Homélie du Père Joseph de la Pentecôte, année A (2023)

Mes chers frères et sœurs !

Nous voici au terme du temps pascal. Depuis le dimanche de Pâques, 50 jours se sont écoulés Pour les Hébreux, 50 jours après la Pâque juive, on célébrait le don de la Torah. Dans l’Antiquité, 50 était le nombre de la plénitude des temps. C’est ainsi que dans l’empire Romain, à l’âge de 50 ans, on était dispensé du service militaire. Pour les Hébreux, tous les 50 ans on célébrait le Jubilée ! La Pentecôte indique aussi qu’un temps est fini. Ceci veut dire qu’avec la fête de la Pentecôte, le temps du Jésus historique et des apparitions est terminé pour laisser place au temps de l’Eglise. Ceci veut dire que notre temps a commencé avec la Pentecôte.

Mais que s’est-il passé à la Pentecôte ? Jésus était déjà monté au ciel depuis 9 jours, c’est-à-dire à l’Ascension. Il avait demandé aux disciples de poursuivre ce qu’il avait commencé, c’est-à-dire, l’annonce de la bonne nouvelle d’un Dieu qui aime à la folie et gratuitement chaque être humain. Mais les disciples étaient découragés, déçus et ils avaient peur. Ils se demandaient : « Et maintenant, qu’allons-nous faire ? », une grande équation, comme celles devant lesquelles nous nous retrouvons parfois ! Nous avons alors besoin d’une aide, d’un bon coup de main du Seigneur. Quand tout nous semble bouché, sans issue nous avons besoin de son Amour, besoin de l’Esprit Saint. La Pentecôte est une invitation à faire confiance à Jésus qui nous dit : « Maintenant sortez ! N’ayez pas peur, vous avez la force d’y arriver, vous avez tout ce qu’il vous faut pour ce job, pour cette mission, pour cet engagement ! Mon Esprit vous a été donné et est avec vous, en vous ! »

Vous êtes probablement en train de vous remémorer quelques traces du catéchisme, de la préparation à la confirmation, pour y trouver quelques informations sur cet illustre inconnu qu’est le Saint Esprit. Vous pouvez trouver quelques belles définitions, de beaux concepts, mais rappelez-vous toujours que le Saint Esprit veut surtout être reconnu pour ce qu’il fait, pour son œuvre, son action et non pas par ce que nous pouvons dire de lui. Le Saint Esprit n’est pas une chose à expliquer, à conceptualiser, mais une personne à aimer, une présence qui se donne, comme une expérience d’amour à vivre. L’amour ne se définit pas, ne se conceptualise pas. Il s’agit d’une expérience à vivre !

Le jour de la Pentecôte, les apôtres font un saut de qualité. Matériellement et physiquement, Jésus était désormais absent, invisible, assis à la droite du Père, mais spirituellement les disciples l’avaient en eux parce qu’avant de s’en aller il leur avait dit « Je suis avec vous jusqu’à la fin des temps ! » La Pentecôte nous invite à passer du matériel, du physique au spirituel. Qui a reçu le Saint Esprit dans son cœur vit selon l’Esprit mais tout reste matériel, physique et charnel pour celui veut vivre selon la chair et qui n’élève pas son cœur ! Attention ! Spirituel ne signifie pas ici « être désincarné », « être hors du monde ». Quand on dit qu’une personne est spirituelle, on pense à un moine enfermé, un ermite qui ne vit que de la prière 24 heures sur 24. Quelqu’un de spirituel n’est pas celui qui prie beaucoup ou qui fait des choses religieuses, qui passe ses journées dans les églises ou qui enchaine pèlerinage sur pèlerinage à longueur de l’année. La personne spirituelle est celle qui vit selon l’Esprit qui habite profondément dans son cœur, qui sait qu’il est tout le temps en compagnie de Dieu.

Mère Teresa disait un jour à un journaliste qui essayait de la titiller sur sa foi : « voyez, Dieu, moi je le vois clairement. Il est en cet homme qui souffre ou en celui-là, qui est allongé sur le lit, abandonné de tous ! Dieu est en moi ! Dieu est en vous ! Si vous ne voulez pas le reconnaître, ce n’est pas mon affaire parce que pour moi la chose est tellement évidente. » Tout est matière, matériel ou esprit. Ça dépend de comment tu vois ou veux voir les choses. Par exemple, sur l’autel après la consécration, celui que n’a pas la foi va voir un simple pain de blé, de la matière, mais spirituellement, la foi me fait voir Jésus qui est réellement présent dans le pain consacré. Un nouveau jour peut être vu simplement comme un jour de travail, parfois pénible à vivre ou alors spirituellement, ce nouveau jour peut devenir une nouvelle opportunité pour aimer et être aimé.

Ma vie peut être terriblement et affreusement matérielle ou merveilleusement spirituelle : tout dépend de notre cœur. Avec la Pentecôte, la présence même de Dieu prend une perspective nouvelle. Dieu n’est plus présent « devant nous », comme dans l’AT, ou « Dieu avec nous », « l’Emmanuel » comme dans le NT avec l’incarnation de Jésus, mais Dieu « est en nous ». Avec la venue et le don du Saint Esprit, Dieu est en nous ! Nous devenons la « maison de Dieu », le « temple du Saint Esprit » depuis le baptême. Avec la présence du Saint Esprit, nous ne faisons plus les choses « pour Dieu » mais nous pouvons réaliser « les œuvres de Dieu » car il habite et agit en nous et par nous. Depuis la Pentecôte, l’amour n’est plus un devoir, une obligation. Nous ne « devons plus aimer » comme dans l’AT, mais nous « pouvons aimer » comme Dieu, car la présence du Saint Esprit en nous nous rend capables d’aimer.

Cela veut dire que nous devons être dociles à la présence du Saint Esprit en nous. Pour cela, nous pouvons regarder les attitudes des apôtres à la Pentecôte. « Quand arriva le jour de la Pentecôte, au terme des cinquante jours après Pâques, ils se trouvaient réunis tous ensemble. » Les Actes des Apôtres précisent bien que les disciples étaient réunis. L’Esprit Saint ne va pas là où sont les divisions. Si nous voulons recevoir le Saint Esprit, soyons unis entre-nous, reconnaissant que notre propre destin est lié à celui du frère, de la sœur qui est à côté de nous. C’est le « nous » qui nous sauvera ! Notre monde et le Malin chercheront toujours à nous diviser mais le Saint Esprit vient nous unir, nous rappeler que nous formons une seule et même famille humaine, une seule famille ecclésiale. Plus nous serons unis, plus le Saint Esprit accomplira des merveilles pour nous et en nous. « Tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière, avec des femmes, avec Marie la mère de Jésus, et avec ses frères » disait la première lecture de dimanche dernier. En attendant le Saint Esprit, les disciples vivaient dans la concorde et la prière, avec la Vierge Marie. Il est temps que nous redevenions des hommes et femmes qui prient vraiment, mettant la prière au centre de leur vie. Prier ne signifie pas dire ou réciter une prière. Prier signifie laisser murir, laisser parler et écouter le Saint Esprit qui est déjà présent en nous et qui ne réclame rien d’autre que de le laisser agir et se manifester. Cela veut dire parfois apprendre à faire silence, apprendre à écouter !

« Tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière, avec des femmes, avec Marie la mère de Jésus » Souvent, pour beaucoup de catholiques, la présence de la Vierge Marie dans notre vie est une présence dévotionnelle, je dirais même, de la « déco » ! Je pense que Marie est présente dans ma vie seulement parce que je porte sur moi une médaille de la Vierge qui m’a été offerte à mon baptême. La présence de Marie au milieu des apôtres à la Pentecôte rappelle que sa présence dans notre vie doit être décisive. Marie est comme la fissure à travers laquelle le Saint Esprit fait irruption dans ma vie. Avant nous, Marie a accueilli le Saint Esprit qui l’a fécondé pour qu’elle devienne la Mère de Dieu. La Vierge Marie nous prépare, nous soigne, comme une maman, pour que nous recevions et laissions agir le Saint Esprit dans notre cœur comme elle. Sa présence pour les chrétiens doit être concrète, décisive et avoir une incidence existentielle.

Alors, tout ce que le Saint Esprit a opéré en Marie, il peut l’opérer aussi pour nous dans notre vie, dans la vie de l’Eglise. Prions le Saint Esprit pour tous les baptisés de ce weekend de Pentecôte, les enfants qui font la première communion, ceux qui se marient en cette période et tous ces adultes qui reçoivent le sacrement de confirmation en ce weekend de Pentecôte et ces séminaristes qui seront ordonnés prêtres et diacres dans l’Eglise en ce mois de juin.

Le Saint Esprit est à l’origine de la naissance de l’Eglise depuis la Pentecôte. Il la conduit depuis plus de deux mille ans. Son souffle la conduira encore et encore ! Alors, laissons-nous toucher, façonner et modeler par le Saint Esprit qui nous restaure pour redevenir l’image et la ressemblance de Dieu, voulue dès l’origine mais que le péché Originel a abimé.

Homélie du Père Joseph de la Pentecôte, année A (2023)2023-05-31T08:18:35+02:00

Homélie du Père Joseph de l’Ascension, année B (2021)

Mes chers frères et sœurs !

L’’Ascension du Seigneur m’a rappelé l’histoire d’un ami prêtre. Fraîchement sorti du séminaire la même année que moi, il a été nommé vicaire sur un ensemble paroissial assez important et riche pastoralement comme le nôtre. Son curé un quinquagénaire, avait déjà de la bouteille : 23 ans d’ordination, quelqu’un de très très dynamique. Il savait comment s’y prendre pour collaborer avec les laïcs auxquels il déléguait les responsabilités. Cependant, il était aussi un peu partout et maîtrisant presque tous les domaines d’une pastorale paroissiale. C’est dans ce contexte, mon ami, le tout jeune vicaire et « bébé prêtre » comme certains s’amusait à l’appeler par sympathie parfois et ou avec un peu de condescendance à cause de son âge, commence son ministère de prêtre. Il suivait son curé et était porté par le dynamisme et sa créativité pastorale. Son curé qui lui donnait des conseils et lui apprenait à « faire le prêtre » de paroisse.

En effet, entre ce que nous apprenons pendant les années de formation au séminaire, notre vision un peu idéaliste à la sortie du séminaire et la réalité sur terrain, il y a parfois un bon océan à traverser… C’est pour cela qu’après l’ordination, on a besoin encore d’être formé à la réalité de terrain et à la vie concrète de notre vie de pasteur : la joie de l’attachement à une communauté paroissiale qui nous porte qu’on apprend à aimer, la gestion des groupes, l’animation spirituelle, la catéchèse, les funérailles, les mariages et les baptêmes, les services de solidarité….  Il y a aussi quelques difficultés qu’on apprend à affronter comme le poids du travail, la complication de certaines personnalités qu’il faut canaliser, les donneurs des leçons qu’il faut apprendre à recadrer et remettre à leur place, les querelles, la gestion des crises et des conflits entres personnes et groupes, les jalousies, quête de petits pouvoirs chez certaines personnes, le mépris de certaines personnes…  Mais tous cela, on ne l’apprend pas au concrètement pendant les années de séminaire. D’où un temps d’apprentissage, surtout les premières années, pour se rendre compte de la réalité pastorale sur terrain.

Malheureusement, cette communauté va être éprouvée. Très rapidement, le jeune « bébé prêtre vicaire » paroissial va devoir affronter ces problèmes tout seul parce que son curé va mourir d’un cancer foudroyant.  Etant donné le manque de prêtres, l’évêque ne trouvant pas de curé de poigne pour prendre la suite du curé qui vient de mourir, il est bien obligé de demander au jeune vicaire d’assurer la mission de curé, ce qu’il accepte avec obéissance et dans la foi, mais avec crainte et tremblement ne se sentant pas à la hauteur du chantier pastoral qui lui est confié. Il va falloir assurer et gérer sans s’y être vraiment préparé.  Ce qui est arrivé à l’abbé Lionel arrive à beaucoup de personnes qui, dans les familles, les entreprises, les associations… on est appelé à assumer une grosse responsabilité au pied levé parce que le parent, le chef, le patron tombe malade ou décède brusquement.

C’est une situation similaire que les Apôtres de Jésus ont vécue à l’Ascension. Ils sont là, tristes, démunis et remplis des questions. La joie de la résurrection a été de très courte durée (40 jours seulement) car immédiatement après, Jésus va de nouveau les quitter physiquement, et cette fois-ci, de manière définitive. Celui qui leur était visible, qu’ils ont vu, touché, écouté, avec qui ils ont mangé, qui a fait des miracles, le rabbi charismatique qui les guidait pendant trois années de ministère public, le voilà qui s’en va et il va falloir que les apôtres apprennent à faire et à vivre sans sa présence physique. Ils doivent le rencontrer autrement et le manifester au monde à travers le témoignage de leur vie et par leur foi au quotidien.  Les apôtres ne s’y sont pas préparés et doivent s’appuyer sur sa promesse d’être toujours à leurs côtés : « Le Seigneur Jésus, après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu. Quant à eux, ils s’en allèrent proclamer partout l’Évangile. Le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient » et le Saint Esprit qu’il promet de leur envoyer.

Telle est la mission des disciples : être témoin du Christ en s’appuyant sur sa présence invisible, mais réelle et vivante. Les disciples s’appuient sur la Foi que le Ressuscité, invisible aux yeux de chair, est cependant présent et agissant par le biais du Saint Esprit. Jésus nous invite simplement à croire en lui et d’être ses témoins crédibles dans le monde. Devant la peur de la vie ou de la mission, la foi nous invite à réagir dans la confiance, ne pas rester passif, à se bouger convaincus que nous ne sommes jamais seuls dans notre vie. Même au cœur de la solitude de notre chambre, retentissent dans le cœur de chaque baptisé cette promesse et ces paroles de Jésus avant de s’en aller vers le Père : « Je suis avec toi, tu peux compter sur moi ? Si tu me fais confiance, tu peux y arriver, si tu te bouges en s’appuyant sur moi, je ne te lâcherai jamais. Fais-moi confiance !  Je vais t’envoyer un Défenseur, un avocat, le Saint Esprit ».

Avec le don du Saint Esprit à la Pentecôte, les apôtres vont passer de la peur au témoignage de la foi, de l’angoisse à la confiance d’annoncer la Bonne Nouvelle. Ils peuvent maintenant mettre en œuvre l’appel de Jésus : « Allez dans le monde entier. Proclamer l’Evangile à toute la création ».  L’Esprit Saint les rendra courageux dans la mission, affermira et purifiera leur foi. Ils passent d’une foi infantile, la foi de la facilité, celle de l’enfant qui se laisse porter par les parents, quand il se fait coucouner, chouchouter, dorloter, la foi idéaliste où nous sommes comme sur un nuage à la foi adulte et réaliste qui nous apprend à nous prendre en main, à affronter les défis de la vie humaine et de la mission en nous appuyant sur un Dieu invisible mais réellement présent.

Par le Saint Esprit reçu, Jésus nous rappelle qu’il est avec nous depuis le baptême quand nous avons été marqués du saint-chrême pour devenir demeure de Dieu et temple du Saint Esprit. Désormais, marqué du Saint Esprit, le chrétien doit pouvoir dire, comme saint Paul « ce n’est plus moi qui vis, ce n’est plus moi qui agis : c’est le Christ qui vit et agit en moi et par moi grâce au Saint Esprit qui m’a été donné ». C’est le Saint Esprit qui actualise et rend vivante et réelle la présence du Seigneur dans notre quotidien. Cette présence vivante du Ressuscité se réalise dans notre vie et dans l’Eglise à travers les sacrements que nous vivons.

A partir de ce soir, je vous invite à faire une neuvaine au Saint Esprit car neuf jours nous séparent de la Pentecôte.  Au cours de cette neuvaine, invoquons le Saint Esprit sur ceux qui vont recevoir le sacrement du baptême, sur ceux qui vont se marier, les enfants qui vivent actuellement leur à la première communion, les adultes qui vont recevoir le sacrement de confirmation…. Jésus, qui siège désormais à la droite du Père est pourtant réellement présent dans tous ces sacrements qui, reçus et vécus dans la foi, affermissent et vivifient le dynamisme missionnaire de chaque baptisé, de chaque communauté ecclésiale appelée à manifester au monde que le Christ est vraiment vivant aujourd’hui encore, jusqu’à la fin des temps, comme il nous l’a promis avant de monter aux cieux, pour siéger à la droite du Père où il est allé nous préparer une place. Amen.

Homélie du Père Joseph de l’Ascension, année B (2021)2021-05-18T18:22:52+02:00
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