Parler de la joie pascale peut sembler décalé et déconnecté de la réalité actuelle, un grand défi pour les chrétiens. Un regard réaliste sur notre monde nous plonge forcément dans la tristesse et l’angoisse : la guerre est là et, sur tous les continents, se multiplient des zones de conflits, la communauté internationale est plus que jamais divisée, même les instances internationales, comme l’ONU semblent avoir perdu toute autorité et leur crédibilité. Nous vivons dans un monde où est revenu le règne de la loi du plus fort, l’inquiétude du terrorisme est revenue, l’alerte Vigipirate est son paroxysme, avec l’attentat qui vient d’avoir lieu à Moscou, les lettres de menace-attentat dans les lycées et à l’approche des JO de Paris cet été. L’économie mondiale est en crise, le déficit public se creuse en France et toutes les solutions envisagées alimentent les divisions et les peurs. Le respect de la vie humaine est plus que menacé. Nous sommes de plus en plus inquiets de l’avenir…. La tristesse et l’angoisse sont là de manière massive ! Bref, parler et témoigner de la Joie pascale peut paraître paradoxal.

Pourtant, au matin de Pâques, le contexte n’était pas à la joie. Quand Marie-Madeleine se rend au sépulcre, il fait encore nuit ! Il y avait des ténèbres ! Elle était au pied de la croix quand Jésus est mort et elle avait assisté à son ensevelissement. Mais la mort de Jésus n’a pas fait mourir en elle l’Amour. Tous ces événements malheureux et tragiques n’ont pas fait mourir l’amour dans le cœur de Marie-Madeleine et les saintes femmes qui vont au sépulcre au matin de Pâques. C’est dans cet élan d’Amour que les femmes ont pu faire l’expérience de la joie pascale, celle du tombeau vide et de la rencontre avec Jésus ressuscité. De même, les portes verrouillées de la maison où sont cachés les disciples, les cœurs tristes et remplis de peur, n’ont pas empêché Jésus de faire irruption et de se manifester à eux.  La peur et la tristesse ont cette force négative de nous fermer à l’amour en provoquant un repli sur soi parce que nous nous sentons vulnérables, méfiants, perdus et sans défense.

Et pourtant, malgré la peur, les portes verrouillées, la culpabilité… au matin de Pâques, Jésus a fait irruption dans la vie des apôtres. Cette rencontre avec le Ressuscité a fait renaître la joie dans leurs cœurs. La joie chrétienne se fonde dans l’amour du Christ vainqueur du mal et de la mort. Tel est l’appel de saint Paul dans la lettre aux Romains : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Il n’a pas épargné son propre Fils, mais il l’a livré pour nous tous : comment pourrait-il, avec lui, ne pas nous donner tout ? Qui accusera ceux que Dieu a choisis ? Dieu est celui qui rend juste :  alors, qui pourra condamner ? Le Christ Jésus est mort ; bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu, il intercède pour nous :  alors, qui pourra nous séparer de l’amour du Christ ? la détresse ? l’angoisse ? la persécution ? la faim ? le dénuement ? le danger ? le glaive ?…. Mais, en tout cela nous sommes les grands vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés.  J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Principautés célestes, ni le présent ni l’avenir, ni les Puissances, ni les hauteurs, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur » (Rm 8, 32-39)

Pendant ces fêtes pascales, accueillons la joie du Jésus Ressuscité qui veut éclairer nos nuits ténébreuses, avec Marie-Madeleine, et faire sauter les verrous des portes barricadées et des cœurs verrouillés des disciples. Dans ce contexte de conflits, écoutons le Ressuscité qui nous dit : « la paix soit avec vous ! » (Jn.20,19), « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne. Que votre cœur ne soit pas bouleversé ni effrayé. » (Jn 14, 27). Telle est la mission que nous donne le Ressuscité : être témoins de la joie pascale, de sa paix dans un contexte où tout conduirait à la peur et à la tristesse. Joyeuses et saintes fêtes pascales.