en contact avec Celui qui est à l’origine de toute vie et de toute création. »
Cette anecdote illustre la simplicité et l’humilité de Louis Pasteur, tout en mettant en lumière la façon dont il alliait science et foi dans sa vie quotidienne. Elle nous rappelle que la véritable sagesse réside dans l’équilibre entre la connaissance et la foi, et que l’une n’exclut pas l’autre. Ce récit nous montre aussi la grande valeur de l’humilité.
- Le chemin du disciple
Frères et sœurs, cette Parole d’aujourd’hui nous invite à revoir notre conception de la grandeur et de la réussite. Le monde nous enseigne que la grandeur se trouve dans le prestige, le pouvoir, ou l’influence. Mais Jésus nous enseigne que la véritable grandeur se trouve dans le service humble et désintéressé, dans le don de soi pour les autres, à l’image de son propre don sur la Croix. ( funérailles de Reine…du service )
Le psaume de ce jour (Ps 32) nous rappelle que « l’amour du Seigneur remplit la terre » (Ps 32,5). C’est cet amour qui soutient le serviteur dans ses moments de sacrifice et de souffrance. C’est cet amour qui le conduit à la gloire, non celle des hommes, mais celle de Dieu.
En conclusion, demandons à Dieu la grâce d’imiter son Fils, Jésus-Christ, dans le service de nos frères et sœurs. Que nous puissions, à son exemple, nous dépouiller de tout désir de domination pour embrasser avec foi et courage notre mission de serviteurs. Car c’est en servant que nous trouvons la vraie joie et que nous découvrons la grandeur de l’amour divin.
***Je termine avec LA PRIERE DE ST IGNACE, dite « Prière Scoute »….une prière qui a accompagné mon adolescence et ma jeunesse.
Seigneur Jésus, Apprenez-nous à être généreux, A Vous servir comme Vous le méritez A donner sans compter, A combattre sans souci des blessures, A travailler sans chercher le repos, A nous dépenser, sans attendre d’autre récompense, que celle de savoir que nous faisons Votre Sainte Volonté. Amen.