Mes chers frères et sœurs !
Le prophète Isaïe nous rappelle une donnée fondamentale de notre foi : l’existence d’un seul Dieu et Seigneur Universel devant lequel chaque humain doit révérence et obéissance totale en se soumettant à sa volonté « que ta volonté soit faite sur terre comme au ciel disons dans le Notre Père ». Nous devons absolument observer la volonté de Dieu même quand celle-ci s’oppose à certaines opinions et lois sociales. C’est là que les choses se compliquent car elles posent la question du rapport entre la religion et la politique, débat qui existe depuis toujours, et dont on a beaucoup parlé en France ces derniers temps les mesures anti-Covid par exemple, les dernières lois bioéthiques, la close de conscience pour les médecins…. Il s’agit ici d’une question très difficile du rapport entre foi, conscience, religion et la loi civile ou politique. C’est sûr que nous sommes appelés à respecter la loi, mais nous savons aussi que parfois nous sommes confrontées à des lois qui ne sont pas morales. Ce n’est pas parce qu’une loi a été voté au parlement que celle-ci devient moralement acceptable. Il est inutile de vous donner des exemples, tellement ils sont nombreux.
L’évangile de ce dimanche nous rappelle que même Jésus a été mis face à ce même débat, comme nous pouvons le voir à travers la question qui lui est posée : « Est-il permis, oui ou non, de payer l’impôt à l’empereur ? » Pas facile de répondre à cette question pour Jésus : certains ont commencé contester son autorité comme messie, nous sommes sous la e domination romaine, avec l’empereur Tiber, qui exige à tous les citoyens de 14 à 65 ans de son empire de payer un impôt annuel qui était aussi une sorte de reconnaissance de la divinité de l’empereur. Cet impôt ne plaît pas à certains groupes nationalistes en Israël qui, au nom de l’Unique Dieu d’Israël à qui tous doivent obéissance et respect, faisaient de la résistance pour se libérer de la domination de l’empire Romain. Parmi ces résistants nationalistes, il y a les Zélotes, mais en réalité, c’est tout me peuple d’Israël qui désirait s’émanciper et tout appui aux colons était mal vu par le peuple. C’est pour cette raison que les publicains (collecteurs d’impôts) étaient considérés comme des collabos et pécheurs publics.
« Est-il permis oui ou non de payer l’impôt de César ? » Si Jésus avait dit oui, il est permis de payer cet impôt, il aurait vu de déchainer sur lui la colère de tout le peuple qui l’auraient accusé de nier l’autorité exclusive Dieu d’Israël. Si au contraire il avait répondu par « non, il n’est pas permis de payer cet impôt, alors il aurait été considéré comme un rebelle, un opposant, un résistant à l’autorité de l’empereur. Dans tous les cas, Jésus était bien piégé. Dans sa réponse : « Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. », Jésus expose le principe fondamental du rapport chrétien par rapport à l’autorité civile ou politique. La foi chrétienne ne dispense pas de l’obéissance aux autorités auxquelles elle reconnait l’autonome légitimité dans leur domaine.
C’est le principe exposé par saint Paul dans sa lettre aux Romains : « Que chacun soit soumis aux autorités supérieures, car il n’y a d’autorité qu’en dépendance de Dieu, et celles qui existent sont établies sous la dépendance de Dieu ; si bien qu’en se dressant contre l’autorité, on est contre l’ordre des choses établi par Dieu. Car elle est au service de Dieu : en faisant justice, elle montre la colère de Dieu envers celui qui fait le mal. C’est donc une nécessité d’être soumis, non seulement pour éviter la colère, mais encore pour obéir à la conscience. C’est pour cette raison aussi que vous payez des impôts : ceux qui les perçoivent sont des ministres de Dieu quand ils s’appliquent à cette tâche. Rendez à chacun ce qui lui est dû : à celui-ci l’impôt, à un autre la taxe, à celui-ci le respect, à un autre l’honneur. » (Rm 13, 1-7)
Tout est clair et limpide. Notre prof de la Pensée Sociale de l’Eglise nous disait qu’un bon chrétien, quand signe sa fiche d’impôt, il doit le faire avec sourire car, il rend service à son pays et à ses frères et sœurs. C’est la justice distributive qui fait que nous avons un bon système social en France. Je sais qu’il n’est pas parfait, mais il est pas mal… Nous ne nous en rendons parfois compte que quand nous en sommes bénéficiaires, lorsque nous sommes malades par exemple. Un ami âgé de 40 ans, père de deux enfants doit faire de la dialyse 5 jours par semaine. Il m’a récemment avoué être impressionné par tout le coût de ses soins pris intégralement en charge par la Sécu ! Je prie qu’il s’en sorte en trouvant un donneur de rein. Combien parmi nous, comme moi-même, nous rendons compte à quoi servent nos impôts que quand nous sommes vraiment malades ou en difficulté ? De même, le Denier que vous donnez à l’Eglise ici sur l’ensemble paroissial est un geste de Solidarité (et un devoir) qui permet à toute l’Eglise qui est de Toulouse de vivre, cela permettant aux paroisses plus riches de porter et soutenir aussi l’action des paroisses plus pauvres car tout ça dans la même caisse de solidarité. Il nous faut donc payer nos impôts et obéir aux lois de la République.
Mais Jésus ajoute aussi : « rendez à Dieu ce qui est à Dieu » et là, les choses sont plus compliquées car il ne s’agit pas d’un parallèle entre César et Dieu. Le changement est radical. Dieu est celui en qui nous recevons l’être, la vie, l’agir, Celui qui nous donne d’exister et à qui nous devons tout. « Qu’as-tu que n’aies reçu du Seigneur ? Et si tu as tout reçu du Seigneur, pourquoi en tirer orgueil ? Notre relation avec le pouvoir public est celui du donner et recevoir, donner et avoir. C’est Ségolène Royal qui parlait du donnant-donnant. L’Etat garantit une société où règne, dans la mesure du possible, un certain ordre, la justice sociale, la liberté, le transport, la santé, l’éducation… et en retour, l’Etat attend de nous les citoyens certains devoirs, payer nos impôts, porter le masque en période de Covid…
Une relation donnant-donnant, donner-recevoir est simplement impossible avec Dieu. Il y a quelques jours, Jésus nous rappelait le premier commandement : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toutes tes forces » Au Seigneur nous devons tout donner, tout ce que nous avons et plus encore, tout ce que nous sommes parce que vous vient de lui et tout lui appartient. Avec lui, nous ne pouvons pas entrer dans une relation mercantile, un marchandage servile. « Seigneur, je ferai ceci pour toi si tu fais cela pour moi », cela me arche pas. Jésus nous dit que nous ne sommes pas ses serviteurs ni des esclaves, mais ses amis. Si nous pouvons donner ou retirer le pouvoir à l’autorité politique par les urnes et le vote, nous ne pouvons rien donner ni retirer à Dieu car tout lui appartient et nous n’avons aucun pouvoir sur lui. C’est pour cela que nous le louons, pour notre bien, simplement pour nous rapprocher de lui
Et pourtant, très souvent, nous nous comportons avec Dieu avec des calculs, quelques petits chantages, comme le fils ainé de la parabole du fils prodigue : « Mais il répliqua à son père : “Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais transgressé tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis. Mais, quand ton fils que voilà est revenu après avoir dévoré ton bien avec des prostituées, tu as fait tuer pour lui le veau gras !” » Ce fils a donne à son père obéissance, respect, service comme on le fait à l’empereur, sans amour. Les citoyens de l’empire romain obéissaient à l’empereur et lui versait les impôts tout en le détestant, comme nous parfois parce qu’il nous arrive d’obéir à l’Etat sans l’aimer vraiment.
Mais Dieu lui est notre Père, il nous aime, nous donne tout et attend de nous une relation vraiment filiale, dans une joie et confiance totale. Puisse cette eucharistie nous faire grandir dans cette relation filiale, confiante et joyeuseavec Dieu de qui nous tenons la vie, le mouvement et l’être. Amen.