Chers frères et sœurs, nous risquons parfois d’être gagnés par le désespoir, surtout quand nous manquons de foi, d’espérance, de charité. Nous nous mettons à imaginer que l’histoire est une suite de catastrophes, de calamités – notre histoire personnelle, l’histoire de notre pays ou l’histoire universelle.
Et si nous nous enfonçons dans ce désespoir, nous nous mettons à penser que le Seigneur à la fin des temps viendra faire justice avec des actes violents, avec des cataclysmes, qu’il viendra régler des comptes… Certains risquent même de penser que le salut est réservé pour un petit nombre de personnes, un petit groupe de privilégiés qui seront sauvés tandis que le reste périra. Alors ou bien ils désespèrent d’appartenir à ce petit groupe, ou bien au contraire – ce qui n’est guère mieux – ils imaginent qu’eux-mêmes appartiennent à ce petit groupe.
Au début de ce discours dont nous avons entendu seulement une partie, la dernière partie, le Seigneur répond à quatre de ses disciples qui lui demandent quand la fin des temps adviendra. Ils sont quatre à l’interroger, ce sont les quatre que Jésus a appelés en premier, au début de l’Évangile : Pierre, Jacques, Jean et André qui étaient dans les barques – vous vous en souvenez.
Peut-être pensent-ils : Nous sommes les premiers à avoir été choisis donc nous sommes les apôtres les plus importants, le Seigneur va nous donner des révélations à nous et pas aux autres.
Le Seigneur dans son discours va corriger cette pensée, ce comportement. Et à la fin du discours il dira : Ce que je vous dis à vous je le dis à tous. Donc il y a autour de ce discours de Jésus, et en réalité dans toute l’histoire du peuple de Dieu, une atmosphère de catastrophisme et d’élitisme que Jésus entend corriger.
Dans son discours, Jésus ne cache pas que l’histoire est pleine d’évènements violents et de souffrance, il ne cache pas la vérité. On le voit aussi dans le crucifix. Le Seigneur se présente en paroles et en actes avec la croix, toujours, mais nous savons en même temps qu’il a vaincu la mort, donc nous voyons la croix comme un signe de victoire sur la mort et sur tous les maux.
De même dans ce discours, on y trouve certes beaucoup de calamités, mais celles-ci sont toujours dépassées par l’annonce d’une bonne nouvelle, d’un heureux évènement. Précisément si vous l’entendez dans son entier, vous verrez qu’il y a de façon répétée dans ce discours l’évocation de plusieurs évènements dramatiques, mais à chaque fois conclus par un évènement heureux, positif, et qui dépasse infiniment ce qui précède de négatif.
Par exemple le Seigneur dit que les nations se dresseront les unes contre les autres, les royaumes contre les royaumes, qu’il y aura des tremblements de terre et des famines. Cependant le Seigneur conclut en disant que ce sont les débuts des douleurs de l’enfantement. Il y a un enfantement, donc il y a un évènement infiniment plus heureux que toutes les douleurs qui l’ont précédé, au point qu’il les efface toutes.
Quand le Seigneur parle d’un enfantement, nous pouvons comprendre avec certitude qu’il y aura un renouvellement intégral de toute la création, une transfiguration de toute la création.
Et puis par exemple il y a aussi dans ce discours l’annonce d’un évènement catastrophique pour toute l’humanité où le Seigneur nous dit que tous devront fuir pour ne pas périr. Cependant là aussi la conclusion est ce qu’il y a de plus important, il conclut en disant que Dieu a abrégé ce temps particulièrement éprouvant pour permettre à l’humanité de survivre.
Donc nous voyons à travers ces exemples que l’œuvre du Seigneur n’est jamais une œuvre de destruction. Ce qui domine c’est la création et la recréation, la miséricorde, la transfiguration du monde que nous connaissons, même si cela comprend des bouleversements.
Et puis il y a une autre de ces conclusions positives que nous avons entendue tout à l’heure et que nous n’avons pas pu reconnaitre comme positive… C’est quand le Seigneur nous dit que le soleil s’obscurcira, que la lune ne donnera plus sa lumière, que les étoiles tomberont du ciel. En réalité il s’agit là aussi comme pour les précédentes d’une conclusion positive, parce que si vous lisez les versets qui précèdent, vous verrez que le Seigneur parle des faux prophètes, de ceux qui essaient de nous abuser en opérant des signes et des prodiges. Et dans le temps où parle Jésus, les faux prophètes que font-ils ? ils utilisent les astres, les planètes, les comètes, la lune etc… les phénomènes célestes et atmosphériques comme des signes pour leurs fausses prophéties.
Donc quand le Seigneur nous dit que le soleil s’obscurcira, que la lune perdra sa lumière, que les étoiles tomberont du ciel – que ce soit au sens propre ou au sens figuré – cela signifie que les faux prophètes perdront leurs moyens, leur crédit, leur capacité de nuire. Alors le Seigneur viendra sur les nuées avec grande puissance et gloire, et il réunira les élus des quatre vents, de l’extrémité de la terre à l’extrémité du ciel.
Le Seigneur corrige le catastrophisme, il corrige aussi l’élitisme. Les élus ne sont pas dans un lieu à part du reste de l’humanité. Le Seigneur le dit : On essaiera de vous abuser en disant Voici il est ici, ou bien Voilà il est là, dans un angle ou un autre de la Terre – n’y allez pas…
Le Seigneur ne nous dit pas que les élus sont un petit groupe caché dans un coin qui attend que la catastrophe arrive et emporte le reste de l’humanité, mais il nous dit que les élus seront réunis des quatre vents, des extrémités de la terre à l’extrémité du ciel.
Les élus sont disséminés dans toute l’humanité, répartis sur toute la surface de la terre et du ciel, ils sont associés à toute l’humanité sans exception, solidaires de toute la famille humaine dans tous les aspects de son existence. Ils connaissent des tribulations en union de prière avec le Christ et ils demandent le salut de leurs oppresseurs, ils sont sauvés oui mais ils le sont avec le désir de sauver autrui avec eux. Les élus sont appelés élus parce qu’ils sont les fils et les filles dans le Fils, ils ont part à sa mission, à son œuvre qui consiste avant tout à demeurer solidaire de toute la famille humaine.
Quand le Seigneur viendra, les faux prophètes auront perdu tous leurs moyens, il viendra avec grande puissance – il n’y aura aucun contraste à sa puissance – et il ne peut y avoir aucune espèce de contraste à sa puissance. Il viendra dans la douceur et la miséricorde.
Quoi de plus doux que cette image du figuier, quand ses rameaux deviennent tendres, que ses feuilles apparaissent, nous savons que l’été est proche, en juin il donne déjà des fruits et trois fois plus en août… Il y aura une histoire de grâce encore avec la venue du Seigneur, comme pour les fruits du figuier qui vont en augmentant.
Là où le Seigneur manifeste le plus fortement sa solidarité avec nous tous, c’est quand il dit que seul le Père connait le jour de sa venue, lui-même, le Fils, ne le connait pas. Cette affirmation est une épine dans le pied des théologiens depuis 2000 ans…
Le Seigneur veut partager notre humanité véritablement, et il le fait en choisissant d’ignorer la date de sa venue. Il demeure solidaire avec chacun de nous jusqu’à la fin des temps, solidaire dans l’attente du dernier jour, qu’il attend en même temps que nous et avec nous, pour nous accompagner en tout et toujours.