Par le Père René Kouamé
Apres sept années pastorales passées dans le diocèse de Toulouse (2016-23), où j’ai découvert plusieurs réalités et diverses formes de transmission de l’évangile, en obéissance à l’esprit de Pentecôte et à l’Église, il me faut « aller dans d’autres territoires pour témoigner ». En effet, depuis le souffle de la Pentecôte, rien n’est jamais figé dans l’Église de Dieu, ni suspendu pour longtemps. Le temps de nous faire nos adieux est donc arrivé. Ces années passées dans l’ensemble paroissial Cazères-Carbonne, à la Cathédrale saint Etienne et dans l’ensemble paroissial de Tournefeuille ont été pour moi des moments d’observation, d’études et j’espère de témoignage de la joie baptismale. J’ai essayé avec mes faiblesses et lacunes d’être au service de tous et de l’Eglise selon mes possibilités. Au cours de cette présence, j’ai peut-être blessé, offensé certaines personnes par mes actes. Je voudrais ici leur présenter toutes mes excuses et demander leur miséricorde.
Cinq ans dans l’ensemble paroissial de Tournefeuille, à l’échelle de la vie humaine n’est pas une valeur négligeable. En arrivant à Lardenne, j’ai aimé dire ces mots : « Les pasteurs changent. Un prêtre passe. Un autre arrive. Ils sont différents les uns des autres. Mais le Christ demeure, et c’est toujours le même Seigneur. L’appui de nos vies, c’est le Christ ». Oui, Jésus Christ est le seul et unique Pasteur qui nous conduit au Père. C’est Lui : le Chemin, la Vérité et la Vie. Ma première mission était d’annoncer sa parole de vie, d’amour, de compassion et d’espérance…Ceux qui ont écouté la Parole que j’aime partager ont peut-être un peu compris le sens de la vie chrétienne et y ont trouvé le pain pour la route de vie…L’Eglise, c’est cette communion de personnes qui partagent la même foi et le même amour de Dieu. C’est bon d’être chrétien ! Avec vous, j’ai vécu les joies et les peines de notre communauté, rappelant l’espérance chrétienne, annonçant Jésus-Christ et célébrant les sacrements. Merci à vous tous qui m’avez aidé et m’avez soutenu pendant ces années à tenir le cap dans les vents parfois contraires…. Merci de votre fidélité dans la prière et de votre amitié. Que le Seigneur vous garde précieusement dans son Amour. Le temps passé à vos côtés restera gravé dans ma mémoire et dans mon histoire. Bonne route avec vos pasteurs.
Partir c’est poursuivre en étant armé de son vécu et de l’enseignement des expériences passés. Suivre le Christ est avant tout un appel à marcher à sa suite et à devenir l’écho de l’évènement de Jérusalem. Témoigner c’est se mettre en route vers l’autre, l’inconnu. « Sortons, sortons », dit le pape François, « pour offrir à tous la vie de Jésus Christ » (Evangelii Gaudium, no. 49). Nous sommes tous appelés à être des témoins de Jésus-Christ. Nous sommes tous invités à sortir pour nous mettre en pèlerinage le 2 juillet. À la suite des apôtres, rendez-vous nous est donné en Galilée (ND d’Alet) pour nous laisser imprégner de l’Esprit Saint, à travers la prière, le partage de la parole et la communion fraternelle, afin de pouvoir accomplir pleinement et jusqu’au bout notre mission de témoin. Comme le dit à ce propos le pape François, « […] aucun chrétien ne peut rendre un témoignage complet et authentique […] sans l’inspiration et l’aide de l’Esprit. […] L’Esprit est donc le véritable protagoniste de la mission : c’est lui qui donne la parole juste, au bon moment et de juste manière ». (Pape François, Message pour la journée mondiale des missions, 2022). Un témoignage aussi fort ne peut être apporté que si l’on a une relation profonde avec Dieu. Une rencontre entre le disciple et le maître est nécessaire avant l’entrée en mission, comme en témoigne la vie de Jésus, qui commençait toujours ses journées missionnaires en se retirant d’abord pour prier son Père. Après la prière, il allait alors vers les gens, exprimant sa solidarité et sa compassion. On voit donc que Jésus ne s’éloigne pas de la souffrance des gens, elle ne le laisse pas indifférent. Ses yeux, ses oreilles et ses mains ont toujours porté leur attention sur l’histoire des gens, sur leur souffrance, leur espoir et leur peur. C’est pourquoi, en tant qu’Église, nous devons « connaître et comprendre le monde dans lequel nous vivons, avec ses attentes, ses idéaux et ses traits souvent dramatiques » (Gaudium et Spes 4). C’est alors seulement que nous pourrons agir ou réagir de manière appropriée. Le pape François, s’adressant aux jeunes, souligne que «l’Église sans le témoignage, n’est que du vent parce que là où il n’y a pas de témoignage, il n’y a pas l’Esprit-Saint » (14 août 2018). Et il ajoute, dans son message pour la Journée missionnaire mondiale 2022 : « l’Église, communauté des disciples du Christ, n’a d’autre mission que celle d’évangéliser le monde en témoignant du Christ. L’identité de l’Église est d’évangéliser». C’est un appel à être une Église en sortie, qui porte la Bonne Nouvelle. L’Église est née, grandit et vit du témoignage. Le pape Paul VI écrit : « Celui qui a été évangélisé évangélise à son tour. C’est là le test de vérité : il est impensable qu’un homme ait accueilli la Parole … sans devenir quelqu’un qui témoigne et annonce à son tour» (Evangelii Nuntiandi 5,24).
Chers sœurs et frères en Jésus-Christ, chers paroissiens, je crois que l’on ne naît pas témoin de Jésus-Christ, mais qu’on le devient ! Tout d’abord, dans les Actes des apôtres, les témoins apparaissent partout où la Parole peut rencontrer les hommes, dans des lieux variés, aussi bien au tribunal qu’au temple. Il n’y a donc pas de lieu de prédilection, ni de lieu inadéquat, pour témoigner de sa foi en Dieu. Dans les Actes des apôtres, les témoins, à l’exemple de Témoins d’ici et témoins d’ailleurs, nous sommes pétris de la même pâte humaine ; capables des mêmes erreurs, mais appelés malgré tout à devenir ensemble des artisans de paix. Nous sommes appelés à sortir de nos rituels pour découvrir des horizons nouveaux, où rencontrer d’autres personnes en chemin et chercher ensemble la justice et la paix. Nous avons reçu vocation, par le baptême, de montrer que la vie est possible et qu’elle n’est possible qu’en relation, en Eglise. Nous avons reçu vocation de le montrer par des gestes et des paroles qui touchent, à l’image de Jésus. Cette communion se construit dans une dynamique de formation continuelle. En y participant activement, nous montrons que nous sommes, ensemble, en mission ! Notre vocation de devenir témoins du Christ n’est pas assortie d’une obligation de résultat. Car personne parmi nous ne saurait maîtriser les effets de la Parole de Dieu que nous sommes invités à annoncer. Jésus, seul, a le pouvoir de toucher les cœurs. Nous, ses disciples et témoins, nous sommes appelés à dire à notre tour les paroles et les actes qu’une multitude d’êtres humains ont reçus comme étant Parole de Dieu. Ils l’ont laissé agir en eux pour y discerner l’appel à se mettre en marche, à devenir témoins d’un amour qui les dépassait, à s’aventurer avec leurs forces et leurs faiblesses sur un chemin de service. Libérés de toute obligation de résultat, Dieu nous invite à devenir ses témoins. Dans cette tâche, constitutive de notre identité chrétienne, nous pouvons compter sur sa promesse : « Je suis avec vous, tous les jours, jusqu’à la fin du monde. » Amen.