Mes chers frères et sœurs !

Le III dimanche de l’Avent s’appelle encore le Gaudete ou dimanche de la joie.  Cet appel à la joie résonne déjà dans la première lecture : « Le désert et la terre de la soif, qu’ils se réjouissent ! Le pays aride, qu’il exulte et fleurisse comme la rose, qu’il se couvre de fleurs des champs, qu’il exulte et crie de joie ! Ceux qu’a libérés le Seigneur reviennent, ils entrent dans Sion avec des cris de fête, couronnés de l’éternelle joie. Allégresse et joie les rejoindront, douleur et plainte s’enfuient » Cette joie est le plus beau cadeau que nous pouvons offrir aux autres en ce temps de Noël.

Pourtant, l’évangile de ce dimanche relate des sentiments bien tristes : doutes, pessimisme et perplexitédominent la vie de Jean le Baptiste, très différent de celui que nous avons contemplé dimanche qui nous appelait, rassuré et déterminé, à nous convertir. Le Jean-Baptiste que nous contemplons aujourd’hui est prisonnier et s’attend l’exécution de mise à mort. Il a mis en colère une femme fatale, Hérodiade et de son mari Hérode. Jean-Baptiste connaît très bien Jésus. C’est son cousin et il a passé toute sa vie à préparer la venue du Messie. Dimanche dernier, il invitait d’ailleurs tout le peuple à rendre droits ses sentiers, à se faire baptiser. Plus tard, il va retrouver Jésus, faisant lui aussi la queue, à son grand étonnement, parmi ceux qui voulaient se faire baptiser. Au cours du baptême dans le Jourdain, Jean-Baptiste voit le saint Esprit descendre sur Jésus, et entend la voix du Père qui disait de Jésus : « celui-ci est mon Fils bien aimé en qui j’ai mis ma joie ! ». Plus tard encore, Jean-Baptiste va laisser partir ses disciples qui vont le quitter pour devenir les premiers disciples de Jésus qu’il désigne devant eux comme étant l’Agneau de Dieu qui enlève les péchés du monde. Voilà des signes, des faits et des témoignages qui attestent combien Jean le Baptiste connaissait bien l’identité et la mission de Jésus, le Messie.

Maintenant qu’il est enfermé dans une prison, les nouvelles du messie qui parviennent à Jean-Baptiste ne sont pas encourageantes : le Messie Jésus se révèle sous un profil pas du tout brillant. Il n’est pas violent, n’incite pas à prendre les armes et à se rebeller contre les Romains. Au lieu de proférer la malédiction sur les méchants, annoncer la vengeance de Dieu, Jésus promet le pardon aux pécheurs, il mange et boit avec des gens de mauvaise réputation… Pour Jean-Baptiste, ce Messie est très différent de celui qu’il attendait et qu’il avait annoncé au peuple. Pour couronner le tableau de la déprime, Jean le Baptiste est en prison !  C’est un trop  plein d’événements malheureux. Comme cela arrive parfois dans la vie -,  tous ces événements malheureux plongent Jean-Baptiste dans une crise de foi,  de tristesse, de grande fatigue et de découragement.  Nous appelons cela « une grande dépression ». Toutes ses certitudes acquises se sont écroulées devant la lourdeur de l’épreuve. Il est comme les disciples d’Emmaüs déprimés après la mort de Jésus, et qui étaient incapables d’entendre la bonne nouvelle de la résurrection pour s’en réjouir. La dépression nous fait voir les choses sous un angle tellement sombre que nous nous disons que notre vie, notre mission, notre travail, notre couple, notre foi… n’ont plus de sens. C’est comme ce migrant nigérian que j’ai rencontré au secours catholique qui se bat depuis des années et ne voit pas avancer son dossier au point de penser que tout le monde lui en veut et est contre lui en France ! Même les bénévoles ne savent plus comment faire pour l’aider !

Heureusement que dans le cœur de Jean le Baptiste, luit encore une petite lumière de l’espérance ! Il veut être rassuré et envoie des messagers auprès des Jésus avec une question importante : «Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ?»: La réponse de Jésus  n’est pas claire, car il ne dit ni oui ni non.  Il répond aux messagers : « Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et voyez : Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres. »

C’est une réponse qui appelle à être attentifs aux signes, petits soient-ils, pour voir Dieu à l’œuvre et reconnaître son Règne qui se construit et grandit dans notre monde. L’attention aux signes du Royaume de Dieu nourrit notre espérance et nous donne de la joie pour rendre grâce et louer Dieu, au lieu de sombrer dans le découragement et le pessimisme par rapport à notre vie, celle de l’Eglise, celle du monde, de notre famille.

Jésus ne dit pas « oui c’est moi le messie » ou « non ce n’est pas moi le messie ». Mais il renvoie Jean-Baptiste à une prophétie d’Isaïe parlant des signes de l’avènement du Messie.  « Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres ». Jésus invite Jean-Baptiste à faire une relecture spirituelle pour voir, au-delà de tout découragement et avec du recul, les signes de la présence de Dieu dans les événements, même quand ils ne sont pas subjectivement agréables.

Chers amis, il se peut que vous soyez  parfois remplis de doutes à certains moments de votre vie,  que vous doutez de Dieu, de l’Eglise, de vos prêtres, évêques,  de vous-même, de votre conjoint, de vos collègues, de vos frèreset sœurs….qui  vous déçoivent, ne répondant plus à vos attentes, vous mettant en colère, et qui ont perdu votre confiance….Rappelez-vous que Jean-Baptiste, a aussi traversé les mêmes sentiments vis-à-vis de Jésus. Mais, au lieu de s’enferme dans un mutisme et de bouder, il a exprimé ses doutes en osant une communication avec Jésus, par l’intermédiaire de ses messagers.  Grâce à cela, il a quelques ponses.  De grâce, dans nos doutes, ne fermons pas notre cœur aux autres et à Dieu. Osons trouver le moyen de communiquer, de dialoguer pour exprimer ce qui nous pèse.

A une semaine de Noël, l’évangile nous invite à la joie en ouvrant les yeux sur notre vie, sur l’Eglise et le monde pour y voir des signes de Dieu, et de devenir des signes de joie et d’espérance pour ceux qui sont dans la prison de la tristesse et des épreuves, comme Jean le Baptiste, ces gens qui se sentent ou sont de fait seuls et abandonnés à Noël ou abandonnés. Nous avons encore quelques jours pour devenir messagers de joie et d’espérance ! Allons dans nos quartiers, nos familles, nos mouvements, notre communauté,… pour rencontrer et inviter à la joie tous les Jean-Baptiste tristes et prisonniers de différentes épreuves de la vie, de la tristesse, de la maladie, de la solitude, de l’inflation, de la crise énergétique, de la guerre ! Que cette eucharistie fasse de nous des messagers de joie et d’espérance. Amen