Mes chers frères et sœurs !

Dimanche dernier, c’était la fête du Bon Pasteur. Nous avons contemplé Jésus, notre seul et Unique vrai et Bon Berger qui appelle chacune de ses brebis par son nom parce qu’il les connait toutes personnellement ; et que ses brebis le connaissent et écoutent sa voix.  Reconnaître Jésus comme notre Bon Pasteur interroge notre relation à lui, comme brebis faisant partie d’un grand troupeau, mais pas perdu au milieu de ce troupeau. C’est important de souligner cela, par exemple lors de la présentation des enfants au début de la célébration d’un baptême : nous avons un prénom et Jésus reconnait et appelle chacun personnellement par notre prénom. Cela veut dire que dans l’histoire de l’humanité comme dans l’histoire du salut, chacun de nous est unique aux yeux de Dieu et qu’Il veut entretenir une relation bien personnelle, unique et particulière avec chacun de nous.

Du dimanche du Bon Pasteur, nous passons à un autre dimanche, dont la thématique est intimement liée à celle du Bon Pasteur. Il s’agit de la thématique de la Vigne et des sarments. La liturgie de ce dimanche nous invite à contempler Jésus Ressuscité, qui est le Chemin, la Vérité et la vie, comme étant aussi le fondement de notre vie. La résurrection du Seigneur ne s’arrête pas à la constatation du tombeau vide ou aux apparitions telles que nous les avons contemplées les trois premiers dimanches de Pâques. La résurrection de Jésus touche directement chacun de nous dans ce qu’il y a de plus personnel dans sa vie. La foi en Jésus ressuscité doit toucher chaque dimension de notre existenceau quotidien. Cela veut dire que je ne peux pas avoir plusieurs vies cloisonnées et séparées les unes des autres, des vies ou je suis chrétien et d’autres où je ne suis pas chrétien : chrétien à l’église mais pas au boulot, chrétien en équipe paroissiale mais pas en famille, chrétien dans un mouvement associatif mais pas dans mes choix politiques, à la messe le matin mais chez les marabouts ou les voyants le soir. La résurrection doit concrètement imprégner toutes les dimensions de notre vie.

Ca me fait penser à l’histoire (dans un film évidemment) de cette jeune adolescente qui est forcée d’aller à l’église le dimanche par ses parents très bons catholiques. Après beaucoup de résistance et de révolte, cette jeune fille décide de jouer à fond le jeu de vivre vraiment la foi chrétienne. Elle prend progressivement conscience, en allant à l’aumônerie, en lisant les évangiles que ses parents qu’elle croyait très catholiques parce qu’ils priaient beaucoup et étaient à la messe chaque le dimanche, n’avaient finalement qu’une foi de façade et ne vivaient pas vraiment selon le message de Jésus. Première étape : elle commence à lire la Bible, ce qui impressionne positivement les parents ! Deuxième étape : elle comprend qu’il faut partager et soutenir la vie de l’Eglise. Alors, elle va à la banque et fait un gros chèque de 50.000 dollars pour la paroisse (une sorte de Denier du Culte), parce que sa famille était très riche ! Les parents, très en colère vont jusqu’à aller réclamer le chèque au curé mais il était déjà encaissé ! Troisième étape : elle s’engage dans une association caritative, genre le Secours Catholique, pour aider SDF et les pauvres. Un jour, elle invite un groupe d’SDF dans leur belle baraque pour manger et se servir en débarrassant le garage rempli de toutes ces choses neuves entassées qui n’ont pas servi depuis des années. Cela met les parents tellement en colère qu’ils demandent à leur fille d’arrêter d’aller à la messe et de lire la Bible pour ne pas les ruiner.

Cette demoiselle voulait simplement vivre pleinement sa foi et montrer aux parents que quand on est chrétien, on ne l’est pas seulement le samedi soir ou le dimanche matin, mais que c’est toute notre vie qui doit être touchée, fécondée et éclairée par le message de Jésus ressuscité. J’ai conscience que cela n’est pas toujours facile, mais c’est la finalité, le but vers lequel nous devons tendre ! Si nous sommes chrétiens, si Jésus est devenu le Maître, le Seigneur et la Lumière de notre vie, celle-ci est forcément inondée dans chacune de ses dimensions par sa présence et son enseignement.

En ce V dimanche de Pâques, Jésus, Vrai Berger et Bon Pasteur nous rappelle aussi qu’il est la Vigne et que nous sommes ses sarments. Je n’ai pas fait l’Ecole d’Agriculture de Purpan et mes leçons d’SVT ou de Botanique sont tellement loin de moi, en plus j’étais mauvais dans les sciences ! Mais nous savons tous l’importance capitale des racines pour une plante. Les racines absorbent l’eau et les sels minéraux pour alimenter ensuite tout l’organisme végétal. Cette eau et ces sels minéraux constituent ensuite la sève vitale sans laquelle la plante ne peut survivre. Si la plante est coupée des racines, elle meure et se dessèche. Aussi, si vous coupez une branche, un sarment de l’arbre, de la tige principale, ils se dessèchent parce qu’ils sont privés d’eau, des sels minéraux, c’est-à-dire, de la sève que leur procurait la tige principale.

Telle est la nature de la relation de chaque baptisé avec Jésus. Il est la Vigne dont dépendent toutes les autres parties de la plante, de sorte que chaque sarment ne peut subsister sans lui. La Vigne sans les sarments peut certainement continuer à vivre, mais un seul sarment détaché et coupé de la vigne se dessèche forcément parce qu’il n’est plus alimenté par la sève de la Vigne. Rappelons-nous que la vitalité de notre vie humaine et chrétienne dépend de notre relation et de notre attachement au Christ. Coupé de Dieu, de la Source, de son Amour, de sa Grâce, le chrétien est dans une illusion de vie en pensant qu’il peut se suffire de lui-même. En se coupant de Dieu, l’être humain se condamne petit à petit à dépérir.  Le drame : c’est qu’il a des gens qui sont convaincus du contraire.  Je rencontre au quotidien des gens qui viennent faire différentes demandes à l’Eglise, tels les baptêmes, mariages, les obsèques…qui disent qu’ils sont chrétiens mais ne sentent aucunement le besoin ni l’envie de prier, d’aller à la messe…! Ils se disent être heureux comme ça ! Ce sont-là des sarments qui se privent de la sève de la Vigne, qui se dessèchent progressivement et meurent spirituellement à petit feu sans le savoir.

Notre bonheur, la réalisation de notre vie dépend de la manière dont nous attachons, nous nous nourrissons, nous nous abreuvons au Christ Jésus, en le choisissant chaque jour, en persévérant dans une relation intime avec lui. Le propre d’un chrétien qui veut porter du fruit est de mettre Jésus au centre de sa propre vie, et cela de manière radicale. Rester attaché au Christ est une question de volonté ! Le sarment sur la vigne n’est pas tout à fait libre de choisir de rester attaché à la vigne : cela peut dépendre des conditions climatiques, une tempête violente qui détache le sarment…

Par contre, notre attachement à Jésus dépend totalement de notre liberté : nous pouvons choisir notre destin en restant attaché au Christ ou en nous coupant de lui. La foi est certainement un don de Dieu, une vertu théologale, mais elle s’entretient et grandit à travers la liberté et notre volonté. Il suffit de regarder les péripéties de notre vie spirituelle et humaines pour nous rendre compte qu’il y des moments où nous avons plus choisi Jésus, et d’autres où nous avons choisi de nous éloigner de lui. Moi-même j’en ai fait l’expérience dans ma propre histoire : les moments de ma vie où je me suis moins uni au Christ, j’ai vu et senti ma vie dépérir et se dessécher petit à petit, et ce sentiment de sécheresse a été pour moi l’occasion de me rendre compte combien la joie dans ma propre vie dépend fondamentalement de ma fidélité et de mon attachement au Christ. C’est seulement dans la mesure où ma vie est attaché au Christ que je peux produire des fruits, comme la joie, la sérénité, la maîtrise de soi, la beauté rayonnante et vitale du Christ Ressuscité qui me rend capable de dire, comme saint Paul : « ce n’est plus moi qui vit, mais c’est le Christ qui vit en moi »

« Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire » dit Jésus dans l’évangile de ce jour. Chaque fois que nous célébrons l’eucharistie, avec la communion, ceci se réalise de manière presque physique. Nous recevons le Christ, et comme dit saint Augustin, nous devenons ce que nous recevons, c’est-à-dire que nous devenons le corps du Christ, vivant de la vie du Christ, et appelés à avoir les mêmes attitudes du Christ parce que nous le portons en nous. Puisse l’eucharistie que nous célébrons aujourd’hui nous aider à demeurer vraiment dans le Christ, lui qui est la source qui rend féconde notre vie. Amen.