Mes chers frères et sœurs !
La Parole de Dieu de ce dimanche nous propose decontempler deux cheminements que je vais tenter de développer.
–D’abord le parcours du prophète Elie qui chemine entre triomphe et peur, jusqu’à la montagne de Dieu. Ce cheminement du prophète Elie nous enseigne qu’un discipledu Seigneur n’est jamais un héros, une superstar. Le disciplene retombe pas toujours sur ses deux pattes comme un chat mais, c’est quelqu’un qui vacille, qui souffre et tombe parfois…. voire même très souvent. Le disciple n’est pas toujours sûr de lui-même mais quelqu’un qui est habité par des doutes et des crises. Le disciple ne cherche pas à se nourrir des succès et acclamations, il n’est pas toujours « trop fort », toujours « capable » comme nous pouvons parfois l’imaginer mais le prophète comme le disciple est fragile, parfois hésitant, fatigué et qui doit sans cesse compter sur l’aide du Seigneur.
– Nous allons aussi contempler le cheminement de Dieu, en Jésus, un chemin qui n’est pas une montée pour conquérir, passer de victoire en victoire mais bien une descente et abaissement : descente pour prendre notre humanité, abaissement dans la mort, descente aux enfers comme nous le disons dans le Credo… et lui-même nous dit aujourd’hui : « Moi, je suis le pain qui est descendu du ciel. »
Le prophète Elie chemine entre triomphe et peurs, entre exaltation-gloire et dépression. Il chemine entre la Transjordanie où il est né pour aller dans le Royaume du Nord, en Samarie. Dans cette région polluée par les divinités païennes après l’exil se vit un judaïsme mélangé aux religions païennes. C’est comme tous ceux, aujourd’hui qui se disent chrétiens mais qui se font en réalité leur propre religion : un peu de magie, d’horoscope, de bouddhisme, d’islam, de protestantisme et de catholicisme…qui se font une religion à leur sauce, le New Age qu’un théologien qualifie de vagabondage spirituel. C’est dans cette région au judaïsme pollué que le prophète Elie annonce avec passion le Dieu Unique en combattant le culte de Baal.
Elie doit s’opposer au roi Acab et sa reine Jézabel qui favorisaient et sponsorisaient la diffusion de ce culte païen.Acab et Jézabel me font penser à certains responsables politiques qui combattent ouvertement l’Eglise et le christianisme en se faisant les défenseurs d’une laïcité antichrétienne, mais en en faisant la promotion de la franc-maçonnerie…
Dans la première lecture, nous avons écouté le passagequi marque la rupture entre les deux parties de la vie du prophète Elie. La première phase est triomphale parce qu’elle représente certains grands miracles et prodiges, en particulierla victoire contre les 450 prêtres de Baal exécutés par lui sur le mont Carmel ! Elie fait exécuter les prêtres de Baal et considère cela comme une victoire éclatante au nom de Dieu ! Ce massacre des prêtres païens au nom de Dieu devient en réalité pour Elie le début de la deuxième phase de sa vie qui est une chute, une crise profonde : déçu, amère, rempli de peur. Fatigué de sa mission et de vivre Elie, a peur, il se renferme et prend la fuite vers le mont Horeb, la montagne de l’Alliance, comme une sorte de retour dans le sein maternel, à la genèse de la foi au service de la Parole.
Dans cette phase difficile, Elie dit au Seigneur : Casuffit ! Prends ma vie ! J’ai perdu le goût de vivre, je suis vide et je ne sais plus me dépenser pour toi, pour rien d’ailleurs. « Maintenant, Seigneur, c’en est trop ! Reprends ma vie : je ne vaux pas mieux que mes pères. » En ce moment crise spirituelle et existentielle et de dépression, Dieu vient « toucher » Elie par l’intermédiaire d’un ange. « Mais voici qu’un ange le toucha et lui dit : « Lève-toi, et mange ! » Toucher ici, dans le langage biblique, signifie : s’approcher, caresser ou alors frapper fort : c’est important comprendreces trois significations qui veulent nous rappeler que l’intervention de Dieu dans notre vie est toujours de plusieurs niveaux : Dieu n’est pas effrayé par notre éloignement, mais il nous accompagne, nous console parfois en nous caressant et aussi, quand il le faut, Dieu nous secoue, nous frappe fortement en nous demandant de nous bouger et de nous convertir.
Par deux fois, l’ange du Seigneur est contraint de « toucher » Elie qui est presque mort de sommeil. « Lève-toi, et mange, car il est long, le chemin qui te reste. » Cela veut dire que Dieu insiste même quand nous résistons, il nous nourrit, nous secoue, nous frappe… dans le but de nous faire comprendre que le ciel n’est pas fermé au-dessus de nous. Elie désespérait de la présence de Dieu dans sa vie, mais Dieu, à travers son ange, descend des cieux à la rencontre d’Elie. Le Seigneur ne nous abandonne jamais ! Il intervient en notre faveur dans notre vie de différentes manières, en particulier à travers les amis, les frères et sœurs qui nous accompagnent, nous réconfortent, nous conseillent, nous secouent parfois en nous demandant de nous bouger, en touchant là où ça fait mal pour nous pousser à réfléchir, ceux qui nous nourrissent et nous abreuvent…. comme Il le fait avec Elie par le biais de l’ange.
Elie est remis sur pied et devient de nouveau capable de marcher, non grâce à un banquet extraordinaire, non pas un barbecue, … … mais seulement grâce une « une galette cuite et un peu d’eau » c’est-à-dire grâce à très peu de chose mais qui nous rappelle que la puissance de Dieu se déploie à travers la faiblesse, la pauvreté des moyens, dans les choses simpleset essentielles du quotidien : un peu de pain, un peu d’eau et juste un ami !
Dans la deuxième lecture, saint Paul nous propose de cheminer dans la charité, dans l’Amour. Il souligne une chosetrès importante : nous ne pouvons pas faire obstacle à l’esprit de Dieu. Nous pouvons devenir chaque jour ce messager, cet ange qui remet à pied et redonne vigueur, qui encourage lesvies pliées et blessées. Pour cela, saint Paul nous dit que nous devons faire disparaître et éliminer certaines choses : « Amertume, irritation, colère, éclats de voix ou insultes, tout cela doit être éliminé de votre vie, ainsi que toute espèce de méchanceté. » Il nous déconseille de manière explicite d’êtredes gens qui répandent du venin ou du mépris. Dans un conflit, il nous est demandé d’écouter l’autre et pas de la frapper et l’écraser avec notre supériorité vocale. S’il est interdit de blasphémer contre Dieu, saint Paul nous rappelle qu’il est aussi interdit de blasphémer contre nos frères et sœurs. Saint Paul nous donne aussi des conseils pour grandir dans la charité dans nos familles, nos communautés, avec les gens que nous côtoyons : « Soyez entre vous pleins de générosité et de tendresse. Pardonnez-vous les uns aux autres, comme Dieu vous a pardonné dans le Christ. »
Imitons le Christ en aimant ceux qui sont autour de nous,en déployant les vertus de générosité, de tendresse et de pardon ! Le chrétien est celui qui devient bienveillant parce qu’il a découvert un Dieu infiniment bienveillant envers lui. Il devient miséricordieux, capable de pardonner parce qu’il se reconnait comme premier bénéficiaire du pardon et de la miséricorde de Dieu. Bienveillant, miséricordieux, capable de pardonner ! Nous pouvons être chaque jour l’ange ou le messager, l’ami envoyé par Dieu aux frères et sœurs, pour être une présence qui ne juge pas, qui ne fait pas que sermonner les autres, un donneur des leçons, mais une présence attentive qui se fait proche, conseille et aide les autres à retrouver la force, la volonté et le désir de vivre à nouveau.
« Oui, cherchez à imiter Dieu, puisque vous êtes ses enfants bien-aimés » Le disciple est celui qui désire imiter le Maître, Jésus. C’est un maître qui fuit le spectacle, la folie de grandeur. Imiter Jésus, c’est l’écouter nous redire dans l’évangile : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde.» Demandons la grâce de devenir nous aussi, autour de nous, dans nos familles, dans la communauté, du pain vivant, du soin, de l’attention, de la gratuité, de la générosité pour les autres. Que cette eucharistie nous donne de devenir du pain, nourriture, présence, soutien, messager, ami et ange pour les autres comme celui qu’Il envoie pour sauver la vie du prophète Elie. Amen.