Mes chers frères et sœurs

Vous vous étonnez peut-être de l’évangile que nous venons d’écouter. Non, je ne me suis pas trompé en ne prenant pas celui selon saint Luc proposé pour l’année C.  C’est l’Eglise qui demande de prendre l’évangile de la Samaritaine quand il y a la célébration des scrutins des adultes qui se préparent au baptême. Voilà la raison de ce changement.

Nous sommes dans une culture de l’image et de l’apparence. Vous n’avez qu’à voir comment nous donnons de l’importance à notre look. Nous savons pourtant le décalage qu’il peut y avoir entre le look et l’identité profonde d’une personne. Vous pouvez croiser quelques dans la rue, et le juger selon son apparence. Ce qui compte en réalité, ce n’est pas l’image ou l’apparence, mais ce sont nos soifs profondes, celles que seul Dieu connait ou toute personne à qui nous pouvons en toute confiance ouvrir notre cœur. Dieu seul Dieu connait nos soifs profondes et lui seul est capable de les étancher.

La soif nous fait bouger naturellement. Dans nos pays occidentaux où nous avons l’eau qui coule sans arrêt de nos robinets, rivières, fleuves, nos mers et océans ; nous n’avons pas toujours conscience de ce que veut dire vraiment avoir soif. Demandez à quelqu’un qui vit dans le désert, un camp de réfugiés, qui reçoit une bouteille d’eau pour toute une semaine… Pensez à cette femme, cet homme qui fait 50 km à pied, grimpe des montagnes pour puiser quelques titres d’eau. Pensez à cette journée caniculaire pendant laquelle vous avez voyagé ou fait du sport : un verre d’eau fraiche vous a presque fait revivre…Voilà quelques éléments pour rappeler l’importance de l’eau et de la soifdans la vie. Des pays se font la guerre pour le pétrole, l’or, le diamant, le cobalt et coltan pour nos batteries de voiture électrique…. Mais récemment encore, c’est pour l’eau du Nil que des pays d’Afrique comme l’Ethiopie, le Soudan et l’Egypte voulaient se faire la guerre.

En chacun de nous, il y a une soif plus profonde que celle de l’eau. C’est celle de notre âme, celle qui fait périr le cœur lentement si nous ne rencontrons pas un autre cœur qui nous aime, qui nous aide à nous réaliser. C’est soif d’amour et de bonheur qui est en nous ! C’est la soif de Dieu à laquelle répondent ces catéchumènes que nous entourons et accompagnons particulièrement en ces semaines de carême. Ils (et nous aussi d’ailleurs) ont soif de Dieu, mais nous oublions parfois que c’est d’abord Dieu qui a soif de nous, et qu’Il nous cherche sans se fatiguer.

Dans le récit de la rencontre de Jésus avec la Samaritaine, Jésus se révèle comme ayant soif de chacun de nous. Fatigué, Jésus se rend au puits de Jacob, à Sicar, à l’heure la plus chaude de la journée, dans cette région de Samarieoù il n’était pas le bienvenu. Il a soif d’eau, mais plus encore, il a soif de la foi de cette femme qui vient puiser l’eau à une heure improbable. En effet, cette femme a peur de croiser d’autres villageois. Sa vie est tellement lamentable à ses yeux et aux yeux des autres. Elle est devenue la risée du village, condamnée à ne rester que « la femme facile » de la ville, comme en témoigne le nombre de ses ex-maris. Elle a honte de sa vie mais Dieu a soif d’elle. Il la recherche depuis longtemps parce qu’Il veut toucher son cœur.

La Samaritaine, comme nous aussi parfois, fuit sa cesse la main et le regard de ce Dieu qui vient à sa rencontre. Nous nous abreuvons souvent d’eau salée qui n’étanche pas notre soif, vagabondant, errant, comme des nomades, à la recherche des réponses aux grandes questions de notre vie tout en refusant de prendre la main tendue de Dieu qui nous cherche parce qu’il a tellement soif de nous. Nous mourrons ainsi, à petit feu, dans notre âme, sans nous rendre compte, comme celui qui risque de mourir de soif à quelques mètres d’une source d’eau potable, seulement parce qu’il n’ose pas lever les yeux pour voir Dieu qui est à côté.

Ce Dieu assoiffé nous attend, comme il a attendu cette femme, symbole de la Samarie, résidu de la gloire du Royaume du Nord d’Israël qui a été réduit à rien en 722 par Nabuchodonosor. La Samarie est devenue depuis très métissée, brassée culturellement ! Cela mettait en colère les juifs de la Judée qui ne voulaient pas un mélange des races et de culture. Ca vous fait penser à certains de nos politique qui sont triste de voir une France métissée et de plus en plus diversifiée. Le métissage est quelque chose de beau. Je pense à une chanson, « Je suis métisse, un mélange de couleur ! » d’une artiste Française ! Cependant, au niveau religieux, malheureusement, la Samarie vivait une sorte de New Age, une foi qui s’est presque prostituée, mélangée aux entre monothéisme et polythéisme babylonien, adorant tantôt Yahvé, tantôt les dieux babyloniens ! Bref ! Jésus n’a pas de frontières et va jusque dans cette terre Samaritaine, terre ennemie, à ses risques et périls.

La rencontre avec la samaritaine est problématique sur plusieurs plans. Un jeune homme juif ne pouvait adresser la parole à samaritaine, méfiance et de haine caractérisant la relation entre ces deux peuples pour des raisons historiques et religieuses. En plus, une femme n’est pas autorisée de parler en public dans cette culture. Enfin, cette femme n’a aucunement envie des avances d’un homme, tellement blessée par ses précédents amours que son cœur s’est fermé à force des blessures. La Samaritaine pense en effet que Jésus veuille lui faire la cour…

Et en effet, cette femme ne se trompe pas ! Jésus est l’Epoux tellement amoureux de nous ! Chacun de nous est l’épouse depuis le baptême ! A travers la samaritaine, le Seigneur vient reconquérir le cœur blessé et fermé de ceux qui sont assoiffés d’Amour vrai. Jésus insiste avec délicatesse, propose un dialogue, avec une méthode qui est un vrai chef d’œuvre de pédagogie d’accompagnement catéchuménal. Petit à petit, délicatement, Jésus touche le cœur de cette femme qui finit par retrouver joie et goût à la vie. La femme méfiante a posé des questions et reçu des réponses. De la soif d’eau, Jésus s’est révélé à elle comme source jaillissant d’Eau vive.  Elle a retrouvé le vrai Amour, lui faisant oublier les 4 hommes qui l’avaient successivement abandonnée.

Jésus n’a fait pas de la morale ni jugé cette femme blessée, mais l’a amené petit à petit à prendre conscience de son erreur de la vie passé qui la poussait à chercher à assouvir sa soif de bonheur et d’amour par une affectivité possessive et illusoire. Jésus n’a pas remué le couteau dans la plaie, mais il a amené la femme Samaritaine à parler de sa foi, de sa relation avec le Dieu qui étanche toutes nos soifs. Quand Dieu regarde notre passé, ce n’est pas pour nous enfermer dans nos blessures et nos erreurs, mais pour nous guérir et nous ouvrir à un avenir meilleur si nous lui ouvrons notre cœur. C’est le sens de la conversion pour les futurs baptisés. La rencontre avec Jésus nous ouvre un avenir et faisant de nous ses amis, des disciples. Jésus a rassuré la Samaritaine en se révélant progressivement à elle : « Dieu est esprit, et ceux qui l’adorent, c’est en esprit et vérité qu’ils doivent l’adorer. » La femme lui dit : « Je sais qu’il vient, le Messie, celui qu’on appelle Christ. Quand il viendra, c’est lui qui nous fera connaître toutes choses. » Jésus lui dit : « Je le suis, moi qui te parle. »

La Samaritaine, la fille fragile, la pécheresse publique, celle qui avait honte et ne voulait voir personne, la voilà qui devient une disciple missionnaire qui repart au village, la cruche vide et sans eau, mais le cœur est rempli du vrai Amour ! Elle ne peut taire ce qu’elle a vécu mais veut en témoigner à tout le monde. Celle qui fuyait les regards part à la rencontre des foules pour parler du Christ. Grâce à elle, de nombreux Samaritains deviennent croyants : « Ce n’est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons : nous-mêmes, nous l’avons entendu, et nous savons que c’est vraiment lui le Sauveur du monde ! »

 Prions pour que nos catéchumènes, appelés au baptême, qui ont fait la rencontre le Christ deviennent vraiment de disciples-missionnaires de Amour de Dieu. Prions pour eux et ceux qui les accompagnent ! Prions pour que chacun de nous reconnaisse en Jésus la Source d’Eau Vive qui étanche notre soif de bonheur. Amen.