Mes chers frères et sœurs
Au matin de Pâques, les saintes femmes vont au tombeau en portant des aromates et du parfum. Elles veulent compléter un rite funéraire qu’elles n’ont pas réussi à finir deux jours plus tôt. L’enterrement s’est fait en hâte, dans la tristesse et la colère contre cette Loi qui imposait le repos du sabbat, ce dernier était en plus la Pâque juive. Rendez-vous compte : une loi qui ne permet même pas d’enterrer dignement les morts. Cette homélie m’a fait penser à la période du Covid quand nous n’avions même pas le droit d’enterrer dignement nos morts.
Ces saintes femmes ont le cœur plus lourd que la pierre posée à l’entrée du tombeau. Elles pensent à Jésus est mort, torturé, trainé par terre, défiguré. Son visage tellement souriant et pacifique était méconnaissable, tuméfié et blessé. Elles marchent en toute hâte, mais c’est encore la nuit et le brouillard dans leurs cœurs. L’épreuve est tellement insupportable, comme quand le courage nous manque, quand la peur, de la guerre, de la crise économique, de la maladie, de la vie nous enlève toute l’énergie et nous anéantit, quand les nerfs cèdent, la foi secouée à cause des épreuves ! Alors, nous sommes épuisés, lessivés, découragés, et perdons confiance en tout, en Dieu, dans l’entourage et même en nous-même. Nous nous enfermons alors dans notre chambre, refusant tout contact, ne voulant parler à personne.
Contrairement à nous, ces saintes femmes sortent et vont au tombeau pour un dernier inutile geste d’amour. Mais quand elles arrivent, la pierre a été déplacée et la tombe est vide ! Malheur sur malheur ! C’est le sort qui s’abat sur elles. Dans l’évangile selon saint Luc écouté pendant la veillée pascale, il est dit que les femmes sont désemparées et ne comprennent pas le sens de tous ces événements. Il nous arrive aussi parfois d’être perdus, incapables de comprendre, de donner du sens aux événements, surtout difficiles qui nous arrivent. Comment lire et interpréter les événements, comment se dépêtrer de cet imbroglio des sentiments négatifs écrasants qui empêchent de bouger, paralysés par la peur et l’angoisse ?
Comme au matin de Pâques, pendant que nous portons les parfums et aromates pour embaumer Dieu, l’honorer, oui, mais en célébrant ses funérailles, alors peuvent arriver des personnes éblouissantes, illuminées, le cœur ardent qui nous disent, au matin de Pâques : « Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? Il n’est pas ici, il est ressuscité ». Ce sont les gens qui nous secouent, nous invitant à nous bouger, simplement, mais parfois fermement : arrêtez de chercher un mort ! Arrêtez de vivre dans le passé ! Arrête de te faire du mal ! Il faut tourner la page et regarder devant toi. L’épreuve du moment, la séparation, la crise actuelle ne signifient pas la fin de votre vie. On ne peut pas entrevoir la vie, avancer, envisager l’avenir, voir la résurrection si l’on n’a pas accepté la mort et fait le deuil. Ensuite seulement, la lumière du ressuscité ouvre pour nous de nouvelles possibilités.
Chrétiens, cessez de chercher un Dieu-cadavre, un Dieu du passé ! Notre Dieu est vivant aujourd’hui ! Arrêtez de vivre la foi comme un bibelot en prenant Jésus pour un simple éducateur de bonnes manières. « Oh je veux baptiser mon enfant pour lui transmettre les valeurs chrétiennes », mais, des valeurs chrétiennes sans Jésus ! Combien de catholiques considèrent Jésus comme un simple prophète, un grand homme, certes, mais pas Dieu ! On dirait un musulman honnête qui décrit Issa, un prophète, un moins que Mahomet d’ailleurs. Non, la foi de notre baptême est une relation, une rencontre avec une personne, un Dieu qui nous a aimés, qui s’est livré pour nous sur la croix mais qui a vaincu le mal et la mort par sa résurrection. Il est vivant dans nos cœurs, chaque jour car nous sommes devenus son temple par le baptême ! C’est cela qu’il faudra apprendre aux nouveaux baptisés.
Lorsque Marie-Madeleine arrive au tombeau, elle voit que la pierre à l’ouverture du tombeau a été roulée et Jésus n’y est plus. On a volé le corps de mon Maître, pense-t-elle ! Alors, elle coure chez les hommes, ces mâles qui s’étaient révélés lâches pendant la passion et la mort le vendredi saint. Pierre et un autre disciple entrent dans cette course du dimanche matin, non pas ce footing pour la bonne forme et le loisir comme on en fait le dimanche matin au lieu d’aller à la messe, mais une course remplie d’angoisse et d’inquiétude. Le disciple bien-aimé, plus jeune et plus rapide arrive en premier. C’est lui qui était au pied de la croix avec la sainte Vierge.
Ce disciple nous dit que nous sommes tous appelés à courir pour rejoindre le Seigneur. Courons donc, nous aussi, avec Pierre ! En arrivant, ils constatent que le tombeau est vide, le suaire roulé et bien rangé à sa place et les linges posés à plat. Ce sont des signes de la mort. Rien de vital, rien de décisif, rien de probant et aucune évidence de la résurrection. Pierre s’arrête, mais pas le disciple bien-aimé. L’évangile nous dit qu’il vit et il crut
La foi chrétienne n’est pas une évidence empirique ou mathématique. La présence du Seigneur n’est pas une évidence. Heureux ceux qui croient sans avoir vu, cesse d’être incrédule, sois croyant, dira Jésus à l’apôtre Thomas. La foi ne fait pas appel à notre intelligence, mais à notre cœur. Toi aussi, ouvre ton cœur, laisse-toi aimer, et seulement ainsi tu comprendras ce que veut dire aimer. Essaye de chercher les signes de la présence de Dieu dans ta vie, dans le monde, dans l’Eglise.
Aujourd’hui, de plus en plus personnes viennent demander le baptême. Ces gens ne viennent pas parce que l’Eglise est devenue irréprochable. On le saurait ! Pas parce les curés sont devenus des grands stratèges en évangélisation et qu’ils savent attirer les personnes. On le saurait aussi ! Pas non plus parce que les fidèles catholiques sont plus décomplexés ! On le saurait. Ils viennent seulement parce qu’ils ont une soif que seul Jésus peut étancher et se laissent toucher par la grâce du mystère pascal. Réalisez que, sans compter les enfants du primaires et les bébés comme ce matin, plus de 12000 personnes ont été baptisés ce weekend de Pâques en France ! A la Pentecôte le 8 juin, au MEET de Toulouse où notre archevêque nous invite, presque 1000 adultes recevront le sacrement de confirmation. Maintenant, il faut que nous soyons à la hauteur de l’enjeu pour permettre à ces nouveaux baptisés de trouver leur place et nous bousculer dans nos églises et nos communautés tranquilles dans la routine et les habitudes et qui ont peut des nouveautés.
Toi aussi, en ces fêtes pascales, laisse-toi rejoindre par le Ressuscité. Ouvre-lui ton cœur. Si tu n’as pas la foi, ose la demander, et s’il le faut, pose au Seigneur le défi de te manifester un signe de sa présence dans ta vie. Prions pour ces 11 adultes qui ont été baptisés hier dans cette église, ces 15 jeunes qui seront baptisés dimanche et ces enfants baptisés aujourd’hui et les prochains jours. Que Jésus ressuscité leur donne et nous donne d’être toujours dans la joie, parce qu’il est vivant et avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde. Amen.