Mes chers frères et sœurs !
Quand on regarde le fond du fond des choses, dans la vie, il y a qu’un seul combat à mener : celui entre la vie et la mort, entre vivre pleinement vivants ou alors vivre comme un mourant ou comme si l’on était déjà mort, et cela dès notre existence terrestre. Par notre manière de vivre, nous permettons que la vie soit contagieuse et se répande comme un bon virus positif, non pas comme la Covid19, mais d’une vie toujours victorieuse sur la mort sous toutes ses formes. Nous pouvons aussi permettre malheureusement que la mort se répandre dans chaque dimension de notre vie. On le voit dans ce contexte pandémique : des personnes qui, par leur courage, la foi, leur solidarité, le déploiement de la recherche scientifique, l’attention aux autres, en particulier aux plus démunis, les malades, les isolés, le respect aux mesures barrières…permettent que la vie soit toujours victorieuse. D’autres au contraire, par certaines attitudes et idéologie négatives, entretiennent une culture de la mort et lui donnent raison sur la vie.
Chers catéchumènes, depuis le début du carême, nous avons contemplé les grâces du désert avec les tentations du Seigneur ! Nous pouvons vaincre nos tentations de ce monde ! Comme nous, le Seigneur a été éprouvé mais il s’en est sorti. De même, dans notre vie, quand nous sommes accablés par toute forme d’épreuve, s’en remettre et contempler Jésus victorieux des tentations au désert nous permet de sortir plus vivants et vainqueurs de nos épreuves. Nous avons contemplé aussi la joie d’une vie transfigurée par le Seigneur comme sur le Tabor, avec Pierre, Jacques et Jean : Jésus nous dit qu’il peut changer et transfigurer nos vies si nous le laissons prendre réellement place en nous. Nous avons vu les bienfaits d’une vie assoiffée de Dieu comme la Samaritaine au bord du puits de Jacob : seul Jésus comble no soifs les plus profondes ! Il est la Source d’Eau Vive qui ne tarit jamais. Dimanche dernier, c’était la contemplation d’une vie lumineuse, libérée des ténèbres comme l’aveugle-né… ! Jésus fait de nous des créatures nouvelles grâce à la lumière de la foi.
Tous ces passages de l’évangile depuis le début du Carême nous invitent à réfléchir sur nos choix : choisissons-nous de vivre pleinement ou de mourir un peu plus chaque jour ? Un chrétien ne peut vivoter, comme nous le faisons, surtout quand viennent les épreuves, quand nous faisons face à nos fragilités, nos limites, les jugements et le sens de culpabilité imposés de l’extérieur. On l’a vu avec la Samaritaine écrasée par ces regards inquisiteurs qui la condamnaient ou l’aveugle-né vivant enfermé dans son handicap. Jésus nous appelle à prendre en main notre vie et nous libère pour vivre d’une façon plus vivante malgré nos épreuves.
Ce dimanche de votre troisième scrutin, Jésus est confronté à l’épreuve de la mort. Cet événement malheureux devient pour lui l’occasion de manifester son amour pour son ami Lazare, et pour ses sœurs Marthe et Marie ! Oui, l’amitié manifestée à ceux qui sont éprouvés par le deuil est la manifestation que la vie est plus forte, que l’amour sera toujours plus fort que la mort, que l’amour véritable est capable de faire des choses inimaginables, comme redonner la vie à quelqu’un qui est mort, ou redonner envie de vivre à quelqu’un qui pensait, à cause des épreuves, que sa vie n’avait plus de sens. C’est ce que Jésus nous apprend aux côtés de Marthe et Marie, de cette foule dans laquelle il y a des gens sincères et d’autres simplement curieux ou prêts à le dénoncer pour le condamner à mort.
En ressuscitant Lazare, Jésus signe sa condamnation à mort. Cela se passe à Béthanie. Etymologiquement, Béthanie, c’est la maison des « dattes non-mûres », la « maison du pauvre », « maison de l’affligé ». C’est dans ce village que vivent Lazare, Marthe et Marie, amis de Jésus. On lui a annoncé la mort de son ami Lazare. Marthe et Marie, malgré leur foi sont comme désespérées. Quand Jésus arrive, c’est Marthe qui sort la première pour venir à sa rencontre. Marthe est toujours agissante, toujours active, comme lorsque Jésus était venu encore manger dans leur la maison ! Marthe aime se mettre au service et aller à la rencontre des autres. Lorsqu’elle rencontre Jésus, Marthe fait une profession de foi qui sonne cependant comme un reproche : « Seigneur, si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort ! » Ce n’est pas vrai ! Même si Jésus avait été présent, il n’aurait pas empêché la mort de Lazare. Ce n’est pas parce que Jésus est présent dans notre vie, et qu’il est notre ami que nous sommes épargnés et vaccinés contre la mort, la souffrance, les épreuves de la vie. Jésus lui-même n’a pas fui devant les épreuves, la douleur et la mort. Être chrétien n’est pas un vaccin contre les épreuves. Il est donc normal cependant presque instinctif de penser que Jésus doit nous protéger, nous sauver. Evidemment qu’il le fait, mais pas toujours comme nous le pensions, pas comme nous le voulions.
A travers Marthe, Jésus nous invite à croire en lui, même au cœur de nos épreuves. Croire que sa résurrection comble, remplit et traverse déjà notre vie, qu’elle donne sens et joie à la vie présente. Marthe fait confiance. Elle essaye de comprendre même si elle ne voit pas comment cela peut bien se faire. Malgré qu’elle ne comprenne pas bien, Marthe est déjà missionnaire auprès de sa sœur Marie qu’elle va chercher ! « Marie, le Maître est là et il te cherche ! » Même si nous ne comprenons pas tout de la foi chrétienne et que nous portons en nous des questions non résolues, Jésus nous envoie en mission comme Marthe qui va annoncer à sa sœur que Jésus est là, présent, dans nos vies éprouvées. Marthe nous encourage aussi à aller, comme elle, à la rencontre de Jésus pour lui présenter nos cœurs parfois blessés par de nombreuses douleurs.
A l’appel de Marthe, Marie se lève, et avec elle, tous les voisins, amis et parents en deuil. La même scène se répète, une profession de foi mêlée à un doux reproche, comme l’avait fait Marthe : « Seigneur, si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort ! » Jésus est émue et craque de tristesse ! Jésus fond en larmes. Cet évangile a libéré mon cœur des nœuds de ma culture où on m’avait toujours dit qu’un homme doit encaisser les coups, mais ne pleure jamais. Comment ne pas pleurer, de joie comme de tristesse, alors que notre Seigneur a pleuré lui aussi ? Le Dieu en qui vous serez baptisés n’est pas impassible. Il pleure de nos douleurs et se réjouit de nos joies. Il a un cœur de chair, des tripes, et non un cœur de pierre comme les juifs qui persécutaient l’aveugle-né au lieu de se réjouir avec lui.
Jésus pleure de tristesse devant la mort de son ami Lazare. « Où l’avez-vous déposé ? » « Viens et tu verras », lui disent les gens. Trois ans auparavant, aux deux disciples de Jean-Baptiste qui lui avaient demandé « Maitre où demeures-tu », Jésus avait donné cette même réponse. Venez et vous verrez ! Ils le suivirent et virent qu’il était Dieu. A Béthanie, c’est Dieu qui voit où est la mort, et devant elle, pose un choix : celui pour la vie.
« Lazare, viens dehors ! » Jésus ressuscite la Lazare, mais il sait que ce signe accompli à Béthanie marque sa propre fin. Dans l’assistance, certains iront le dénoncer. Il accepte sa condamnation à mort et donne sa vie pour redonner vie à Lazare. C’est cela la foi chrétienne : accepter que Jésus nous sauve de la mort éternelle en donnant sa vie pour nous sur la croix.
Après avoir ressuscité Lazare, Jésus reprend son chemin vers Jérusalem où il va affronter l’épreuve de la mort par amour nous. Cependant, parce qu’il nous a aimés jusqu’au bout, il triomphera de la mort par sa résurrection. C’est cela le baptême : être plongé dans la mort avec Jésus pour ressusciter avec lui. Après sa résurrection, Lazare est mort de nouveau, je ne sais quand ! Mais pour nous, baptisés dans la mort avec le Christ, la mort n’a plus aucun pouvoir sur nous car nous sommes plongés avec Jésus dans la vie éternelle. C’est pour cela que Jésus nous invite, dès ici-bas, en raison de sa résurrection, à vivre pleinement, et à dépenser et donner notre vie pour les autres, car il n’y pas de plus grand amour que de donner sa vie pour les gens qu’on aime !