Mes chers frères et sœurs
Les disciples n’ont pas encore compris ni ce que veut dire « suivre Jésus » ni le sens du service. Ils ont encore tellement de mal à renoncé à la soif de pouvoir et leur grand besoin de reconnaissance et de gratification. Dimanche dernier nous avons contemplé cette page, tellement belle, mais paradoxalement très triste du jeune homme riche : beauté de la vie d’un jeune homme qui essaye de vivre les commandements de Dieu depuis son enfance, assoiffé de la vie éternelle. Mais quelle tristesse d’un rendez-vous d’amour manqué de ce jeune qui ne voulait pas faire le saut de la confiance parce qu’il ne pouvait pas de tout quitter pour suivre Jésus…. Outre le visage sombre de ce jeune homme riche, nous nous rappelons la réclamation de Pierre, parlant au nom des disciples qui avaient tout quitté, et la réponse rassurante de Jésus : « Pierre se mit à dire à Jésus :« Voici que nous avons tout quitté pour te suivre. » Jésus déclara : « Amen, je vous le dis : nul n’aura quitté, à cause de moi et de l’Évangile, une maison, des frères, des sœurs, une mère, un père, des enfants ou une terre sans qu’il reçoive, en ce temps déjà, le centuple : maisons, frères, sœurs, mères, enfants et terres, avec des persécutions, et, dans le monde à venir, la vie éternelle ». Ces belles paroles de Jésus n’ont pas suffi pour rassurer ses disciples.
La suite de l’évangile de Marc nous le montre avec la troisième annonce de la Passion aux disciples. Ils sont sur la route vers Jérusalem où Jésus va mourir et ressusciter. C’est sur ce chemin qui mère à Jérusalem que les disciples vont se disputer en se distribuant les postes ministériels : Marc nous dit que les disciples discutaient entres eux pour savoir qui était le plus grand parmi eux. Là encore, la réponse de Jésus rappelle le sens du service : « celui parmi vous qui veut être le plus grand, qu’il se fasse le serviteur de tous. Celui qui veut être le premier, qu’il se fasse le dernier de tous », avec l’exemple d’un enfant comme modèle. Mais là encore, cela n’a pas suffi pour que les disciples comprennent que suivre Jésus, c’est renoncer à la logique du monde, celle du pouvoir et de la domination.
L’évangile de ce dimanche nous montre avec tristesse combien les disciples étaient, comme nous tous parfois, obsédés par pouvoir. Cela nous rassure parce que, si cela est arrivé aux apôtres, il est normal que cela se passe dans nos petites communautés paroissiales aussi, où il y a parfois des quelques petites luttes de pouvoir. N’allons pas cherches les exemples, chez les politiques, avec cette période de pré-campagne électorale. N’allons pas non plus chercher dans la hiérarchie de l’Eglise chez les cardinaux et les évêques qui font profil bas actuellement avec les révélations du rapport de la CIASE.
Regardons simplement autour de nous, dans nos petites communautés où, sournoisement, malheureusement, le malin peut injecter le virus de la soif du pouvoir à travers les petits ou grands services que nous rendons à la communauté : le pouvoir pour faire les lectures à la messe le dimanche, animer les chants, la gestion des fleurs, de l’orgue, de la sacristie, l’animation de tel groupe de prière ou service…pour telle ou telle autre petite responsabilité…. Ce sont des services que nous rendons gratuitement et généreusement mais combien parfois le Malin vient les utiliser en faisant naître en nous une sorte de pouvoir,, de sorte qu’on a du mal à accepter que quelqu’un d’autre que moi puisse lire le dimanche, ou que ces taches soient remplies par d’autres personnes que nous au sein de la communauté. Rassurez-vous ! C’est normal, parce qu’il s’agit d’une attitude pleinement humaine. Réalisez que cette même tentation est arrivée à l’apôtre Jean, le mystique, le disciple bien-aimé, l’homme de l’intériorité, l’aigle qui nous a laissé le quatrième évangile. C’est arrivé à son frère Jacques…. Mais plus tard, ces deux apôtres ont donné leur vie pour le Christ. Cela veut dire qu’ils se sont convertis et ont dû abandonner l’obsession du pouvoir pour embrasser la logique du service.
L’évangéliste saint Luc est tendre avec Jacques et Jean, car il attribue cela à leur mère venue faire la requête à Jésus en voulant pistonner ses deux fils. Mais Marc souligne la responsabilité de Jean et Jacques qui vont eux-mêmes faire la demande : « En ce temps-là, Jacques et Jean, les fils de Zébédée, s’approchent de Jésus et lui disent : « Maître, ce que nous allons te demander, nous voudrions que tu le fasses pour nous » Il leur dit : « Que voulez-vous que je fasse pour vous ? » Ils lui répondirent : « Donne-nous de siéger, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, dans ta gloire ». Concrètement, la famille des Zébédée veut mettre la main sur l’Eglise, dominer les autres, les tirer par le bout du nez. Ils veulent occuper, l’un Matignon et l’autre le Quai d’Orsay.
On se serait attendu à une sorte de honte de la part des autres disciples, devant une demande aussi déplacée. Mais non, c’est la jalousie, car ils avaient tous la même envie. Ils manquaient seulement l’occasion pour l’exprimer. Jean et Jacques ont été plus malins que les dix autres qui se mettent en colère. « Les dix autres, qui avaient entendu, se mirent à s’indigner contre Jacques et Jean.» Ils nous ont été roulés dans la farine ! La guerre du pouvoir est ouverte entre les disciples. La jalousie règne en maître, et va faire ses dégâts. La recherche du pouvoir fait forcement naître de la jalousie, les rivalités. Celles-ci produisent ensuite des querelles, la haine, la rancœur, les divisions… Les disciples sont dans une guerre d’égo, et oublient l’immensité de la mission, la grande multitude de ceux qui ont faim et soif de Bonne nouvelle.
J’accueille comme une grâce pour moi et pour notre communauté les paroles du Christ recadrant les disciples et rappelant la logique de la mission de disciples : « Jésus les appela et leur dit : « Vous le savez : ceux que l’on regarde comme chefs des nations les commandent en maîtres ; les grands leur font sentir leur pouvoir. Parmi vous, il ne doit pas en être ainsi. Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur. Celui qui veut être parmi vous le premier sera l’esclave de tous : car le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude ».
Je rends grâce à Dieu pour tous ces hommes et femmes, discrets, invisible, humbles, prenant jamais le devant, mais toujours disponibles qui, discrètement et généreusement et font vivre nos paroisses, sans rien réclamer, dans un véritable esprit service. Ces petites mains servantes et discrètes, Jésus nous les présente comme modèles à imiter. Que le Seigneur donne à chaque membre de notre communauté la grâce du service pour que dans toute mission, nous soyons toujours dans la logique du service et du don de soi aux autres, à l’Eglise, au monde… en nous libérant de toute tentation de pouvoir et de domination ! Amen.