Mes chers frères et sœurs !

Je reviens d’une semaine de retraite à l’abbaye d’En Calcat. Vendredi soir à mon retour, il a fallu me replonger un peu dans l’actualité de ce qui se passe dans le monde : la peur de la montée du nombre des contaminations Covid en France et dans le monde (Je ne sais plus combien des vagues il faudra pour s’en sortir !), l’Autriche va être reconfinée totalement, et pas seulement ceux qui ne sont pas vaccinés ! Les médias et certains réseaux ecclésiaux rappellent encore la plaie et la blessure profonde de tout le mal commis par les agressions sexuelles révélées dans le rapport de la CIASE, et le besoin de réparation. Mardi dernier, un kamikaze a fait sauter une bombe en pleine ville de Kampala en Ouganda, un attentat a été revendiqué par l’Etat Islamique maintenant à la conquête de l’Afrique orientale et centrale. La reprise d’une forte activité du volcan de Nyiragongo à Goma depuis trois jours nous inquiète… ! Nous vivons une période pré-électorale qui n’apporte pas plus sérénité que des polémiques… !

La Russie a détruit avec un missile un de ses satellites près de la Station Spatiale Internationale, ce qui en rajoute à la guerre et méfiance déjà importante entre les Etats-Unis, la Russie, Joe Biden qui appelle au boycott des jeux olympique d’hier en Chine. La Biélorussie de Loukachenko qui provoque la Pologne avec les réfugiés, situation qui divise les pays de l’UE… Voilà l’actualité que nous traversons. On pourrait poursuivre la litanie des mauvaises nouvelles, mais je m’abstiens de vous déprimer ! Et au cœur de cette litanie angoissante, l’Eglise nous invite à tourner notre cœur vers la lumière du Christ, Roi de l’Univers et Prince de la Paix.

Un véritable contraste aujourd’hui ! D’un côté la peur, l’angoisse des événements que traverse le monde, et peut-être même que nous traversons au niveau personnel, et de l’autre, la liturgie qui nous appelle à célébrer le Christ, roi humilié, sans armée, couronné d’épines et qui se laisse clouer en croix. D’un côté, il y a toute cette peur, angoisse que nous subissons et que nous ne vivons pas toujours dans l’amour, de l’autre, une violence, subie elle aussi, mais vécue par amour pour nous, tel que le Christ nous le montre.

Parler du Christ-Roi, c’est souligner la pauvreté de notre langage qui associe cet attribut à des figures que nous appelons rois, reines, empereurs, princes, comtes, comtesses, duchesses…. Dans un langage plus moderne, nous les appelons chefs d’Etat, de gouvernement…ceux qui décident ou qui ont parfois du mal à décider et malheureusement, parfois ils décident de manière arbitraire et avec violence du destin, de l’avenir du monde de l’humanité, de la planète comme nous le rappelle le flop de la récente COP 26 qui s’est tenue à Glasgow en Ecosse.

Notre vocabulaire est tellement pauvre, incapable de trouver un concept adéquat qui exprime la signification de cette solennité qui qualifie une souveraineté qui transcende le temps et l’espace, les limites de la géographie et de l’histoire, un pouvoir qui ne s’impose pas… mais qui se propose et s’accueille dans la liberté. Ces jeunes qui font leur première communion aujourd’hui, ces enfants du primaire qui demandent le baptême, ou les adultes catéchumènes, futurs baptisés qui sont au Christ-Roi ce dimanche, ou alors ces adultes en chemin vers la communion et le sacrement de confirmation… sont témoins de cette liberté qui accueille l’amour du Christ Roi de l’Univers. Le pouvoir du Christ-Roi ne réduit d’aucune manière notre liberté. Le Christ ne nous instrumentalise pour ses propres fins, comme nous le faisons parfois consciemment ou inconsciemment, dans nos relations. Le pouvoir du Christ se donne, pour le bien et le salut de l’humanité.

La royauté du Christ est différente de n’importe quel régime politique. Cette différence vient du Christ qui, s’il a porté une couronne royale, celle-ci a été une couronne d’épines, accompagnée de moqueries, d’humiliations : Jésus, trainé comme un criminel, condamné…se proclame Roi devant Ponce Pilate, le représentant de l’empereur. Pilate a humainement et politiquement pouvoir de vie et de mort sur Jésus, mais Jésus, en se qualifiant roi, lui lance ouvertement un défi à deux titres.

Il lui dit : « Mon royaume n’est pas de ce monde ». Cela signifie que Pilate et ses pairs politiques ne devraient pas s’inquiéter du pouvoir de Jésus. Son pouvoir n’est pas temporel. Le règne du Christ transcende tout pouvoir politique : Jésus n’a pas de parti comme on en voit se déployer en cette période de pré-campagne électorale.  Le règne de Jésus n’a pas d’espace, ni de territoire et ne se mêle pas de politique ni d’économie. Son Règne ne connaît pas de différences sociales ni raciales. Le roi que nous célébrons n’a pas d’armée ni de frontières territoriales à protéger en construisant des murs pour arrêter les migrations ou les invasions.

Le défi du Christ à Pilate se poursuit par une deuxième affirmation : « C’est toi-même qui dis que je suis roi. Moi, je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité ». La vérité que Jésus est venue révéler, c’est que Dieu est un Père qui aime tous ses enfants sans exception. Le Christ est venu nous révéler un Père qui offre à tous ses enfants la possibilité d’être tous ensemble heureux avec Lui. Jésus en a témoigné en donnant sa vie pour le salut de tous les hommes. Ses bras ouverts en croix témoignent de cet amour infini qui se donne et embrasse tous les hommes et toutes les femmes qu’il attire à lui, pour les conduire tous au Père. Recevoir la communion, surtout pour la première fois comme Dimitri et Clara, demander le baptême comme ces 9 enfants, demander la confirmation comme ces adultes que nous accompagnons, cela signifie ouvrir ses propres bras pour ses jeter dans les bras ouverts du Christ qui nous conduit au Père. C’est dans embrassade que nous trouvons notre bonheur.

La fête du Christ-Roi invite à vivre ce que Jésus nous enseigne. Le monde va mal parce que nous ne vivons plus et ne témoignons pas suffisamment de l’enseignement du Christ. Notre monde souffre d’un grand déficit des témoins de la vérité de l’évangile annoncée et vécue par le Christ. Plus nous nous éloignons du Christ, plus le monde ira mal… Plus nous accueillons son enseignement, plus disparaitront la violence, les guerres, la haine et plus s’édifieront la justice et l’amour. Adhérer au règne du Christ, c’est faire que le monde actuel soit « déjà » le paradis, un lieu où tous nous vivons et témoignons de la justice, de l’amour, du partage… malgré nos limites et nos fragilités.

Nous croyons en un Dieu qui aime, pardonne.  Humilié et crucifié, il demande pourtant pardon pour ceux qui le crucifient. Insulté, il ne rend pas l’insulte. Il subit le mal sans maudire des oppresseurs…. Le Christ, Roi de l’Univers nous appelle à témoigner de son amour, de sa miséricorde, de sa justice… dans ce monde parfois dur et perdu. Par notre communion profonde au Christ, le monde deviendra un règne d’Amour, en attendant que le Christ vienne lui-même l’accomplir en plénitude. Donne-nous Seigneur, Roi de l’Univers, la grâce de construire ton Royaume autour de nous, dans nos familles, notre communauté, notre pays, dans l’Eglise et dans ce monde. Amen.