Nous sommes finalement arrivés au cœur de la foi chrétienne : la passion et la mort du Dieu toujours vivant ! Pendant 40 jours, nous sommes allés au désert pour y être tentés avec le Seigneur, ensuite sur le Tabor pour admirer la beauté de la transfiguration, le temple de Jérusalem pour rappeler qu’est une maison de prière et pas de trafic ni de commerce ! Nous avons été instruits par le dialogue entre Jésus et Nicodème. Ensuite, dimanche dernier nous nous sommes retrouvés parmi ces Grecs qui, exprimaient à Philippe leur désir de voir Jésus.

Nous entrons aujourd’hui dans cette grande semaine, appelée sainte, parce qu’elle est le coeur de la vie chrétienne. Nous accompagnons Jésus, dans les dernières heures de vie terrestre, pour lui demander la grâce de vivre pleinement et avec passion notre vie ici-bas. Nous suivrons Jésus, chaque jour de cette semaine, en nous plongeant cette ambiance faite de silence, de peur, de douleur et trahison. Il s’agit de jours d’angoisse pour Jésus ! Lui ouvrirons-nous enfin notre cœur ou bien, Jésus, le Fils de Dieu restera-t-il parmi les millions des crucifiés anonymesde l’histoire de l’humanité ? Jésus choisit de mourir et joue sa dernière carte ! On peut parler de la mort de Dieu. Arrêtons-nous cette semaine et admirons ce spectacle de la croix qu’il faut appeler « spectacle de l’Amour Infini ».

Le dimanche des Rameaux nous raconte une contradiction.  Une foule qui accueille Jésus de manière triomphale et enthousiaste. Elle crie « hosanna au fils de David ». Rameaux en mains, habits étendus à son passage, ils acclament le Roi. Mais cette même foule, vendredi soir, va crier « crucifie-le » La Passion du Seigneur est marquée par plusieurs contradictions. Pierre qui se dit être prêt à donner sa vie pour Jésus, mais qui se défile et le reniedevant les questions d’une simple servante.  Où sont les disciples ? Amis de Jésus, ils ont été avec lui nuit et jour pendant trois ans, mais, à ce moment crucial et éprouvant de la vie de Jésus, ils sont soit endormis poings fermés, soit, ils l’ont abandonné en prenant la fuite. Pas la peine de rappeler la trahison de Judas, l’un des douze qui le vend.

Quand nous lisons les récits de la Passion du Seigneur, ne cherchons pas les bons et les méchants. Cherchons plutôt à y trouver notre propre place, avec les côtés lumineux et obscurs de notre vie. Nous sommes ces disciples qui choisissons tantôt de rester à ses côtés, mais qui le trahissons alors qu’il a besoin de notre aide, parfois d’accord avec Pilate pour crucifier Jésus en dehors de Jérusalem, quand nous le jetons en dehors de nos vies par lâcheté ou par convenance personnelle. C’est seulement en accueillant ces contradictions que nous pouvons réellement vivre ces fêtes pascales pendant lesquelles nous célébrons la plus grande défaite, celle de la passion et de m mort de Dieu, mais défaite qui est devenue ensuite la plus grande victoire. Si nous acceptons de vivre ces contradictions, échecs, défaites et chutes avec Jésus, alors nous pouvons aussi célébrer la victoire à ses côtés : « Si nous souffrons avec lui, avec lui nous régnerons, si nous mourons avec lui, avec lui nous vivrons ! »

Le récit de la Passion selon saint Marc est celui qui conserve pratiquement à la lettre le récit primitif de la Passion tant aimé par les chrétiens de la communauté primitive de Jérusalem. Ce récit était tellement aimé et vénéré par la première génération des chrétiens que ces derniers le lisaient lors des assemblées pour que chaque nouveau chrétien soit mis devant la contemplation du vrai visage de Dieu révélé au Golgotha, un Dieu qui est Amour, qui accepte de souffrir par amour.

Saint Marc, à la différence des autres évangélistes, met en lumière les réactions très humaines de Jésus devant la mort.  Nous pouvons ainsi contempler Jésus qui a peur, qui est terrorisé ! Seul saint Marc mentionne que Jésus, dans le jardin des Oliviers, se rendant compte qu’on le cherchait pour le condamner à la mort, « commença à ressentir frayeur et angoisse, et dit « mon âme est triste à en mourir » Dans ce récit, Jésus ne dit rien quand Judas l’embrasse.

Dans ce récit de la Passion, Jésus est toujours en silence. Aux autorités religieuses qui lui demandent s’il est le messie et à Pilate qui veut savoir s’il est le roi, Jésus répond simplement par un : « oui je le suis », sans rien ajouter d’autre. Bref, un Jésus qui ne se rebelle pas devant les événements qu’il ne peut empêcher mais qui il lâche prise totalement pour permettre que les choses arrivent selon le projet du Père.

Dans ce récit, contemplons un personnage particulier : le centurion romain. Tout l’évangile de Marc cherche à répondre à question : qui est Jésus ? Quel est l’identité de Jésus ? La réponse nous est donnée dans la profession de foi d’un étranger, un païen, et non par la bouche d’un disciple. L’évangile nous dit : « Le centurion qui était là en face de Jésus, voyant comment il avait expiré, déclara « Vraiment, cet homme était Fils de Dieu ! » Le centurion nous indique en quoi consiste la foi chrétienne : reconnaitre le Fils de Dieu dans le visage crucifié de Jésus.

Si pendant le carême nous avons été acteurs et protagonistes par nos prières, nos sacrifices, nos pénitences, nos jeûnes….la cette semaine sainte nous rappelle que le seul protagoniste, le seul acteur que nous devons contempler, c’est Jésus. Pendant quarante jours nous nous sommes demandé « quoi faire pour le Seigneur », les célébrations de la semaine sainte nous invitent à contempler ce que Dieu est capable de faire pour nous :  accepter les humiliations et donner sa propre vie sur la croix par amour pour nous.

Peut-être, allons-nous nous retrouver au milieu de tous ces personnages qui entourent Jésus pendant sa passion, dans la diversité de leurs attitudes positives et négatives ? Allez-vous peut-être vous reconnaitre dans la personne de Pierre ou de Judas, le centurion romain ou ces femmes présentes au pied de la croix quand meurt Jésus. Chacun y trouvera sa place, avec ce que nous portons dans nos cœurs, ce que nous faisons autour de nous, de beau, de bon ou de mauvais, au quotidien, souvent ou de temps en temps.

Ce qui est arrivé à Jésus il y a plus de deux mille ans s’actualise encore aujourd’hui à travers chaque sacrifice eucharistique célébré. En effet, au cours de chaque messe, nous célébrons la passion, la mort et la résurrection de Jésus, de ce Dieu fait homme par amour pour nous, qui souffre et livre son corps sur la croix par amour pour nous, mais qui triomphe de la mort parce qu’il a nous aimé jusqu’au bout. Que le Seigneur nous donne de vivre notre vie avec passion, passion amoureuse comme il nous a aimés, même quand nous traversons des épreuves, quand nous portons des croix en nous unissant chaque jour à Lui. Amen.