Mes chers frères et sœurs !

Depuis quelques années, nous assistons à un fait évident dans la vie de l’Eglise, nous assistons à un fait évident : c’est la baisse très sensible de la pratique religieuse. Nous avons eu les inscriptions KT et d’aumônerie hier, et même si nous ne pouvons pas nous plaindre sur les effectifs par rapport à certaines paroisses du diocèse, il est évident que nous sommes bien en deçà des effectifs d’il y a 20 ans par exemple. Même si nous assistons à un renouveau spirituel et chrétien en France (voir l’augmentations des demandes de baptêmes et confirmations des adultes). La France qui, par son histoire, avait déjà touché le fond et qui ne pouvait que renaître petit à petit de ses cendres…en l’espace de quelques années, la pratique religieuse varie, selon les régions de France, de 5% qui se disent chrétiens pratiquants à moins 1% selon que nous sommes dans une ville comme Toulouse.

Le curé que j’avais quand j’étais tout jeune vicaire me parlait de Toulouse comme étant une région « radicale-socialiste » où la pratique religieuse est l’une des plus faibles en France. Pour les non pratiquants, ceux qui ne s’intéressent pas à la vie de l’Eglise, ces données statistiques ne font ni chaud ni froid. D’ailleurs, certains même parmi les plus anticléricaux s’en réjouiront. Mais pour nous qui avons le souci de faire vivre et voir grandir l’Eglise, même si nous n’avons pas le syndrome des chiffres….ces statistiques  sont frustrants et  éprouvants.

Alors, nous aimerions mettre en place des stratégies pour bien remplir de nouveau nos Eglises, faire le plein au catéchisme et à l’aumônerie, avoir plus d’enfants au scoutisme…Nous y travaillons chaque jour. Mais en ce premier dimanche de septembre, Jésus nous donne quelques éléments pour nous accompagner au cours de cette année pastorale que nous commençons, nous mettant en garde contre la tentation de faire du chiffre à tout prix.

Suivre Jésus, aller à la messe, s’engager dans l’Eglise… est d’abord une question de liberté et d’adhésion personnelle. Même les enfants baptisés bébés grâce à la demande de leur parents, plus tard, ils  sont appelés à adhérer librement à la foi de leur baptême grâce à l’éducation reçue des parents, en milieu familial et grâce à l’accompagnement des catéchistes, animateurs d’aumônerie, les responsables de l’éducation religieuse les écoles et mouvements comme le scoutisme….Cette liberté se manifeste dans les étapes de la vie chrétienne telles que la première communion, la profession de Foi , la Confirmation (qu’on peut recevoir même adultes ), et des choix plus importants comme le mariage ou la vie consacrée. Cette liberté de choisir Jésus exige de prendre suffisamment conscience des difficultésque comporte une vie chrétienne. Dans l’évangile, Jésus met l’accent sur certaines de ces difficultés pour que la liberté de le suivre ne se base pas sur un enthousiasme euphorique et superficiel…

Jésus ne nous tient pas un discours de campagne électorale, parfois démagogique, promettant la lune, une France forte, apaisée, meilleure, sécurisée, moderne,  avec le plein emploi, avec une immigration réduite, choisie et maitrisée,  sans burkini, mais peut-être avec plus de bikini… ! Bref, Jésus ne nous tient pas un discours parce qu’il veut monter dans les sondages.  Jésus pose dès le départ les conditions très difficiles pour tous ceux qui veulent le suivre en affirmant que ce choix ne sera pas une partie de plaisir… On dirait même qu’il veuille décourager cette foule nombreuse et enthousiaste.

Précis, le ton grave, ferme et catégorique, Jésus redit, en s’adressant à cette foule, que nous ne pouvons pas être ses disciples si nous ne sommes pas capables de renoncer, de dire non à quelque chose qui nous tient à cœur. Être disciple du Christ, c’est dire oui à Lui, et par conséquent renoncer à beaucoup d’autres choses, en particulier à trois réalités sans lesquelles nous sommes humainement fragile et pauvres : les liens familiaux et affectifs, la gloire de la société et les biens matériels : « Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple ».

Pour être disciples du Christ, il n’y pas d’autre alternative. Il nous faut considérer les liens affectifs et familiaux moins importants que l’Amour du Maître ; accepter la logique de la croix, c’est-à-dire la possibilité d’être rejeté par la société ; renoncer aussi aux biens matériels. Jésus est vraiment exigeant. En quelques versets, il nous donne des éléments pour nous aider à construire son Eglise au sein de chaque communauté locale.

Jésus s’insurge ainsi contre la logique sentimentale et affective qui caractérise parfois dans nos relations au sein de nos communautés, la logique des liens parentaux, celle de la clique, la bande des copains, du groupuscule des gens bien qui se retrouvent souvent seulement parce qu’ils s’entendent bien entre eux et qui excluent les autres. On ne peut construire une communauté chrétienne en se basant sur la logique des sentiments et des préférences. Je préfère ce prêtre à l’autre et je vais seulement à « sa messe », et je fais tout pour trouver le planning des célébrants pour savoir qui célèbre où et quand…. Ou alors, je m’engage dans un service, un mouvement, un groupe seulement parce que je vais y rencontrer mes amis. La logique sentimentale et affective nous fait obtenir notre récompense dès ici-bas, comme nous le disait l’évangile de dimanche dernier.

Alors que la réussite de la vie dans notre société se mesure au poids du compte en banque, de notre niveau social, nos diplômes, responsabilité professionnelle ou ecclésiale, Jésus nous dit aujourd’hui que la réussite du disciple se mesure à sa capacité à renoncer aux biens matériels, au pouvoir et aux relations affectives. Pendant que ses disciples aspirent à prendre le pouvoir et voient en lui un leader puissant qui prendra Jérusalem des mains des Romains, Jésus les appelle à entrer dans la logique de la croix, de la souffrance et du renoncement !

Durant sa marche vers Jérusalem, Jésus veut que les choses soient bien claires pour tous ses disciples. Il dit ouvertement et clairement que la logique de la foule nombreuse, celle de ceux qui font exploser tous les sondages et les statistiques, comme en politique, celle de celui qui a plus de signatures, d’adhérents, de fonds récoltés…., celle des salles combles ou églises  pleines, des messes les plus suivies, du poids des chrétiens dans la société française… celle-là n’est pas du tout sa logique. Si nous sommes dans cette logique-là, nous ne sommes pas faits pour être chrétiens ou disciples du Christ ? Ce que Jésus nous dit parait contre-nature. Prenons cet évangile comme un appel à nous arrêterun moment pour reconsidérer notre vie chrétienne et nos motivations premières pour repartir sur des nouvelles bases totalement différentes, mais plus vraies et plus solides : celles de la croix, du renoncement au pouvoir, du service, de discrétion, en acceptant, humblement parfois la dernière place. Que le Seigneur nous vienne en aide et nous apprenne à toujours mieux le suivre en cette année qui s’ouvre. Amen.