Mes chers frères et sœurs !
Encore une fois, Dieu vient nous déranger dans nos logiques en déconstruisant ce que nous appelons la « Justice sociale » et « le Droit du travail ». Ce thème risque d’être déstabilisant, voire même choquant surtout dans notre région toulousaine car je sais combien parmi nous en cette période sont confrontés aux questions professionnelles, l’incertitude d’en de pouvoir garder son travail, le problème de chômage, voir même celui pouvoir décider du licenciement de ses employés pour les patrons.
Cette parabole parle de travail, de salaire, de durée de travail, des primes d’encouragement, de signe de reconnaissance au travail, le salaire minimum. Au temps de Jésus, le droit du travail fixait le salaire minimum à 1 pièce d’argent. C’est la raison pour laquelle le patron de la parabole ne donne pas moins d’une pièce à tous les ouvriers. Mais tous ces thèmes du droit de travail et de justice sociale, le Seigneur nous les fait voir sous une autre perspective pour nous inviter à aller au-delà du droit purement humain, au-delà des revendications syndicales purement économiques. La vraie thématique de la parabole c’est la « bonté » de Dieu. Reprenant son employé « râleur », le patron répond : « Je veux donner à ce dernier autant qu’à toi : n’ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mon bien ? Vas-tu regarder avec un œil mauvais parce que moi, je suis bon ? »
Au milieu des critiques et revendications syndicales des ouvriers contre le propriétaire de la Vigne, – ce qui est humainement justifié- le Seigneur vient nous apprendre ce que veut dire la « justice du cœur du Dieu », toujours liée à la bonté, l’amour et la compassion : trois éléments qui sont au coeur de l’agir de Dieu pour chacun de nous. Dieu n’est pas un juge ni un DRH. Dans une série sur Netflix décrivant la vie d’un grand Cabinet d’avocats à New York, Harvey, un grand du barreau, impitoyable qui n’a jamais perdu un seul procès, s’adressant à Mike Ross, son tout jeune assistant, très intelligent, sans diplôme mais qui se fait passer pour un diplômé de Havard, il lui dit : « un avocat, un juge n’a pas à être bon, à agir avec son cœur ou à regarder le cœur de l’autre, à avoir de la compassion. Son job est de défendre pour gagner, de juger en regardant le droit, en profitant même des failles du Droit ». Un RH est aussi parfois obligé à faire des choses contre son cœur et ses valeurs, mais seulement selon ce que dit le Droit et la politique de l’entreprise. Ma sœur qui est RH fait des cauchemars nuit et jour depuis le confinement parce qu’elle ne peut assumer, dans son cœur, décisions qu’elle est obligée de prendre actuellement. C’est cela l’humanité, c’est le monde dans lequel nous vivons, avec ses imperfections.
Dieu a un fonctionnement différent ! Et c’est normal parce qu’il est Dieu, Lui. Il est un Père plein d’amour, de bonté, de miséricorde et de compassion pour nous. Remarquez bien que dans notre vie, chaque fois que nous laissons nos tripes prendre le dessus sur notre raison, chaque fois que nous écoutons plus nos tripes, notre cœur plutôt que le Droit et raison logique, nous faisons des choses qui sont socialement, rationnellement et juridiquement anormales. C’est ainsi que Dieu agit envers nous, avec son cœur, ses tripes. Isaïe nous dit dans la première lecture que les pensées de Dieu ne sont pas nos pensées ! Les voies du Seigneur sont humainement impénétrables, insondables. Certaines paroles de Jésus resteront toujours humainement incompréhensibles et incomprises aussi longtemps que nous n’entrerons pas dans la logique de son cœur, dans sa justice compatissante et miséricordieuse.
Humainement, nous sommes choqués par le patron de la parabole. Il est tout à fait logique et humainementjuste que chacun de nous ici se sente solidaire des ouvriers de la première heure qui ont enduré tout le poids du travail, avec la chaleur et la fatigue. Il n’est pas humainement juste de donner le même salaire à ceux qui travaillent sans compter les heures, qui ne pensent jamais au RTT, qui passent leurs soirées et même les weekends à répondre aux mails professionnels, qui ne voient plus la famille parce que toujours en voyage à l’étranger ou sur la route, qui doivent être réactifs, mobiles et disponible 24 heures sur 24…. Logiquement, ces gens ne peuvent pas avoir le même traitement que ceux qui ne comptent que les 35 heures légales !
Tout cela n’est pas juste, si l’argent et les lois de l’économie sont nos critères de justice ! Mais si nous entrons dans la logique de Dieu, voici que s’ouvre pour nous une nouvelle perspective. Oui, il y a un contrat entre le patron et les ouvriers ! Mais le contrat de Dieu avec nous est d’un autre ordre. Il est tout à fait spécial parce que Dieu est différent de nous, en nous donnant son Esprit, il nous dit que nous pouvons nous aussi agir comme lui.
Dieu nous appelle à travailler dans sa Vigne qu’est l’Eglise, qu’est le monde, mais Il n’est pas dans une logique de détachement, de distance vis-à-vis de ses ouvriers, comme certains patrons qui n’ont que des relations professionnelles avec leurs employés et pour lesquels ne compte que le travail exigé et réalisé. Dieu aime tellement tous les hommes qu’il se donne soi-même à nous à travers les sacrements. Dieu se donne lui-même comme salaire, mais il s’agit d’un salaire gratuit. Dieu nous sauve gratuitement et sans limite. Le salut, le Bonheur éternel, l’Amour infini, est le salaire que Dieu nous promet, et ce salaire-là, aucun parmi nous ne peut prétendre le mériter ! Dans le domaine de la foi, nous devons sortir de la méritocratie. Devant Dieu, nous ne méritons rien, rien du tout, car tout nous est gratuitement donné. La seule condition, qui est à la fois un avantage et un danger, c’est notre liberté de nous ouvrir à lui ou de nous fermer à Dieu, d’accepter ou refuser le don de l’Amour et du salut.
Nous nous sentons peut-être loin de Dieu. Nous n’avons peut-être jamais pensé à lui ni travaillé pour lui. Nous nous considérons peut-être comme ces ouvriers de la cinquième heure mais Dieu veut encore nous embaucher en nous engageant dans le monde, dans l’Eglise. Nous pouvons dire oui au Seigneur et nous mettre à son service, car il n’est jamais tard pour le Seigneur. Il n’est jamais tard pour dire oui au Seigneur, de revenir à lui de tout notre cœur. Jamais tard de recevoir les sacrements, comme le baptême, la confirmation, la communion, quel que soit notre âge. C’est pour cela que je fais la proposition de préparation à la communion et confirmation aux adultes, parents qui ont des enfants au KT, à l’aumônerie, chez les scouts…car Dieu nous attend toujours pour nous embaucher et nous donner la grâce du salut. Nous sentons que notre vie manque de saveur, que nous nous sommes éloignés de l’essentiel, de Dieu, de nos proches ! Il n’est pas tard de revenir sur ses pas, reprendre le cap et accueillir le bonheur simple que Dieu nous donne.
Par rapport au salut que Dieu donne, évitons des comparaisons et des jalousies. Ce qui blesse les ouvriers qui se sont levé tôt et qui ont enduré tout le poids du jour, c’est la comparaison avec ceux qui sont venus tard dans l’après-midi. Se comparer aux autres crée inévitablement entre-nous des rivalités, des jalousies, voire même des crimes, génère guerre et discorde dans la société, les familles et la communauté. Dieu nous aime chacun d’un amour spécial, pas besoin de nous battre car dans le cœur de Dieu, il y a suffisamment de place pour chacun de ses enfants.
Si tu te prends pour le chrétien infatigable de la première heure, le chrétien exemplaire et modèle qui prétend de Dieu une récompense méritée, alors, tu risques d’être très déçu : devant Dieu nous n’avons aucun droit. Le droit à l’Amour n’existe pas car l’Amour vrai ne se revendique pas ! L’amour se donne et se reçoit gratuitement. Combien de fois j’ai rencontré des chrétiens qui me rappellent toute leur vie donnée et consacrée à Dieu et à l’Eglise, à la communauté, trouvant injuste de ne pas être traité de manière privilégiée…. Non, il n’y pas de privilégiés aux yeux de Dieu.
Si au contraire, avec humilité, tu te ranges parmi les ouvriers de la 5è heure, parmi les serviteurs quelconques, aux côtés des pécheurs comme Marie-Madeleine ou le Bon-larron, si tu arrêtes de regarder tes mérites pour ne compter que sur la bonté et l’amour de Dieu… alors, oui, tu es sur le chemin du bonheur car tu as compris que le salut est un don gratuit. Puisse le Seigneur nous faire découvrir chaque jour la grandeur de son Amour gratuit et infini. Amen.