Mes chers frères et sœurs !

Les tentations au désert méditées dimanche dernier nous ont rassuré sur le fait, Jésus a lui aussi a été soumis à la tentation, comme nous, et comme lui, que nous ne sommes pas condamnés à céder et que nous pouvons vaincre le Malin nous aussi ! Au deuxième dimanche du carême, comme chaque année, c’est la transfiguration de Jésus sur le mont Tabor que l’Eglise nous appelle à contempler. Comme les tentations au désert, le récit de la transfiguration est repris par les trois évangiles synoptiques. C’est dire son importance ! Méditer la transfiguration en carême, c’est se rappeler que le mystère de la Passion et de la Résurrection est un seul et même mystère, inséparables, que la passion de Jésus conduit à sa résurrection, et c’est cela le cœur de notre foi. Au cœur du carême, ce récit est une sorte d’anticipation, un avant-goût de la résurrection.  Il s’agit d’un appel, une invitation, sur notre chemin vers Pâques, à ne pas nous décourager mais tenir ferme.

En ce deuxième dimanche de carême, je voudrais insister sur un des piliers du temps de Carême qu’est la prière. L’évangile nous dit : « En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il gravit la montagne pour prier ». Saint Luc insiste beaucoup sur la prière de Jésus qu’il nous présente plusieurs fois en prière à certains moments clefs de sa vie.

A son baptême au Jourdain : « Comme tout le peuple se faisait baptiser et qu’après avoir été baptisé lui aussi, Jésus priait, le ciel s’ouvrit. L’Esprit Saint, sous une apparence corporelle, comme une colombe, descendit sur Jésus, et il y eut une voix venant du ciel : « Toi, tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. » (Lc 3,21-22). Rappelons-nous notre vocation et dignité sacerdotale acquise par le baptême. Cela veut dire que, par le baptême, nous sommes faits pour prier, pas seulement pour nous-mêmes, mais aussi pour les autres. En ce temps de carême, nourrissons notre baptême par une vie de prière. Nous réalisons pleinement notre vocation sacerdotale en menant une vie intime avec Jésus par la prière.

Au moment de choisir les douze apôtres, saint Luc nous présente Jésus en prière : « En ces jours-là, Jésus s’en alla dans la montagne pour prier, et il passa toute la nuit à prier Dieu. Le jour venu, il appela ses disciples et en choisit douze auxquels il donna le nom d’Apôtres » (Lc 6, 12-13). Le choix de douze est un choix important pour Jésus car il devra s’appuyer sur eux pour annoncer la Bonne nouvelle. L’enseignement que nous pouvons tirer de cet épisode est fait de ne pas prendre nos décisions sur un coup de tête, mais de nous mettre toujours à l’écoute de Dieu, à travers un discernement fait toujours dans la prière. Si nous voulons faire la volonté de Dieu, c’est dans la prière, grâce à la lumière du Saint Esprit, que nous découvrons cette volonté et recevons la grâce nécessaire pour l’accomplir. En ce temps de carême, comme Jésus, il nous est possible et bienfaisant, de prendre, comme Jésus, un temps important de prière pour lui confier notre vie et lui demander conseil, dans les grandes et petites décisions que nous sommes appelés à prendre. Une journée de récollection, de désert ou de retraite ne sera pas de trop !

A la veille de sa mort, Jésus est en prière dans le Jardin des Olivier : « Jésus sortit pour se rendre, selon son habitude, au mont des Oliviers, et ses disciples le suivirent.  Arrivé en ce lieu, il leur dit : « Priez, pour ne pas entrer en tentation. »  Puis il s’écarta à la distance d’un jet de pierre environ. S’étant mis à genoux, il priait en disant : « Père, si tu le veux, éloigne de moi cette coupe ; cependant, que soit faite non pas ma volonté, mais la tienne. » Alors, du ciel, lui apparut un ange qui le réconfortait.  Entré en agonie, Jésus priait avec plus d’insistance, et sa sueur devint comme des gouttes de sang qui tombaient sur la terre. Puis Jésus se releva de sa prière et rejoignit ses disciples qu’il trouva endormis, accablés de tristesse. Il leur dit : « Pourquoi dormez-vous ? Relevez-vous et priez, pour ne pas entrer en tentation. » (Lc 22, 39-49)

Dans ce récit, Jésus rappelle que la prière est une arme contre les tentations et contre Satan. Une vie de prière suffisante nous aide faire la vérité sur notre vie que nous regardons avec la lumière du Seigneur, pour repérer les pièges du Malin et mener le combat spirituel. Négliger sa vie de prière, c’est se fragiliser devant les tentations que nous devons quotidiennement affronter dans notre vie.

Arrêtons-nous un peu au récit de l’évangile de ce dimanche.  La transfiguration se réalise au cours de la prière : « Pendant qu’il priait, l’aspect de son visage devint autre, et son vêtement devint d’une blancheur éblouissante. Voici que deux hommes s’entretenaient avec lui : c’étaient Moïse et Élie, apparus dans la gloire » Sur le mont Tabor, Jésus a un visage lumineux, enveloppé d’un vêtement resplendissant, et entouré par Moise et Elie, c’est-à-dire, la Loi et les Prophète.

Le récit de la transfiguration est rempli de plusieurs références bibliques. La montagne est le lieu de la rencontre du Seigneur. Cela est arrivé à Moïse et Elie. Leur présence sur le mont Tabor rappelle aussi la première et ancienne alliance de Dieu avec son Peuple, une alliance stipulée par la médiation de Moïse, et dont les prophètes, représentés ici par Elie, devaient défendre, rappeler et assurer la fidélité de la part du peuple. La présence de Jésus inaugure la nouvelle et éternelle alliance qui se réalise à travers sa mort et sa résurrection. Luc nous dit en effet : « Ils parlaient de son départ qui allait s’accomplir à Jérusalem. » C’est à Jérusalem que Jésus va sceller cette nouvelle alliance à travers son don total, par son corps livré et son sang versé par amour pour nous.

Les sacrements, et tout spécialement l’eucharistie, sont les modalités par lesquelles nous entrons, vivons e actualisons cette nouvelle alliance.  Si le Seigneur nous donne la vie par le baptême, c’est dans les autres sacrements et tout particulièrement dans l’eucharistie, que cette vie divine en nous se nourrit, se construit, grandit et s’affermit. Une sorte transfiguration se réalise pour chacun de nous chaque fois que nous célébrons l’eucharistie dans la foi. Pouvons-nous interroger sur notre manière de vivre l’eucharistie ? La messe est-elle vraiment la source et le sommet de notre vie ? Si la prière est importante, la messe (l’eucharistie) est prière par excellence, la source et le sommet pour la vie chrétienne. Ne pas participer à la messe, c’est se priver de ce qui est nécessaire et indispensable pour grandir et porter du fruit. Le mariage, comme la vie de prêtre, s’arrose et s’entretient par la vie eucharistique qui permet à cet amour que nous avons dans notre cœur de pouvoir grandit chaque jour, se déployer et porter du fruit. Jésus nous dit : « sans moi, vous ne pouvez rien faire ! » et aussi « la chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson ». Sans une vie de prière nourrie, nous sommes comme des sarments asséchés parce que pas attachés à la vigne.

En ce temps de carême, demandons la grâce d’être les témoins de la grandeur extraordinaire de l’eucharistie en y participant avec foi, et en invitant nos familles, amis et proches à y prendre part. Que l’eucharistie de ce jour transfigure notre vie pour la rendre semblable à celle de Jésus qui se donne à nous et s’est totalement livré pour notre salut. Amen.