Chers frères et sœurs, chers paroissiens !
Pour notre rentrée paroissiale, l’évangile nous invite à parler de la famille. La parabole du fils prodigue, est un appel à regarder notre communauté ecclésiale comme Eglise-famille de Dieu sur notre ensemble paroissial à travers la diversité de ses paroisses et de ses membres tous appelés à marcher ensemble, à chercher le bien de tous et de chacunde ses membres. Cette parabole nous révèle le vrai visage du Dieu qui nous rassemble, ce Père attentif à chacun de ses enfants. Ce Père permet à ses enfants, tous différents, à se reconnaitre comme frères et sœurs ! Alors que l’aîné refuse toute relation fraternelle pour une raison que nous pouvons comprendre, c’est le père qui restaure la relation fraternelle entre ses enfants : « ‘Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. Il fallait festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé ! »
Cet évangile nous parle de deux autres paraboles, mais je fais le choix de méditer celle de ce père prodigue dans son amour avec ses deux enfants déjà majeurs avec lesquels il gère une petite entreprise agricole familiale. Ne soyez pas aussi étonnés ma lecture moins spirituelle, exégétique ou biblique de cette parabole. J’ai fait le choix d’en faire une lecture plutôt pastorale et ecclésiale qui nous interpelle tous en cette rentrée pastorale.
A première vue, le fils aîné ne pose aucun problème ! Il est sérieux, travailleur, engagé. Le père appuie sur lui car il est digne de confiance et loyal. Il a le sens du devoir, ne râle jamais, ne fait ni contestation ni réclamation. Il n’est pas salarié, comme vous tous qui êtes engagés dans nos paroisses, et qui êtes presque tous de bénévoles, vous donnant à fond dans vos missions. Le sérieux du fils aîné a un impact sur les ouvriers qui reconnaissent en lui le digne héritier parce qu’il fait bien son travail.
Ce fils aîné fait penser à tous ces paroissiens engagés dans les différents services pour que la mission avance et grandissent. Par le sérieux de leur engagement, ils impressionnent les parents du KT, de l’aumônerie, du scoutisme, ceux qui sont éprouvés par le deuil, les baptêmes des petits-enfants, des enfants du primaires, les fiancés qui se préparent au mariage, les ados, les adultes et tous ceux qui frappent aux portes de nos églises. Ils le font bénévolement, généreusement, encaissant parfois des coups parce qu’il y aura toujours quelqu’un qui critique ou qui fait des remarques désagréables autour des choses qui sont faites ou mal faites. La mission dans l’Eglise peut être parfois ingrate, éprouvante et crucifiante. Je sais combien vous en prenez parfois plein la gueule et êtes tentés parfois de tout envoyer balader, mais vous restez là par loyauté et sens du devoir, pour ne pas laisser mourir l’Eglise qui a besoin de vous et de votre engagement.
Le fils cadet lui, souffre un peu de la routine familiale quotidienne et de ce travail qui ne le passionne plus. Il étouffe dans cette famille où il se sent malheureux. L’évangile ne nous dit pas les raisons qui font que cadet soit malheureux au sein de sa communauté familiale, mais il décide de prendre le large, veut voir autre chose, voir ailleurs ! Il paraît que c’est toujours mieux ailleurs ! L’herbe est toujours plus verte chez le voisin. La paroisse voisine, celle d’à côté aura toujours quelque chose de plus que la nôtre ! C’est certain ! Mais quand tu écoutes et regardes avec attention les voisins, tu vois qu’ils ont aussi leurs propres fragilités.
Ce cadet fait penser à ceux qui pensent que c’est toujours mieux ailleurs, se sentent un peu à l’étroit, mal aimés, incompris au sein de la communauté et qui sont tentés de changer de paroisse ! Nous devons, personnellement et collectivement nous interroger sur les raisons qui pousseraient certains à fuir nos paroisses, ce qui pourrait être cause de frustration, de blessure et de découragement pour ceux qui partent ou sont tentés de partir ?
Pensez à vos enfants ou petits-enfants qui n’attendent que le lendemain de leur18 ans pour quitter le domicile familial pour se sentir vraiment libres, épanouis et libérés du poids des parents ! Humainement, nous pouvons comprendre l’attitude du cadet qui désire prendre un peu de distance de la communauté familiale. Nous avons parfois besoin de cette distance pour apprendre ou réapprendre à aimer de nouveau la maison familiale, celle des parents, et si on peut parler de manière plus ecclésiale, pour aimer de nouveau notre communauté paroissiale, comme le cadet qui finalement, est revenu, redonnant la joie au père, aux ouvriers, malgré la jalousie du frère aîné qui est resté à la tâche.
Un artiste Sud-africain Lucky Dube chante que « l’on choisit ses amis, mais pas sa famille biologique ». De même, canoniquement et territorialement, on ne choisit pas sa famille paroissiale. Elle est là, à un territoire donné, là où nous habitons, Lardenne, Tournefeuille, Plaisance, St Simon, La Salvetat ! Cette communauté porte ses fragilités, certes, et comme notre famille naturelle, mais nous apprenons à aimer notre famille ecclésiale sans l’idéaliser. Nos paroisses ne sont pas idéales ! On le saurait. Parfois, on a envie de se barrer, et de claquer la porte. Un adage congolais que « qu’on ne répare une maison qu’en restant à l’intérieur pour voir d’où viennent les fuites d’eau sur le toit ». Notre communauté est loin d’être un modèle. Nous avons tous, en commençant par le curé et ses vicaires, des conversions à vivre.
S’il vous plaît, aimons, apprenons à aimer notre communauté ! Si nous ne l’aimons pas, nous ne pouvons pas nous engager pour la réparer et la rendre plus belle. Fuir la communauté ou s’en désengager n’est pas la solution qui lui permettra de se convertir et de devenir meilleure. Aimer sa communauté, c’est s’engager pour elle parce qu’elle a besoin de moi et pas seulement quand cela me fait plaisir ou me convient ! Jésus n’éprouvait aucun plaisir quand il était en croix. Il aurait pu écouter l’un des bandits crucifiés avec lui et qui lui demandait de se sauver de la croix, et de les libérer aussi s’il est le fils de Dieu. Mais, Jésus est resté sur la croix, par amour pour nous, pour notre salut. Nos missions sont parfois crucifiantes mais nous y restons parfois par amour pour nos frères et sœurs dans le Christ.
Le fils cadet a demandé et obtenu sa part d’héritage. Il s’est éloigné et s’est coupé de tous pour profiter de la vie, sans se soucier de l’avenir. Il aurait pu investir, placer son argent, le faire fructifier, mais il a tout dilapidé. Quand il y a que des sorties d’argent, sans entrées ni recettes, le compte bancaire est rapidement dans le rouge et forcement la misère se pointe. Une famille, une paroisse ne peut dépenser aveuglement sans faire attention aux recettes….! Je profite de cette parabole, en cette rentrée paroissiale pour remercier ceux et celles ont le souci de la santé matériellede nos 5 paroisses, vous qui lui permettez de vivre par vos dons et votre générosité, vous qui bricolez, qui faites des grands et petits travaux d’entretien dans nos églises, sacristies et maisons, vous qui vous occupez de la quête, du Denier… et de tant des questions matérielles ! Votre mission peut paraitre parfois ingrate, mais elle est indispensable pour que notre communauté ne sombre pas dans la misère comme le fils prodigue.
Le fils cadet est tombé dans la misère. Aimer sa communauté paroissiale, c’est aussi être capable de regarder sa propre misère et ses pauvretés pour l’aider à s’en sortir, à se relever. Il ne sert à rien de pointer la misère, la souligner si nous ne prenons pas l’engagement de nous bouger pour nous en sortir. Il y a des gens qui savent et disent ce qu’il faudrait faire, mettre en place, mais qui ne font rien. Si je vois que ma communauté est pauvre de quelque chose, l’attitude juste serait de me demander ce que je peux faire personnellement pour que cela s’améliore. Si je veux que ma communauté soit plus accueillante, s’engager personnellement pour améliorer l’accueil. Si je veux que les enfants trouvent leur place aux messes dominicales et que nos communautés rajeunissent encore plus, m’investir dans l’accueil des enfants à la messe de dimanche, par exemple. Je pense à Irène qui pendant plusieurs mois, elle était seule à s’occuper des enfants le dimanche à Tournefeuille. Tout le monde disait que c’était beau ! Elle a lancé des appels pour trouver de l’aide ! Aucune réponse. Elle s’est découragée ! Et elle a déménagé de Tournefeuille cet été!
Vous avez constaté qu’il n’y a pas suffisamment de groupes de prière dans nos paroisses, moins de temps conviviaux, mois d’apéros ou repas partagés, moins de solidarité, moins de louange… Parfait ! Allez-y, prenez des initiatives ! N’attendez pas que ce soient vos prêtres qui conçoivent tout. Nous sommes là pour accueillir, discerner, soutenir et accompagner vos idées et propositions.…Chaque baptisé est responsable de la santé de la communauté paroissiale pour la sortir de la misère dans laquelle elle se trouve.
La situation négative de misère a permis au fils cadet de prendre conscience de la chance qu’il pouvait avoir dans la maison familiale. Cela l’a poussé à prendre la décision d’y retourner : « Alors il réfléchit : ‘Tant d’ouvriers chez mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim ! Je vais retourner chez mon père, et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi. Je ne mérite plus d’être appelé ton fils. Prends-moi comme l’un de tes ouvriers ». Mal habillé, devenu ombre de lui-même et très affamé, il reprend la route du retour vers son Père.
Le père a respecté la liberté de son fils, même celle de s’éloigner de lui. Dieu nous aime tellement qu’il nous a créés libres. Liberté même de lui dire non, de quitter la communauté et d’y revenir. Une des caractéristiques qui différentient l’Eglise d’une secte, c’est la liberté, celle d’entrer ou de sortir. Le père reconnaît au cadet même le droit de se tromper, de tout quitter, droit à l’erreur. Mais ce père n’a jamais cessé d’aimer et d’espérer le retour du fils cadet et l’attendait tellement depuis son départ qu’il est le premier à l’apercevoir, de très loin : « Comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut saisi de pitié ; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers ».
Le père ne laisse même pas au fils cadet couvert de honte le temps de déclamer le petit baratin qu’il avait déjà bien préparé pour demander pardon. Dieu connaît notre cœur, nos plaies et nos blessures. Le père ne fait aucun reproche au fils. Ce qui compte pour le père, c’est redonner honneur et dignité à son fils qui revient à la maison : « Vite, apportez le plus beau vêtement pour l’habiller. Mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds » et il tue le veau gras réservé aux grandes fêtes.
Nous contemplons dans cette parabole la figure sublime du père qui va à la rencontre de chacun de ses deux enfants qu’il aime d’un amour particulier et impartial. Celui qui nous rassemble, au-delà de nos différences, c’est Dieu le Père qui nous rend frères et sœurs en Jésus Christ et par son Esprit d’Amour. Puisse Dieu nous donner la grâce de former vraiment une Eglise-Famille, où nous nous reconnaissons vraiment frères et sœurs, où nous avons à la fois le souci de l’ensemble de la famille, et les uns des autres en cette année pastorale. Amen.