Mes chers frères et sœurs !

Hier samedi, en fin de matinée, notre évêque nous a envoyé sa première lettre pastorale, dans l’élan de l’assemblée diocésaine que nous avons vécu l’an dernier à Pibrac. Le titre de cette lettre pastorale est « l’Eglise de Toulouse, famille de Dieu, envoyée en mission ». Tout est donnée dans ce titre. J’espère que chacun de nous pourra s’approprier cette lettre pastorale, la travailler et échanger sur elle dans nos équipes, groupes, mouvements et fraternités que notre archevêque nous invite à former et à multiplier dans nos paroisses en particulier cette année. Inspiré à la fois par cette lettre pastorale et la Parole de Dieu de ce XXIV dimanche ordinaire, j’aimerais que notre projet de l’année soit vraiment la construction, sur les 5 clochers de notre ensemble paroissial, former véritablement une Eglise famille dont la seule raison d’être est la mission d’annonce du Christ au monde.

En effet, c’est la foi qui nous unit. Nous avons répondu à l’invitation du Christ qui est le Chef, la Tête de l’Eglise dont nous sommes tous membres, chacun à part entière, chacun à sa place, importants les uns pour les autres et tous au service de la même mission : connaître et faire connaître le Christ Jésus qui sauve chacun de nous personnellement. Nous formons donc une famille, non pas parce que ce sont des liens de sang qui nous unissent, mais bien par la foi, celle que professe les disciples du Christ depuis la naissance de l’Eglise, en commençant par le premier des apôtres, Simon Pierre qui avait confessé à Césarée de Philippe : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! ». La famille que nous formons est donc fondée sur la foi, une foi qui casse toute forme de murs et de barrière entre nous.

Engageons-nous donc à construire cette Eglise famille au sein de nos communautés en accueillant la parole de Dieu qui nous appelle à mettre le pardon au cœur de nos relations. Dans la première lecture, Ben Sirac le Sage nous dit : « Rancune et colère, voilà des choses abominables où le pécheur est passé maître. Celui qui se venge éprouvera la vengeance du Seigneur ; celui-ci tiendra un compte rigoureux de ses péchés. Pardonne à ton prochain le tort qu’il t’a fait ; alors, à ta prière, tes péchés seront remis…  Si un homme nourrit de la colère contre un autre homme, comment peut-il demander à Dieu la guérison ?  S’il n’a pas de pitié pour un homme, son semblable, comment peut-il supplier pour ses péchés à lui ? »

Pensez à l’Eglise comme famille des pécheurs, regardez d’abord notre famille biologique ! Est-elle parfaite ? Je ne crois pas ! En regardant ma propre famille, et en écoutant ce qui se passe dans nos familles, et cela depuis la nuit des temps, nous constatons des blessures que nous nous infligeons mutuellement, consciemment ou inconsciemment parce que nous sommes tous pécheurs. Vous savez combien le refus de pardonner fait des dégâts dans les familles. De même, une communauté ecclésiale qui n’a pas mis le pardon au cœur de ses relations est une communauté appelée à s’éclater et à dépérir. Regardez sur vos têtes, et sur la mienne : nous ne portons pas d’auréole ! Un jour, j’espère, il y en aura ! Mais ce sera quand nous serons au ciel. Au début de la messe, nous implorons ensemble la miséricorde de Dieu, en sollicitant le soutien de nos frères et sœurs, pécheurs comme nous, et de tous les saints. Par cet acte liturgique, nous reconnaissons que nous sommes tous pécheurs.

Construisons donc ensemble cette Eglise-famille des pécheurs pardonnés et appelés à se pardonner mutuellement comme nous y invite Jésus dans l’Evangile. Essayons, dans nos familles, les équipes, groupes, services et mouvements…à nous aider mutuellement à avoir une approche véritablement chrétienne du péché et du pardon, dans une perspective de conversion personnelle et communautaire, comme nous y invite notre archevêque dans sa lettre pastorale. Il s’agit de reconnaître que chacun de nous personnellement porte des failles et que notre communauté aussi est loin d’être parfaite, qu’elle chemine et qui dit cheminement dit aussi chutes et relèvements. Dimanche dernier, Jésus nous appelait à nous soucier du salut de chacun à travers la correction fraternelle.

Vivons véritablement le pardon et la miséricorde de Dieu entre nous. Seule la découverte de la miséricorde permet de guérir des blessures qui peuvent nous diviser et nous éloigner les uns des autres, en se servant de nos différences légitimes de sensibilité spirituelle, liturgique, pastorale, de couleur de peau, de clocher, d’engagement politique ou ecclésial. Accueillons-nous dans la miséricorde parce que tous enfants d’un même Père miséricordieux qui nous appelle à former une seule et même famille, et tous membres du Corps du Christ. Accueillons chaque membre de notre famille ecclésiale, tout en sachant que ce n’est pas un saint que nous accueillons, mais un frère, une sœur qui, comme chacun de nous, porte des failles, des fragilités mais aussi des talents qu’il peut apporter à la communauté ecclésiale parce que chacun se sent responsable de la vie paroissiale.

Dans une famille, on apprend à pardonner. Nous savons néanmoins combien le pardon est un exercice très difficile ? Peut-on tout pardonner ? Doit-on tout pardonner ? Et si l’autre abuse de mon pardon ? Combien de fois faut-il pardonner une offense ?… Ces questions, qui risquent de poser des limites au pardon sont déjà présentes dans la Bible ! La réponse est la même : « toujours, pardonner toujours ! ». Vous allez dire c’est plus facile à dire qu’à faire ! Je sais. Quand le pardon est enraciné dans le cœur miséricordieux de Jésus, il est toujours donné parce que c’est Jésus qui pardonne toujours en nous et par nous, quand le pardon est demandé de manière sincère ! Rappelle-toi que tu es pardonné par Jésus chaque fois que tu viens lui demander pardon sincèrement.

Au temps de Jésus, il était suggéré de pardonner jusqu’à trois fois une offense subite pour manifester la clémence et la miséricorde. Dans l’évangile, Simon Pierre pense être un héros en proposant de pardonner 7 fois ! Pardonner 7 fois, c’est énorme ! Pense à ta voisine, ton collègue, ou à l’autre paroissien que tu n’aimes pas beaucoup. Tu crois qu’il (qu’elle) ne t’aime pas, tu en es même convaincu d’ailleurs ! Tu as beaucoup de peine à lui pardonner ses critiques méchantes, ses commérages, ses médisances qu’elle répand sur toi chaque fois que l’occasion lui est donnée…Vous le lui pardonnez vraiment ? Non, n’exagérons pas ! N’abusons pas du pardon. Mais voici la réponse de Jésus ! A cette collègue qui vous déteste et vous tue par ses paroles et son regard, Jésus ne vous demande pas de pardonner, comme Pierre, 7 fois seulement…mais bien soixante-dix-sept fois sept fois… c’est-à-dire toujours pardonner !

Nous pardonnons parce que le Seigneur nous invite à passer de l’attitude de Juge à celui de d’accusé et de condamné ! Dans la foi chrétienne, nous sommes tous pécheurs, mais tous pardonnés par une telle largesse et générosité de Dieu que nous ne pouvons pas ne pas pardonner. La petite dette que nous avons envers nos frères, ou que nos frères ont envers nous n’est rien par rapport à la dette infinie que nous avons envers Dieu. Mais Jésus, du haut de sa croix nous regarde avec amour, s’adressant au Père, il dit : « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font ». Il a effacé toutes nos dettes ! Telle est la raison du pardon vraiment chrétien : je suis appelé à pardonner à ceux qui m’offense parce que moi, je suis le premier bénéficiaire du pardon de Dieu. Nous disons bien dans le Notre Père : « Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensé ! » Le pardon me met dans une situation nouvelle qui me rend semblable à Dieu qui fait tomber la pluie sur les justes et les injustes, et qui nous appelle à être parfaits comme lui-même est parfait.

Un chrétien ne pardonne pas parce qu’il est meilleur. Le pardon n’est pas une amnésie, l’oubli total de l’offense subie. Bien au contraire, je pardonne parce que je fais le choix de l’amour à la haine, à la rancœur. Te revoir, toi qui m’as blessé, rouvre en moi la plaie de la blessure… mais je choisis le pardon dans l’amour pour ne pas laisser la rancœur polluer mon âme et pourrir nos relations.

N’attendons pas un pardon parfait, angélique…! Nous pardonnons comme nous pouvons, au meilleur de nos capacités et de nos forces spirituelles et psychologiques…. Prions pour obtenir la grâce de savoir pardonner et demander pardon. Et si l’autre considère le pardon comme une faiblesse ? C’est un risque à prendre, un risque que Jésus a pris en pardonnant à ceux qui le crucifiaient. Et pourtant, ce paradoxe transforme les cœurs, peut-être pas tous les cœurs, mais beaucoup de cœurs sont transfigurés par le pardon inconditionnel qu’ils reçoivent.

En cette année pastorale qui s’ouvre, accueillons-nous comme frères et sœurs pécheurs, mais infiniment aimés de Dieu et pardonnés. Apprenons à pardonner pour savoir nous accueillir, en communauté ecclésiale, comme des êtres fragiles, imparfaits, mais riches et enrichis de cette miséricorde infinie de Dieu qui nous appelle à aimer et à pardonner comme Lui. Que nos familles, groupes, services, équipes, mouvements et paroisses…soient nourris et transfigurés par le pardon reçu et donné. Le chemin de sainteté commence par la prise de conscience de nos péchés que le Père pardonne toujours et sans compter chaque fois que nous revenons vers lui, nous appelant à notre tour à lui ressembler en donnant, en pardonnant sans compter, comme lui! Belle rentrée paroissiale…. Amen.