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Homélies des messes

Homélie du Père Joseph de la veillée pascale, année C

Chers frères et sœurs, chers Denis, Farid, Louidovine, Julien, Geoffroy, Roland, Nelly, Marc, Marie, Louis, Benoît, appelés au baptême en cette nuit sainte !

Je commence par faire ce que font les prêtres : crier sur vous qui êtes présents à la messe. Non, je ne vais pas crier sur vous, mais laissez-moi de vous rappeler un triste constat : nous tous, il nous arrive souvent de croire et de chercher encore Jésus parmi les morts, de croire en un Dieu crucifié, mort, resté enseveli et enfermé dans le tombeau qu’avait offert Joseph d’Arimathie le vendredi saint. Ca veut dire que nous vivons et agissons parfois comme si notre Dieu était bel et bien mort et jamais ressuscité. Notre relation avec lui, – parce que considéré comme mort-, se limite à quelques fêtes, comme quand on va se recueillir au cimetière de temps en temps. Nous lui rendons ainsi quelques visites à Noël, à la Toussaint, aux Rameaux, à Pâques…

Ces occasions ponctuelles sont pour nous une manière de mettre un peu d’aromates et de baume parfumé sur le corps de Jésus mort crucifié le vendredi saint, évitant ainsi que sa dépouille ne se décompose, ne pourrisse et ne dérange notre tranquillité ! Oui, j’exagère un peu, je sais ! Avouons quand même que Dieu dérange parfois notre vie. Certains chrétiens vivent comme si Jésus était une sorte de momie, comme à l’époque des pharaons, et que nos églises sont des mausolées où l’on vient de temps en temps revivre le souvenir en allumant une bougie pour ce Dieu qui, certes, a vécu parmi les hommes, mais désormais mort et absent dans notre quotidien.

Ce soir, contemplons la foi des saintes femmes qui vont compléter le rite funéraire de Jésus mis à mort le vendredi saint. Elles n’ont pas pu honorer tous les rites à cause du sabbat qui le leur interdisait. Ca m’a fait penser au temps du Covid quand nous n’avions même pas le droit d’enterrer nos morts dignement. Désespérées et résignées, ces femmes cherchent leur Maître mort injustement pour lui redonner un peu de dignité. Elle ne pouvaient imaginer un seul instant que Jésus soit vivant.

Cependant, ces amoureuses d’un Dieu mort se trompent parce que Jésus est déjà ressuscité. Il n’est plus au cimetière ! Son tombeau est vide ! Ces femmes qui représentent chacun de nous, doivent quitter, repartir, s’éloigner du tombeau, s’en aller loin de ce lieu qui rappelle la mort pour rejoindre Jésus ressuscité là où il les attendait. Elles sont venues pour un rite de mort mais elles doivent repartir comme missionnaires et annonciatrices de la Vie plus forte que la mort. Jésus Christ, le Maître que vous avez choisi de suivre par votre baptême est ressuscité et vivant. Il ne s’est pas réincarné mais il est ressuscité ! Laissons la réincarnation aux bouddhistes ! Nous, c’est la résurrection qui est au cœur de notre foi. Jésus n’est pas non plus « réanimé » pour mourir quelques années plus tard, comme Lazare contemplé lors de votre troisième scrutin. La résurrection de Jésus est cette nouveauté spécifique de la foi chrétienne et dont nous témoignons en vertu de notre baptême.

Chers Denis, Farid, Louidovine, Julien, Geoffroy, Roland, Nelly, Marc, Marie, Louis, Benoît ! Etre baptisé, c’est être totalement plongé dans la mort avec Jésus, mais pour renaître, ressusciter et revivre avec lui. Le baptême nous fait participer à la vie divine comme créatures nouvelles. Le Ressuscité se fait connaître aux disciples par des signes. Ouvrons nos cœurs à Jésus ressuscité pour voir les fruits et signes de sa résurrection dans notre quotidien, parce que la foi véritable en Jésus ressuscité change forcément notre vie concrète.

Jésus est présent dans les plaies et les blessures de notre vie personnelle, notre histoire éprouvante. Comme les saintes femmes, nous sommes souvent de disciples fragiles, désemparés, sans forces et incapables de rouler ces nombreuses pierres qui sont à l’entrée de nos tombeaux ! Nous avons tous des pierres intérieures, les épreuves, les drames vécus dans le passé, les erreurs commises dont nous trainons parfois encore les conséquences lourdes… Ces pierres représentent ce qui nous empêche de vivre en ressuscité en dépit de la foi de notre baptême. C’est lors que nous avons tous besoin, comme au matin de Pâques, de la présence de deux hommes en habits éblouissants qui nous rassurent comme au matin de Pâques : « Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ?  Il n’est pas ici, il est ressuscité. Rappelez-vous ce qu’il vous a dit quand il était encore en Galilée « Il faut que le Fils de l’homme soit livré aux mains des pécheurs, qu’il soit crucifié et que, le troisième jour, il ressuscite.’ »

Célébrer la Pâques en cette année du Jubilé de l’Espérance nous appelle tous, et vous les nouveaux baptisés en particulier, à être témoins et pèlerins d’espérance dans le monde et dans l’Eglise. Notre mission est d’annoncer un monde nouveau sur lequel brille la lumière du Ressuscité, celle que nous avons allumée en chantant l’Exultet, celle que les futurs baptisés vont recevoir tout à l’heure. C’est la lumière de l’espérance qui nous montre le chemin, nous conduit et nous éclaire même pendant nos épreuves. Les baptisés sont les disciples missionnaires de la joie et de l’espérance qui trouvent leur source dans la mort et la résurrection du Christ.

Ne soyez pas des chrétiens et des baptisés tièdes, timorés qui cachent et n’osent pas parler de leur foi, cette spécialité regrettable dans notre pays où nous manquons d’audace pour témoigner de notre foi en société. Gad Elmaleh s’étonne de voir que les juifs et les musulmans de France sont fiers de témoigner de leur foi, alors qu’on a l’impression que les catholiques s’excusent d’être croyant. Il finit sont sketch en nous appelant être fier de notre foi : Jésus a donné sa vie, il est mort pour nous et il a vaincu la mort pour notre salut. Soyons fiers !

Beaucoup attendent notre témoignage pour suivre le Christ, pour sauter le pas. Jésus veut que nous soyons des chrétiens joyeux et engagés ! Cette année, et de plus en plus, le saint Esprit nous surprend : plus de 12.000 jeunes et adultes sont baptisés en France entre la veillée pascale et le dimanche de Pâques.  A la Pentecôte le 8 juin, au MEET de Toulouse où notre archevêque nous invite, presque 1000 adultes toulousains recevront le sacrement de confirmation ! Ces gens ne viennent pas parce que l’Eglise est devenue irréprochable. On le saurait ! Pas parce les curés sont devenus des grands stratèges en évangélisation et savent attirer les gens. On le saurait aussi ! Pas non plus parce que les fidèles catholiques sont plus décomplexés ! On le saurait. Ils viennent seulement parce qu’ils ont une soif que seul Jésus peut étancher et se laissent toucher par la grâce du mystère pascal et ont trouvé en Jésus ressuscité la source de leur joie et de leur espérance.  Maintenant, il faut que nous soyons à la hauteur de l’enjeu pour permettre à ces nouveaux baptisés de trouver leur place et nous bousculer dans nos églises, nos communautés tranquilles dans la routine et les habitudes et qui ont peut des nouveautés.

Par sa résurrection, le Christ est passé de ce monde au Père pour nous ouvrir les portes du Ciel et nous donner en abondance la vie divine dans les sacrements du baptême, de l’eucharistie et de la confirmation. La résurrection n’est pas quelque chose de mathématique qui exige une adhésion intellectuelle. C’est d’abord notre cœur que veut toucher Jésus pour nous donner la grâce de la Foi, l’Espérance et l’Amour. C’est lui-même qui ouvrira ensuite vos intelligences au mystère pascal. Notre quotidien libéré, illuminé par ressuscité devient ainsi le lieu où nous posons des choix pour le bien contre le mal, la vérité contre le mensonge, l’amour contre la haine, la culture de la vie contre celle de la mort. Laissions le Ressuscité façonner notre existence.

Rendons grâce pour ces catéchumènes. Ils n’ont pas choisi un sacrement, mais une personne : Jésus Ressuscité. Nos communautés ecclésiales doivent être des lieux où ces nouveaux baptisés apprennent à vivre chrétiennement comme membres vivants du Corps du Christ. Un grand merci aux accompagnateurs, parrains et marraines qui ont été pour vous des aînés dans la Foi. Comme des enfants qui viennent de naître, ces nouveaux baptisés ont encore besoin de nous, et de toute la communauté pour grandir comme chrétiens. Cela s’apprend et demande du temps ! En Eglise-famille, laissions-les prendre leur place comme pierres vivantes et avec eux, construisons une famille belle qui rayonne, qui donne envie parce qu’elle est éclairée par la lumière du Christ Ressuscité.  Jésus ressuscité, envoie tes grâces et tes bénédictions sur chacun de nous, sur ces nouveaux baptisés, sur notre communauté ecclésiale, nos familles et notre monde. Amen

 

Homélie du Père Joseph de la veillée pascale, année C2025-04-23T10:24:58+02:00

Homélie du Père Joseph, Vendredi Saint, année C

Mes chers frères et sœurs

Nous aurions peut-être préféré nous passer du vendredi saint, de cette nuit de souffrance au Golgota… pour nous retrouver au matin de Pâques ! Certains chrétiens n’aiment pas le vendredi saint. D’ailleurs, les églises sont moins remplies qu’aux rameaux, le jeudi saint ou la veillée pascale. L’ambiance du vendredi saint est lourde et insupportable. Voir Jésus souffrir de cette manière à cause nous heurte notre sensibilité. « La multitude avait été consternée en le voyant, car il était si défiguré qu’il ne ressemblait plus à un homme ; il n’avait plus l’apparence d’un fils d’homme…, il était sans apparence ni beauté qui attire nos regards, son aspect n’avait rien pour nous plaire. Méprisé, abandonné des hommes, homme de douleurs, familier de la souffrance, il était pareil à celui devant qui on se voile la face ; et nous l’avons méprisé, compté pour rien ». C’est ainsi qu’Isaïe décrit le Serviteur souffrant. Que dire devant tant de souffrance ! Silence ! Nous n’avons rien à dire sinon pleurer sur nos péchés qu’il a portés. Après la Passion et la mort de Jésus, nous entrons dans le silence du deuil, mais le vendredi saint laisse en héritage la croix, le crucifix comme spécificité de l’identité chrétienne.

Le chrétien ne peut se passer de la croix du Christ.  Ce crucifix, nous l’avons dans nos églises, nos maisons, nous les portons autour du cou ou sur notre poitrine, nous les offrons à nos filleuls et à nos enfants. Ce soir, nous vénérons la croix ! Pourquoi ? Parce qu’elle représente l’Amour qui nous a aimé jusqu’à bout. Contemplons et adorons le Crucifié, Jésus élevé de terre, attirant à lui l’humanité entière à laquelle il ouvre largement ses bras !  A notre tour, ouvrons-lui nos bras !  Avec une infinie douceur, du haut de la croix, Jésus jette sur nous son regard et désire croiser le nôtre. Dans nos yeux, il verra ce qu’il y a dans notre cœur. Alors, ouvre ton cœur au Crucifié, montre-lui ce que tu portes et poses tes joies, tes peines, tes projets et tes angoisses au pied de la croix, avec la Sainte Vierge qui t’est donnée comme mère et le disciple bien-aimé qui te représente. De son cœur transpercé, Jésus fait jaillir sur toi l’eau et sang, symbole des sacrements qui sont cette source intarissable à travers laquelle il continue à t’abreuver et te laver.

Lorsque Jésus est arrêté dans le Jardin des Olivier, ses disciples sont plutôt impétueux, agressifs et prêts à faire l’usage d’une épée : « Or Simon-Pierre avait une épée ; il la tira, frappa le serviteur du grand prêtre et lui coupa l’oreille droite ». Ce soir, laisse Jésus te guérir de ta violence, de ta rancoeur, quels qu’en soient les causes et les responsables. Laisse Jésus purifier et protéger ton cœur par l’eau et le sang jaillissant de son Cœur transpercé.

Si les disciples sont perdus, lâches, traites, comme nous… Jésus nous rappelle que nos trahisons et nos lâchetés ne sont pas irréversibles : il a tout réparé sur la croix. Le plus important, c’est l’Amour qu’il déverse sur nous. Son Amour est infiniment plus fort que nos trahisons, nos misères et nos fragilités. Sa volonté de porter sur lui nos pauvretés est plus forte que nos propres pauvretés. Notre péché n’est rien devant l’abondance de sa miséricorde. Ta vie comme la mienne sont dans ses mains clouées qui n’ont jamais rien fait de mal, ces mains qui ont béni, nourri, purifié, touché nos lèpres, lavé nos pieds sales ! Ma destinée comme la tienne sont dans ses bras ouverts. Laissons donc Jésus crucifié prendre le contrôle de notre vie pour que nos propres douleurs, souffrances, angoisses soient portées, dépassées, vaincues et transfigurées par la puissance de l’Amour qu’il déploie la croix. Mettons-nous au pied de la croix avec la Vierge Marie, les saintes femmes et le disciple bien-aimé. Pleurons avec eux Jésus présent qui souffre et meure dans nos douleurs et nos deuils.

Au pied de la croix, nous sommes devenus les enfants de la Vierge Marie qui nous est donnée comme mère. Si Jésus nous demande de prendre soin de sa mère, rappelons-nous toujours que c’est plutôt la sainte Vierge qui prend soin de nous au quotidien. Lorsque nous pleurons, elle pleure avec nous et lorsque nous sommes dans la joie, elle chante avec nous le Magnificat. En nous mettant ensemble au pied de la croix avec elle, nous formons la grande famille des fils et filles, frères et sœurs dans le Seigneur mourant sur la croix et disciples dans l’Eglise naissant grâce à la présence du disciple bien-aimé qui reçoit Marie comme Mère.

En effet, c’est au pied de la croix, avec la Vierge Marie, que naît véritablement l’Eglise. C’est là que Marie devient la Mère de tous les nouveaux enfants, nés dans la foi du baptême. Rendons grâce pour plus de 10 000 adultes et 2000 collégiens et lycéens, et les milliers d’enfants qui seront baptisés en cette fête de Pâques en France pour faire partie cette grande famille des disciples, des frères et sœurs qui sont au pieds de la croix avec la sainte Vierge. Ce renouveau de la foi dans notre pays est la manifestation de la grâce du mystère pascal du Christ qui touche de plus en plus des personnes indépendamment de nos efforts et stratégies pastorales, pour devenir membres du Corps du Christ.

En ce temps difficile que traverse notre monde, restons au pied de la croix comme pèlerins de l’Espérance de la résurrection. Restons-là avec tous les crucifiés de notre temps dont Jésus a porté la souffrance. En effet, Jésus est encore crucifié dans beaucoup de visages autour de nous ! Il suffit d’ouvrir nos yeux, nos oreilles et notre cœur pour s’en apercevoir !

Allons-nous nous laisser déshabiller de notre orgueil par lequel nous cachons notre peur, nos fragilités, nos angoisses ? Permettons à la sainte Vierge, Notre-Dame des Douleurs, qui a recueilli Jésus dans ses bras, de nous prendre aussi sur ses genoux, de pleurer sur nous en versant sur nous ses larmes de tendresse maternelle, de nous couvrir, comme Jésus, d’un suaire de tendresse et de miséricorde ! Elle nous obtiendra la grâce d’être des enfants nouveaux, ressuscités à la vie nouvelle avec Jésus au matin de Pâques. Restons avec la Vierge Marie, en silence, pleurant nos misères, dépouillés de nous-mêmes, mais confiants et pleins d’Espérance grâce à l’Amour qui se livre sur la croix, et qui sortira vivant et victorieux du tombeau au matin de Pâques. Amen.

 

Homélie du Père Joseph, Vendredi Saint, année C2025-04-23T10:22:15+02:00

Homélie du Père Joseph, Jeudi Saint, année C

Chers frères et sœurs

Je ne sais pas si vous vous en rappelez, mais le jour de la Nativité, c’est-à-dire le 25 décembre au cours de la messe, l’évangile qui est proposé est le « Prologue de l’évangile selon Jean », c’est-à-dire les premiers versets même si les exégètes précisent unanimement que cette partie a été ajoutée plus tard après la rédaction du reste de l’évangile. Saint Jean commence par le récit de Jean le Baptiste au bord du Jourdain et ses disciples le quittent pour suivre Jésus. « Alors Jean rendit ce témoignage : « J’ai vu l’Esprit descendre du ciel comme une colombe et il demeura sur lui. Et moi, je ne le connaissais pas, mais celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau m’a dit : “Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et demeurer, celui-là baptise dans l’Esprit Saint. Moi, j’ai vu, et je rends témoignage : c’est lui le Fils de Dieu. »  Le lendemain encore, Jean se trouvait là avec deux de ses disciples.  Posant son regard sur Jésus qui allait et venait, il dit : « Voici l’Agneau de Dieu. » Les deux disciples entendirent ce qu’il disait, et ils suivirent Jésus. Se retournant, Jésus vit qu’ils le suivaient, et leur dit : « Que cherchez-vous ? » Ils lui répondirent : « Rabbi – ce qui veut dire : Maître –, où demeures-tu ? » (Jn1,32-38 »

Que cherchez-vous dans votre vie ? C’est la question des toutes les questions que nous pose Jésus ? Saint Jean, le disciple bien-aimé qui resta au pieds de la croix, celui qui posait sa tête sur le cœur de Jésus au cours de la dernière Cène, nous conduit à travers son évangile pour répondre à cette question qui trouve sa réponse lors de la dernière Cène, celle-ci anticipant ce qui se passe le vendredi et au matin de Pâques. La chose la plus importante que nous cherchons tous dans notre vie, c’est l’amour qui comble notre cœur. Saint Jean nous rappelle qu’au cœur de la Cène, il y a le témoignage de l’Amour infini de Jésus pour nous.  « Avant la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout. » Jésus nous a aimé jusqu’au bout et aucun amour, en dehors du sien, ne peut combler notre cœur de manière définitive. Mais il faut y croire et se laisser faire par lui, le laisser nous aimer comme il veut. Jésus est le mendiant qui nous supplie de lui ouvrir notre cœur afin de le remplir e son Amour.

Comme nous le savons, l’amour n’est pas de la théorie, un concept, des paroles. Chacun de nous est en quête de cet amour qui se donne à nous, un amour qui se concrétise dans des gestes, et pas que nous pouvons déclamer à longueur des journées mais qui se volatilise lorsque l’épreuve se présente. Saint Jean nous dit : « Voici comment nous avons reconnu l’amour : lui, Jésus, a donné sa vie pour nous. Nous aussi, nous devons donner notre vie pour nos frères. Celui qui a de quoi vivre en ce monde, s’il voit son frère dans le besoin sans faire preuve de compassion, comment l’amour de Dieu pourrait-il demeurer en lui ? Petits enfants, n’aimons pas en paroles ni par des discours, mais par des actes et en vérité. » (1Jn 3, 16-18). Koffi Olomide, un chanteur congolais dit que l’amour n’existe pas, et qu’il n’y a que des preuves d’amour. Et nous nous savons que Jésus nous a dit qu’il nous aime par ses paroles, mais il nous le montre aussi par les gestes concrets de sa vie qui trouvent leur point culminant dans le mystère pascal qui commence lors de la dernière Cène.

Imaginons un le scénario de la dernière Cène. Les apôtres sont arrivés au cénacle après une journée de marche où ils ont sillonné la ville de Jérusalem où ils sont venus célébrer la Pâques juive. « Arriva le jour des pains sans levain, où il fallait immoler l’agneau pascal. Jésus envoya Pierre et Jean, en leur disant : « Allez faire les préparatifs pour que nous mangions la Pâque. »  Ils lui dirent : « Où veux-tu que nous fassions les préparatifs ? » Jésus leur répondit : « Voici : quand vous entrerez en ville, un homme portant une cruche d’eau viendra à votre rencontre ; suivez-le dans la maison où il pénétrera.  Vous direz au propriétaire de la maison : “Le maître te fait dire : Où est la salle où je pourrai manger la Pâque avec mes disciples ?” Cet homme vous indiquera, à l’étage, une grande pièce aménagée. Faites-y les préparatifs. » (Lc 23, 7-12)

Le soir venu, Jésus réunit tous ses disciples sans exception. Jésus réunissait souvent ses disciples pour qu’ils se reposent après des journées de mission. Mais ce soir, il y autre chose. Ces galiléens sont heureux d’être à Jérusalem comme des provinciaux heureux d’être à Paris, et qui se retrouvent après avoir visité la cathédrale Notre-Dame nouvellement reconstruite. Mais la joie laisse bientôt place à l’étonnement quand Jésus enfile un tablier, une bassine d’eau pour laver les pieds de ses disciples, un geste inattendu. Le messie qu’ils ont annoncé toute la journée dans les rues et sur les places publiques de Jérusalem, le voici à genou pour laver les pieds des disciples. Il y a aussi Juda Iscarioth, le traitre. Etait-il embarrassé sachant le coup qu’il avait déjà préparé contre Jésus ? Un exégète dit que le geste du lavement des pieds a conforté Judas dans son projet parce qu’en fait, devant lui, lavant ses pieds, s’est présenté quelqu’un qui voulait vivre, non pas comme le Maître mais comme une esclave. « Comprenez-vous ce que je viens de faire pour vous ? Vous m’appelez “Maître” et “Seigneur”, et vous avez raison, car vraiment je le suis. Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. »

Je pense à l’embarras des disciples en présentant leurs pieds sales et qui sentaient mauvais. Un, deux, quatre, vingt, vingt-quatre… Tous les pieds sont lavés, un à un. Simon Pierre a voulu résister mais Jésus l’invite à se laisser faire. Tu ne sauras pas aimer les autres si tu ne me laisser pas t’aimer en premier. Tu ne sauras pas rendre service aux autres si tu ne laisses pas Dieu se mettre à ton service. C’est seulement après avoir fait l’expérience de l’amour véritable que tu pourras en témoigner. Nous ne pouvons véritablement témoigner que de ce que nous avons réellement vécu, et nous ne pouvons pas donner de l’amour que si nous en avons reçu un peu dans notre cœur. Nous ne pouvons accepter la fragilité des autres, leurs pieds sales et qui sentent mauvais que si nous avons accepté en premier que Jésus touche à nos propres fragilités et nos pieds sales. Sinon, nous restons sans pitié envers les autres.

Saint Jean ne nous explique pas l’institution de l’eucharistie, mais nous offre le cadre dans lequel cette dernière nous est donnée par le Christ : trahisons et service forment le cadre de la dernière Cène. L’eucharistie est manifestation l’abondance de l’amour que Dieu déverse sur nous qui malgré nos trahisons comme Judas et devient ainsi le moteur qui nous pousse à aller à la rencontre de nos frères et sœurs. Chaque fois que nous célébrons l’eucharistie, nous sommes plongés dans l’Amour et appelés à aimer à notre tour concrètement dans le quotidien. C’est pour cela que le concile Vatican II appelle l’eucharistie la source et le sommet de la vie chrétienne, source où nous nous abreuvons, sommet où nous portons nos vies fatiguées par le quotidien où nous n’avons cessé de nous donner les uns aux autres.

Ce soir demandons au Seigneur une grâce : celle de vaincre la dimension routinière de l’eucharistie ! Chaque eucharistie, chaque messe est un don sublime qui nous fait revivre le mystère pascal du Christ. Que le Seigneur nous nous rende capables de vivre chaque eucharistie avec émerveillement en nous plongeant dans cette nouveauté surprenante de l’intimité avec un Dieu fait homme par amour pour nous et qui nous a aimés jusqu’au bout.

 

Homélie du Père Joseph, Jeudi Saint, année C2025-04-23T10:22:05+02:00

Homélie du Père Joseph, dimanche des Rameaux, année C

Mes chers frères et sœurs

Nous arrivons au cœur du message de l’évangile : la passion et la mort de Jésus. Les évangiles peuvent être considérés comme un récit de la passion qui est précédé par une très longue introduction de tout ce que Jésus a fait et qui trouve son point culminant dans les mystères que nous contemplons en cette semaine sainte. La passion selon saint Luc est moins dramatique par rapport aux autres évangélistes. Il est moins violent et moins scandaleux, malgré cette souffrance nécessaire vécue avec paix intérieure et dans la confiance. Saint Luc attenue les éléments plus durs et fait entrevoir tendresse et miséricorde : les disciples ne fuient pas mais s’endorment parce que très fatigués et tristes, un ange console Jésus dans le jardin de Gethsémani. Pas de témoins accusateurs. Pilate tente à plusieurs reprises de relâcher Jésus, reconnaissant son innocence, les femmes de Jérusalem sont tristes et pleurent, le peuple est ému et même un de deux malfaiteurs crucifiés avec Jésus témoigne de sa bonté (le bon larron).  Seul saint Luc rapporte un geste : Jésus déjà arrêté guérit cependant l’oreille d’un serviteur blessé par un des disciples. Jésus reste profondément attentionné, capable de compassion, de pardon et de compréhension même envers ceux qui qui le persécutent.

Contemplons donc le « spectacle de la croix », « spectacle de l’amour » des dernières heures, chargées de silence, de peur, de douleur et de trahison. Jésus ne subit pas la mort : il l’embrasse librement en s’offrant soi-même jusqu’à la mort, comme expression suprême de son Amour.

Quelques contradictions sont racontées dans le récit la Passion. La foule enthousiaste qui accueille triomphalement Jésus en chantant « Béni soit celui qui vient, le Roi, au nom du Seigneur. Paix dans le ciel et gloire au plus haut des cieux ! » (Lc 19, 37), est la même qui criera « crucifie-le ». Pierre dit d’être prêt à sacrifier sa vie pour le Seigneur, mais le reniera devant la question d’une simple servante. Les disciples qui étaient avec lui nuit et jour depuis trois ans, mais au moment le plus douloureux du Maître, certains s’endorment et d’autres s’enfuient. Ne parlons même pas de Judas.

Lorsque nous sommes devant le spectacle de la passion du Christ, ne cherchons pas à y trouver des bons et de mauvais. Cherchons plutôt notre propre présence, avec nos lumières et nos ombres. Nous sommes les disciples qui choisissons parfois de rester avec Jésus, parfois nous préférons de prendre la fuite, de temps en temps nous le trahissons, nous choisissons avec Pilate de le crucifier hors de Jérusalem, c’est-à-dire, en le mettant hors de nos vies. La passion du Christ raconte notre propre histoire à travers celle des disciples autour de Jésus.

La Passion est un spectacle d’amour, de la passion de Dieu pour l’homme. Le corps défiguré de Jésus révèle le visage défiguré de Dieu qui subit les humiliations et la torture par amour pour toi. Veux-tu vraiment de ce Dieu défiguré, un Dieu qui ne résout pas les problèmes, qui lave les pieds sales de ceux qui sont sur le point de le trahir, qui n’élimine pas la douleur mais la partage, qui ne nous sauve pas de la souffrance mais par et dans sa souffrance, qui ne nous sauve pas de la mort mais dans et par sa mort, qui meurt comme un chien. Veux-tu de ce Dieu qui souffre ?

Les guérisons, les miracles, avoir donné du pain à plus de 5000 personnes, tout ça n’a pas empêché sa condamnation à mort. Jésus monte au Calvaire au milieu de cette foule distraite, son visage couvert de sang cherche désespérément à apercevoir, sous la couronne d’épine, l’un de ses douze amis. En vain. Ils ont eu peur et n’avaient pas compris que Dieu tout-puissant seulement dans son Amour.  Sur le chemin, Jésus n’y arrive plus. Un étranger Simon de Cyrène est chargé de sa croix. Arrivé au Lieu-dit Le Crane (Calvaire) Jésus est crucifié avec ces longs clous de 20cm. Ici se termine l’histoire de Jésus de Nazareth. Satan revient pour la dernière tentation. « N’es-tu pas le Christ ? Sauve-toi toi-même et nous avec ! ». Mais il reste là parce que la croix est la révélation définitive de la nature de l’Amour. Elle nous rappelle que Dieu a pris subi et embrasse le mal et la mort par amour pour nous. Sa dernière parole est une confiance au Père : « Père, entre tes mains je remets mon esprit » et puis le silence.

Les choses devaient-elles se terminer ainsi, avec la victoire du plus fort et la défaite du plus faible ? La fermeture du tombeau semble ensevelir aussi les espérances que Jésus avait allumées dans les cœurs des disciples qui ont oublié que l’Amour ne peut pourrir dans un tombeau. Ce n’est pas la souffrance qui nous a sauvé, mais l’Amour du Crucifié donné jusqu’au bout, jusqu’à la mort. Devant le crucifié nous ne nous exclamons pas « comme il a tant souffert » mais bien « comme il nous a tant aimé ! ». Comme dit saint Paul aux Galates, « Jésus m’a aimé et s’est donné pour moi ». La croix n’est pas le signe de la souffrance de Dieu mais signe de son amour, de sa passion pour nous.

En cette semaine sainte, assieds-toi, arrêtes-toi, contemple et admires ce spectacle de la passion amoureuse de Dieu pour toi. Si pendant le carême, tu as été protagoniste et acteur par la prière, le partage et le pardon donné et reçu, pendant la semaine sainte, rappelle-toi que c’est Jésus le protagoniste principal. C’est lui qu’il faut regarder. Ne te demande pas ce que tu peux faire pour lui, mais émerveille-toi de ce que fait et a fait pour toi, pour nous.

Cherche ta place et ton rôle ! Un spectacle est toujours fait par des acteurs et protagonistes. Quel personnage es-tu dans le spectacle ? Il se peut que tu te retrouves parmi les disciples qui ont peur, qui ont fui, ou en Judas qui trahi, ou en Simon Pierre qui renie, ou centurion romain qui reconnaît que Jésus est un homme juste, ou alors les femmes au pied de la croix. Contemple en silence et trouve ta place dans ce tableau. Nous y sommes tous. Ne réfléchis pas mais ouvre surtout ton cœur à l’Amour qui se donne pour toi sur la croix et dans la mort. Cet Amour triomphera au matin de Pâques car l’Amour est plus fort que la mort. Merci Seigneur de nous donner un tel amour. Amen.

 

Homélie du Père Joseph, dimanche des Rameaux, année C2025-04-10T11:50:10+02:00

Homélie du Père Joseph, Ve dimanche de carême, année C

Mes chers frères et sœurs !

Le Carême est un appel au changement de vie, mais nous savons que nous avons besoin de toute notre vie pour nous convertir. Chaque jour qui passe est un appel à changer de vie et à accueillir la lumière. La conversion dont nous avons besoin, c’est l’appel à purifier l’idée parfois approximative, limitée que nous avons de Dieu. Même nous les catholiques pratiquants et disciples de longue date. La conversion, c’est aussi oser aimer à la mesure de Dieu qui, comme un père plein d’amour, fait la fête quand il voit son fils perdu revenir à la maison. La conversion, c’est imiter la mesure sans mesure de ce Dieu grand et fou d’amour pour nous et qui ne se fatigue jamais de nous chercher. Nous pouvons comparer Dieu à un GPS : quand nous nous sommes trompés de route parce que n’avons pas suivi l’itinéraire qu’il nous a proposé au départ, le GPS réinitialise et recalcule le trajet pour nous proposer un autre itinéraire qui nous conduit à notre destination. De même, Dieu réinitialise sans cesse et ne se fatigue jamais de nous chercher pour nous conduire au salut.

Après le beau récit du père prodigue avec ses deux fils sans amour de dimanche dernier, saint Luc nous propose aujourd’hui une des plus belles paraboles de la miséricorde et de la tendresse divine.  Saint Augustin note que cette parabole est tellement choquante, forte et paradoxale au point que les premiers chrétiens l’avaient presque effacée des textes et de leur mémoire. C’est l’histoire d’une femme adultère, dont nous ne savons pas le nom, prise en flagrance mais pardonnée sans condition. Pour ses accusateurs, elle est identifiée comme étant une pécheresse, une prostituée. Est-elle fiancée, mariée, heureuse, malheureuse dans sa vie personnelle ? Rien de sa vie n’intéresse ses délateurs prêts à l’exécuter au nom de Dieu et du respect de la Loi de Moïse. Remarquons aussi l’absence des témoins et de l’amant.

La Loi dit pourtant expressément qu’une personne peut être accusée d’adultère à la présence de deux témoins. Où sont-ils et qui sont-ils ?  Et l’amant, personne ne demande ne demande de le voir. Leur a-t-il échappé ? lui est-il réservé un autre sort en tant qu’homme ? L’’évangile ne dit rien. Ces justiciers de Dieu veulent tout simplement la peau de la femme. Point.

La tension est à son paroxysme. La Loi de Moïse, brandie comme une arme, n’est même pas respectée par ceux qui prétendent la faire respecter avec cynisme et hypocrisie On le voit avec le contexte géopolitique : derrière des raisons nobles se cachent parfois des sentiments mesquins. Parfois on parle de la défense de la démocratie, la paix, alors que derrière, on veut défendre les intérêts économiques ou stratégiques.

La femme est jetée par terre, au centre des cris et de la rage de la foule. Parfois on cherche à être au centre de l’attention pour recevoir la gloire. Mais il y a des moments où être à la une de l’actualité, au centre de l’attention est un véritable enfer. Ici, elle est au centre, couchée par terre, devant ses juges qui l’ont déjà condamnée.

Jésus est appelé à exprimer son opinion en tant que rabbi ! A quoi bon, parce qu’elle est déjà jugée et condamnée.  Jésus a compris que c’est un piège : si Jésus dit qu’il ne faut pas la lapider, il s’opposerait à la Loi de Moïse, ce qui est condamnable. S’il ordonne de la lapider, il contredit la loi romaine qui demande un procès : dans ce cas, Jésus ferait ainsi partie de tous les rebelles qui s’opposent à Rome. Pire encore, cela serait un démenti à sa vision d’un Dieu bon et miséricordieux.

La foule est folle de rage, manipulée par ceux qui veulent la condamnation de Jésus ce monsieur qui s’est improvisé prophète, rassemblant de plus en plus des foules et fréquentant des publicains, des pécheurs, des prostituées comme cette femme adultère.

Jésus s’abaisse et trace des signes par terre avec son doigt. Il se sait piégé. Il se tait et essaye de réfléchir contrairement à cette foule n’a pas manipulée.  Jésus fait de gribouille.  Dans la tradition sémitique, faire de gribouille était une façon de rassembler ses idées et contenir ses émotions. Jésus reste assis mais lève son regard. Sa réponse est devenue illustre, même pour les non croyants : « Que celui parmi vous qui n’a jamais péché lui jette la première pierre ». Certes, cette femme a péché. C’est évidement. Personne ne peut le nier. Mais qui parmi nous n’a jamais commis de péché ? Cette question est vraie raclée aux accusateurs ! Jésus ne nie pas la validité de la loi et ne justifie pas que l’adultère soit quelque chose de bien ! Il va au-delà, à la source, à l’origine de la Loi faite le bien et la vie de l’homme, non pour l’opprimer. C’est vrai que cette femme a péché, mais elle a une histoire, un nom, une dignité, même la dignité de se tromper, de se racheter, de se convertir, de devenir meilleure. Jésus appelle à faire la distinction entre le péché et le pécheur, chose que les accusateurs n’arrivent pas faire.

Jésus met aussi dans le jugement une variable inattendue pour les accusateurs : la miséricorde, cette attitude typique de Dieu qui regarde notre misère avec son cœur. Oui, cette femme a péché, mais nous sommes tous pécheurs et valons plus que notre péché. C’est pour cela que l’Eglise est contre la peine de mort. Cette femme a bien péché, mais elle ne doit pas être clouée et identifiée à ses limites qu’elle peut changer si elle voit une autre issue. « Il se redressa et lui demanda :« Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? » Elle répondit : « Personne, Seigneur. » Et Jésus lui dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. »

Jésus a pardonné cette femme, comme il me pardonne aussi. Son pardon accordé m’appelle à la conversion, au changement de vie, à la conversion. Dieu nous appelle à faire de même. Nous pouvons aussi changer et devenir miséricordieux comme notre Père ! Nous pouvons aimer parce que nous sommes aimés de Dieu, pardonner parce que bénéficiaires de la miséricorde de Dieu. A l’approche des fêtes pascales, approchons-nous du cœur miséricordieux du Christ qui nous sauve, nous pardonne et nous appelle la conversion.

 

Homélie du Père Joseph, Ve dimanche de carême, année C2025-04-04T16:25:02+02:00

Homélie du Père Joseph, IVe dimanche de carême, année C

Chers frères et sœurs

Le contexte mondial nous rappelle combien la paix est vitale. Nous sommes en guerre, sur tous les plans : politique, économique, militaire…., même avec ceux qui étaient jadis nos amis. Rappelons-nous cependant que les grandes guerres, quelles qu’elles soient, sont d’abord la conséquence du petit dictateur que chacun de nous porte dans son cœur. Pour convertir notre cœur, devenir artisan de paix, il nous faut d’abord être pacifié en nous-même et avec nous-même. Il nous faut aussi convertir l’idée horrible du Dieu que nous portons parfois dans notre cœur. Pas un Dieu qui bénit les armées, qui envoie les soldats à tuer des pauvres civils innocents, dont le seul tort est d’être différents ou de ne pas partager nos opinions politiques ou religieuses. La paix du cœur naît de l’amour, du fait de se savoir aimés et capables d’aimer, là où les autres, le père, le frère, la sœur, ne sont pas des adversaires dont nous avons peur (et toujours pour des questions matérielles, le fameux héritage) mais tous enfants de Dieu malgré nos différences.

Les deux fils de la parabole ont une très mauvaise idée du Père ! Je parle de tous les deux. Le plus jeune, dévergondé, pense que Dieu soit un concurrent, un adversaire : si Dieu existe, je ne peux pas me réaliser, pense-t-il. « Je lui demande mon dû, ce qu’il me doit et qui m’appartient » (et puis dites-moi depuis quand un père doit un héritage à son fils). Il demande l’héritage par anticipation : ce qui veut dire, dans toutes les cultures, souhaiter la mort de son père. Il est tellement avide d’argent qu’il trouve que la seule et unique solution est d’espérer la mort de son père. J’ai rendu visite à une personne âgée qui m’avait dit littéralement : mon fils et ma belle-fille (qui ne me rendent quasiment jamais visite n’attendent que ma mort pour prendre mes biens ! Si nous sommes honnêtes, nous savons aussi que parfois nous prenons Dieu comme l’ennemi ! Non, Dieu ne veut que notre bien et personne ne veut notre bonheur plus que lui. Il a donné sa vie pour nous ! Alors, ne cherchons pas à le lui comme le fils cadet ! Ouvrons-lui nos cœurs car il ne veut que notre bien car il est ontologiquement incapable du mal !

Le fils cadet veut poser de la distance avec son père, se couper de ses racines, effacer le passé qui fait partie intégrante de ce qu’il est devenu, et de ce qu’il peut encore devenir. Il part et prend le large pour être libre, pense-t-il ! Il commence la belle vie ! Il se rend compte rapidement que l’argent dure très peu, surtout lorsqu’on ne fait que le dépenser. Il s’aperçoit aussi d’une chose dont nous devrions tous être conscients : si nous n’investissons que dans les choses matérielles et les jouissances, nous ne réussirons pas à combler notre cœur. Finie l’euphorie, la famine arrive. L’argent qui lui aurait servi à vivre l’a plongé dans la misère. Il n’a même rien à manger.

Il est dans la mouise ! Il lui faut du boulot pour se nourrir. Alors, il part se faire embaucher chez un inconnu. Il a honte de sa vie. La bande d’amis avec qui il faisait la fête a disparu. Il n’a plus personne autour de lui. Le prince de la fiesta, de la bringue est dans la mouise, le roi est rétrogradé à moins qu’un esclave. Il doit garder les porcs, l’animal impur par excellence dans le judaïsme. Il souffre de faim et n’a même pas droit de manger les gousses des porcs ! Sa vie et sa mort importent peu à son patron. La misère finit par dégeler son cerveau qui peut à nouveau commencer à réfléchir. Ce n’est pas l’amour pour le père qui le fait bouger mais son ventre vide qui souffre. Même dans sa stratégie, faire semblant de se repentir, se proposer à son père comme ouvrier (en sachant que son père n’accepterait pas cette humiliation qui déshonore la famille)…tout ceci montre qu’il n’a rien compris de son père. En fait, il ne s’est pas repenti mais se met en chemin.

Il revient à la maison, contre son gré, la peur au ventre. Et voilà que quelque chose d’inattendu s’opère : le père l’attendait et va à sa rencontre ! Un père qui courre est inimaginable, surtout dans la tradition orientale ! Normalement, le père devait rester ferme, fièrement debout et attendre des gestes d’humilité de son fils. Mais il coure à sa rencontre et l’embrasse. Alors, ce fils dévergondé commence son baratin d’excuses qu’il a tellement répété mille fois en cours de route. Il a bien aiguisé les paroles, pesé chaque mot, vérifié le ton de sa voix ! Bref, un personnage de théâtre déclamant toutes les bonnes raisons pour être admis de nouveau. Le père l’interrompt ! Pas d’excuses ! Pas la peine ! Peu importe ! Il sait que son fils n’est pas encore prêt et n’est pas du tout repenti. Mais il lui redonne sa dignité symbolisée par l’anneau, l’alliance qui est le seau de la famille, les sandales aux pieds et bel habit de fête. Le pardon n’est pas la prime accordée à notre pénitence, comme nous le pensons parfois. Le père donne le pardon sans condition, en espérant que son geste convertisse enfin le cœur du fils et pour susciter sa conversion.

Fatigué, le fils aîné revient du travail ! Il est blessé et furieux de voir cette fête que le père improvise pour honorer son frère cadet. Comment lui donner tort ? Humainement, il a complétement raison. Il trouve injuste que son père ait accueilli l’autre fils, qu’il n’ose plus appelle « frère » (« ton fils que voici », dit-il à son père, après que ce dernier ait dépensé sa part d’héritage avec les prostituées, – un détail qu’il ajoute pour enfoncer son petit frère alors qu’il ne pouvait pas le savoir, étant donné qu’il n’avait de ses nouvelles). Le père essaye de lui expliquer les raisons de la fête : son frère était mort, il est revenu à la vie, il était perdu, il est retrouvé. Le fait que ce dernier revienne vivant est suffisant pour faire la fête. Le père supplie l’aîné et le prie d’entrer. Et puis ?  Il n’y a pas de happy end comme dans les films romantiques.  L’évangéliste saint Luc s’arrête là. Il ne nous dit pas si le fils aîné est entré faire la fête, si le fils cadet s’est vraiment converti, si les deux frères se sont retrouvés heureux autour de leur père. Rien !  La parabole reste ouverte, sans solution facile, sans faire du moralisme !

Tu peux rester avec le Père sans le voir, travailler avec lui sans t’en réjouir, ça dépend de toi que ta foi ne soit qu’une observance et respect des lois et rites, mais sans amour, sans joie envers Dieu et envers les autres. Notre Dieu nous considère comme adultes et libres. Il nous décider sans interférer dans nos choix de vie. La foi est un don, une vertu théologale, mais c’est aussi un choix : il nous appartient de choisir en quel Dieu nous croyons. Croyons-nous en un Dieu qui nous empêche d’être heureux, comme le fils cadet ? Dans ce cas, nous ne sommes pas vraiment libres et heureux, et c’est très dommage ! Croyons-nous en un Dieu patron sévère dont nous avons peur et devant qui nous nous comportons comme des simples ouvriers ? C’est dommage. En chacun de nous se cache à la fois le fils cadet comme le fils aîné. En ce dimanche de la joie, ouvrons-nous nos cœurs au père qui nous appelle au vrai bonheur et nous donne son amour sans compter, connaissant l’étroitesse de notre cœur. La vraie foi est un appel à la joie parfaite, à la fête, à nous accueillir les uns les autres comme frères et sœurs malgré nos différences…. Mais la décision nous appartient, parce que Dieu nous laisse paradoxalement libres. Seigneur, en ce temps de carême, touche nos cœurs, apprends-nous la vraie liberté et ouvre nos cœur à la Joie de ton Amour. Amen.

 

 

Homélie du Père Joseph, IVe dimanche de carême, année C2025-04-10T11:50:53+02:00

Homélie du Père Clément, IIIe dimanche de carême, année C

 « Un cœur lucide et un Dieu patient »

Frères et sœurs bien-aimés,

Un jour, alors que Thérèse se rendait au Carmel avec sa sœur Céline, elles croisent un homme enchaîné, conduit en prison. Ce criminel, menotté, avait commis un crime grave (on suppose un meurtre), et sa physionomie frappante la bouleverse.

Thérèse écrit : « Un jour, en allant au Carmel, nous avons rencontré un pauvre criminel conduit en prison. Céline croyait que je détournerais la tête, mais ce n’est pas ce que j’ai fait. J’ai regardé fixement ce malheureux. Je voulais voir le regard d’un homme qui avait commis un crime mortel. Je priais pour lui de tout mon cœur, sentant que sans la grâce divine, j’aurais pu tomber aussi bas que lui, je me sentais capable de tout le mal. »

Ce regard qu’elle pose sans jugement, mais avec compassion et une grande lucidité sur la misère humaine et sur sa propre faiblesse, reflète l’humilité radicale de Thérèse et sa conscience vive de la miséricorde divine.

Le Carême avance, et la Parole de Dieu vient aujourd’hui nous toucher là où nous sommes : au cœur de notre vie quotidienne, marquée par des drames, des questions, des lenteurs, des stérilités parfois… mais aussi habitée par la grâce, la patience, et l’appel à la conversion.

Et si tout cela était une parole de Dieu pour nous ?
Et si les accidents, les événements troublants, et même les apparentes stérilités de notre cœur, étaient des invitations à nous réveiller intérieurement ?
C’est ce que Jésus nous enseigne dans l’Évangile, en deux temps très percutants.

  1. Face aux catastrophes : l’appel à la vigilance et à la lucidité (Lc 13,1-5)

Jésus est interpellé sur deux tragédies :
un massacre sanglant (Pilate tuant des Galiléens),
– et un accident mortel (la chute de la tour de Siloé).

Et sa réponse est surprenante :« Pensez-vous que ces victimes étaient plus coupables que les autres ? Non, je vous le dis. Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. »

Ce n’est pas la peur qui pousse Jésus à parler ainsi, mais l’amour du vrai.
Il ne cherche pas à expliquer le mal, ni à faire le tri entre les bons et les méchants. Il nous invite à ne pas détourner les yeux, à ne pas fuir la réalité. Chaque événement dramatique, chaque secousse de la vie, est une sonnette d’alarme, un appel à revenir à l’essentiel.

Les faits divers nous bouleversent ? Mais que disent-ils sur notre propre vie ? Sommes-nous prêts à rencontrer Dieu ?

Sainte Thérèse de Lisieux disait avec une incroyable lucidité : « Si la grâce de Dieu ne m’avait pas soutenue, j’aurais pu être à la place de ce criminel. »

Elle voyait dans le mal des autres un miroir de sa propre fragilité, et cela ne la faisait pas désespérer, mais s’abandonner davantage à l’amour miséricordieux de Dieu.

  1. Le figuier stérile : la patience divine et la chance du sursis (Lc 13,6-9)

Jésus poursuit avec une parabole : un figuier planté dans une vigne, qui ne donne aucun fruit depuis trois ans. Le propriétaire veut le couper. C’est logique, non ?
Mais le vigneron – image de Jésus lui-même – intercède :« Laisse-le encore cette année… je vais bêcher autour, mettre du fumier… Peut-être donnera-t-il du fruit. »

C’est ici le portrait bouleversant de Dieu que Jésus nous révèle :
– un Dieu patient,
– un Dieu qui travaille la terre dure de notre cœur,
– un Dieu qui ne désespère jamais de nous, même après de nombreuses années de stérilité.

Un Dieu patient et un cœur disponible

Frères et sœurs,
Ne laissons pas passer ce Carême comme une formalité.
Le temps est court. La grâce est là. Dieu nous offre cette année de plus pour porter du fruit.

Alors, comme Thérèse, reconnaissons humblement : « Tout est grâce. »

Et si nous sommes encore stériles, que cette prière jaillisse de notre cœur : 🙏 Prière finale (inspirée de Thérèse)

Seigneur, je ne suis pas un figuier glorieux.
Je suis souvent sec, fermé, sans fruit.
Mais je Te tends mon cœur.
Bêche autour de lui. Verse ta patience.
Et fais-y grandir une fleur de vie, une fleur d’amour.
Et si je tombe, relève-moi.
Car je crois en ta miséricorde plus qu’en ma misère.
Amen.

 

 

Homélie du Père Clément, IIIe dimanche de carême, année C2025-04-10T11:50:40+02:00

Homélie du père Justin, III Dimanche de Carême (Année C) Lc 13,1-9

Chers frères et sœurs, le Seigneur est interrompu dans son enseignement par une nouvelle dramatique, des Israélites ont été tués dans le Temple par des Romains. Ils sont morts au sein d’une double profanation : en entrant dans le Temple les Romains l’ont profané et en répandant le sang ils l’ont profané encore.

Donc ces Israélites sont morts dans cette double profanation – c’est comme dire qu’il n’y a pas de pire mort que la leur, il n’y a pas de plus grande honte que la leur. Cela signifie – aux yeux du peuple – qu’ils sont coupables envers Dieu de péchés extrêmement graves.

Ainsi pense le peuple entrainé par les théologiens du temps… Selon leur théologie, Dieu nous punit pour nos péchés et plus nos péchés sont graves plus le châtiment est grave, dramatique, spectaculaire – cela peut être une mort violente ou une maladie grave, une infirmité.

Le Seigneur est très frappé par ce comportement de ses contemporains. Il voit qu’ils jugent, qu’ils sont tous en train de conclure immédiatement à la culpabilité de ces hommes. Et il se rappelle d’un autre cas où il avait vu le même comportement, lors de la chute de la tour de Siloé. Là aussi les hommes morts écrasés par la tour ont été jugés immédiatement par l’opinion comme coupables de grands crimes devant Dieu.

L’Évangile nous montre que le Seigneur est très sensible à cette question du jugement que nous portons les uns sur les autres. Il interrompt son enseignement et il donne des admonitions, il rappelle ce qui est arrivé dans d’autres cas semblables…

Et il dit à ses auditeurs que s’ils ne se convertissent pas ils mourront tous de la même manière. C’est-à-dire que s’ils jugent sans miséricorde alors comment feront-ils eux-mêmes à supporter le jugement quand ils se verront dans la lumière avec leur péché ? Pour le moment ils jugent autrui et ils en retirent une certaine satisfaction, il se sentent justifiés par le sort d’autrui… Mais quand ils seront jugés, quand ils verront que ceux qu’ils ont méprisés ont vécu une vie plus sainte que la leur, est-ce qu’ils le supporteront, est-ce que la honte ne sera pas trop forte ?

Dans le jugement nous verrons, oui, le regard miséricordieux de Dieu, mais nous nous verrons aussi nous-mêmes tels que nous sommes. Le Seigneur nous donne cette admonition de se considérer plutôt eux-mêmes comme pécheurs dès maintenant.

Le Seigneur est très sensible à cette question, non seulement il interrompt son enseignement pour en donner un autre, mais il donne aussi une parabole, il manifeste d’avoir une parabole à laquelle il a déjà pensé à ce sujet. Cette parabole nous parle du propriétaire d’une vigne qui commande au vigneron de couper le figuier qui ne porte pas de fruit…

Si nous regardons bien ce qui se passe dans la parabole, le propriétaire ne considère pas seulement le figuier mais surtout la terre. Il dit Pourquoi est-ce que le figuier doit consommer l’aliment qui est dans la terre sans donner de fruit, alors que cet aliment pourrait être consommé par la vigne pour qu’elle donne plus de fruit ? Donc il a un point de vue plus profond que le nôtre – nous, nous aurions tendance à ne regarder que le figuier et à le juger ; lui, il regarde surtout la terre.

Et puis il ne commande pas purement et simplement de couper le figuier mais surtout il consulte le vigneron, il reconnait implicitement que le vigneron est plus expert que lui et il l’interroge. Et le vigneron à son tour regarde lui aussi la terre mais encore plus en profondeur…

Et il dit Oui peut-être… peut-être que le figuier consomme l’aliment qui est dans la terre et ne donne pas de fruit – mais peut-être aussi que l’aliment est dans la terre mais n’arrive pas jusqu’au figuier auquel cas il faut bêcher la terre, ou bien l’aliment manque-t-il dans la terre alors il faut mettre de l’engrais…

Il a un point de vue plus profond encore et il temporise – il en sait davantage et il hésite davantage avant de conclure, mais le propriétaire déjà lui aussi avait temporisé pendant trois ans avant de penser à le couper.

La parabole nous dit : Plus on est expert plus on temporise, plus on en sait moins on condamne. Et la parabole ne conclue pas, elle ne nous enseigne pas à juger, elle ne nous enseigne pas à conclure nous-mêmes définitivement.

Elle nous enseigne que comme le propriétaire, comme le vigneron sont responsables des soins donnés au figuier, nous sommes responsables de la croissance les uns des autres. Nous sommes responsables parce que nous nous donnons les uns aux autres les conditions – ou nous ne les donnons pas – de grandir humainement et spirituellement.

Comme le propriétaire et le vigneron nous sommes une image imparfaite de Dieu, nous sommes comme des dieux les uns pour les autres. Quand nous jugeons nous ne nous rendons pas compte à quel point nous nous enfermons les uns les autres dans une prison, nous nous limitons, nous nous privons de la vie.

Au contraire si nous ne nous condamnons pas mais donnons ce qui est nécessaire à la croissance – l’écoute, la patience, tous les biens possibles – alors chacun aura la possibilité de grandir et donner du fruit, selon son propre mystère et selon le mystère de Dieu.

Homélie du père Justin, III Dimanche de Carême (Année C) Lc 13,1-92025-03-23T16:25:34+01:00

Homélie du Père Joseph, IIIe dimanche de carême, année C

Mes chers frères et sœurs

Qui parmi nous n’a jamais eu soif d’eau ? Dans ce contexte, un bon verre d’eau ou alors un bon verre de bière (pour les adultes) t’a fait beaucoup de bien. Il ne faudrait pas que l’abondance d’eau de nos robinets, ruisseaux, rivières, fleuves, mers et océans nous fasse perdre conscience de l’importance vitale de l’eau. La pénurie d’eau, à certaines périodes de l’année, nous aide à le réaliser. Nous avons tous été touchés par la pénurie d’eau dans les Pyrénées Orientales dans certaines régions…mais certains ont râlé quand des arrêtés municipaux ont interdit de ne pas remplir les piscines ou d’arroser notre pelouse ou potager en plein été.

Nous avons soif d’eau (H2O), mais, au fond de nous, il y a d’autres soifs plus profondes encore : soif d’amour, de bonheur, soif de vivre…. Pendant le carême, nous exprimons au Seigneur notre soif d’être sauvés.  A notre époque et malgré tout le refoulement qui est fait, nous nous rendons compte combien nous avons soif d’absolu, d’infini. En témoigne cette quête massive du spirituel chez nos contemporains, avec tous ces mouvements de spiritisme et le New Age dans lesquels il est malheureusement plus facile de tomber entre les mains du Malin et des gurus de toute sorte et dans lesquels les gens sortent déplumés et blessés, avec la difficulté de se reconstruire par la suite.

On cherche les énergies positives dans les religions ou pratiques spirituelles orientales, chez les magnétiseurs et énergiseurs de tous bords en oubliant que la seule et vraie énergie positive qui nous est donnée gratuitement est le saint Esprit à notre dans baptême. Le risque, quand on a très soif, c’est de boire n’importe quoi, même de l’eau impropre à la consommation. Combien des gens ont tellement besoin d’amour au point de se jeter dans les bras du premier venu pour en sortir blessé. C’est cela qu’a vécu la Samaritaine avec les multiples expériences amoureuses avant de rencontrer Jésus au puits de Jacob.

Comme la samaritaine, chacun de nous, et plus encore ces catéchumènes, nous avons besoin de rencontrer ce Dieu d’Amour qui nous appelle au Bonheur. La foi est toujours une rencontre, une expérience personnelle, comme celle faite par la samaritaine qui va puiser l’eau et qui rencontre Jésus. Chacun de nous, à un certain moment de notre vie, a pu faire sa propre expérience de la rencontre avec Jésus où il a fallu regarder notre vie en vérité. C’est ce moment où nous avons senti la main de Dieu toucher notre cœur, créant en nous un avant et un après. Ce jour-là, nous avons enfin laissé Dieu entrer dans notre vie et depuis, nous expérimentons avec émerveillement tout ce qu’il nous apporte, comme la samaritaine qui revient pour parler de sa rencontre avec le Christ avec des gens qu’elle évitait de voir à cause de ses blessures. Elle est allée évangéliser ceux qu’elle ne voulait pas voir, qui la jugeaient et la regardaient de travers.

Jésus est assoiffé de notre amour. Il demande de l’eau à la samaritaine. Cela me fait penser à cet hymne où nous disons que Jésus est un mendiant ! Il se révèle fragile en mendiant notre amour, nous demandant de lui ouvrir notre cœur. Fatigué, il se rend au puits de Jacob, à Sicar, à l’heure la plus chaude de la journée, dans cette région de Samarie où il n’était pas le bienvenu. Il a soif d’eau, mais plus encore, il a soif de la foi de cette femme qui vient chercher l’eau à une heure improbable parce qu’elle a peur de croiser ces gens qui la jugent et la critiquent.  Elle a une vie blessée et abusée par plusieurs hommes, devenue la risée du village, condamnée à ne rester qu’une femme facile comme en témoigne le nombre de ses ex. Elle a honte de vivre mais Jésus n’a pas honte de l’approcher pour lui redire que sa vie a encore de la valeur et qu’elle n’est pas condamnée à rester malheureuse.

Jésus veut toucher son cœur blessé, pas son corps, objet de convoitise de beaucoup d’hommes. Tellement blessée par le passé, elle a barricadé son cœur à toute proposition amoureuse. La samaritaine fuit la main et le regard de ce Dieu qui vient à sa rencontre, comme nous aussi qui refusons de prendre la main de Dieu qui ne cherche qu’à nous guérir de nos blessures et qu’à étancher notre soif d’amour et de bonheur.

A travers le récit, Jésus nous redit que son désir profond est de toucher notre cœur assoiffé de vraie joie, de vrai bonheur et du véritable amour mais qui risque parfois de se fermer. Jésus insiste avec délicatesse, en proposant un dialogue, sans s’imposer. De la soif d’eau, Jésus s’est révélé comme la vraie Source d’eau vive. Sa tendresse délicate a porté cette femme à parler sans rougir de sa vie amoureuse qui est une vraie catastrophe ! La rencontre avec Jésus exige la vérité sur notre vie. Si nous voulons être heureux, acceptons la vérité de notre vie actuelle avec ses fragilités et blessures. La foi n’est pas un théâtre où nous entrons dans un personnage.

Jésus n’a pas fait de morale à cette femme blessée mais l’a amenée à prendre conscience de ses blessures. Jésus n’a pas remué le couteau dans la plaie, mais l’a amenée à parler de sa foi, de sa relation avec le Dieu. Jésus la rassure en se révélant progressivement : « Dieu est esprit, et ceux qui l’adorent, c’est en esprit et vérité qu’ils doivent l’adorer. » La femme lui dit : « Je sais qu’il vient, le Messie, celui qu’on appelle Christ. Quand il viendra, c’est lui qui nous fera connaître toutes choses » Jésus lui dit : « Je le suis, moi qui te parle »

La samaritaine, la fille fragile et facile, la pécheresse publique, celle qui allait puiser l’eau à midi à cause de la honte, devient une disciple-missionnaire : elle part au village la cruche vide et sans eau, mais le cœur rempli d’amour ! Celle qui fuyait les regards inquisiteurs part à la rencontre des villageois pour témoigner de sa rencontre avec Jésus. Grâce à elle, de nombreux samaritains font à leur tour la rencontre avec Jésus et deviennent croyants : « Ce n’est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons : nous-mêmes, nous l’avons entendu, et nous savons que c’est vraiment lui le Sauveur du monde ! »

 Prions pour nos catéchumènes jeunes et adultes qui vivent leur premier scrutin en ce troisième dimanche de carême, afin que, comme la samaritaine, ils deviennent des disciples-missionnaires qui témoignent de leur rencontre avec Jésus. Que ce temps de carême nous permette grandir dans notre relation au Christ, Source d’Eau Vive qui étanche notre soif de vrai bonheur qui s’appelle aussi le salut, la vie éternelle donnée gratuitement dans la passion, la mort et la résurrection du Christ. Amen

Homélie du Père Joseph, IIIe dimanche de carême, année C2025-04-10T11:50:20+02:00

Homélie du Père Clément, IIe dimanche de carême, année C

Homélie pour le 2e Dimanche de Carême (année C)
Chers frères et sœurs,

Nous voici déjà au deuxième dimanche de Carême, et la Parole de Dieu nous entraîne sur la montagne de la Transfiguration. En ce temps où nous cherchons à nous rapprocher de Dieu, cette page d’Évangile nous présente Jésus transfiguré : un avant-goût de sa gloire qui éclaire aussi notre chemin d’espérance. Je vous propose de parcourir brièvement les différentes lectures pour voir comment elles convergent vers la lumière du Christ, et comment cette lumière peut encore aujourd’hui illuminer nos cœurs, surtout quand notre foi semble vaciller.

  1. Abraham, la nuit étoilée et la confiance en Dieu

Dans la première lecture (Gn 15,5-12.17-18), nous voyons Abraham sortir sous le ciel étoilé, à l’invitation du Seigneur :« Regarde le ciel et compte les étoiles… Telle sera ta descendance ».Abraham n’a pas encore vu l’accomplissement de la promesse, mais il s’appuie sur la parole de Dieu. Nous aussi, nous sommes parfois plongés dans l’incertitude ou la souffrance : « Comment vais-je m’en sortir ? » « Comment ma situation va-t-elle évoluer ? » Dans ces nuits de l’âme, Dieu nous redit : « Regarde le ciel, fais-moi confiance, car je suis fidèle à ma promesse. »

  1. Le Psaume 26 : « Le Seigneur est ma lumière et mon salut »

Le Psaume responsorial (Ps 26) continue cette dynamique de confiance :« Le Seigneur est ma lumière et mon salut ; de qui aurais-je crainte ? »

Cette prière est un cri de foi. Dans l’obscurité, nous cherchons une lueur. Le psalmiste affirme que Dieu seul est cette lumière. Cela nous renvoie déjà à la Transfiguration : « Le visage de Jésus devint autre et son vêtement d’une blancheur éblouissante » (Lc 9,29).

Une belle illustration pour comprendre cela :Imaginez un petit enfant marchant dans le noir en tenant la main de son père ou de sa mère. Même s’il ne voit pas bien devant lui, il se sent en sécurité, car il sait que cette main le guide. De la même façon, nous pouvons garder la paix si nous sommes « tenus » par la main de Dieu, même quand tout semble obscur.

  1. Saint Paul : « Nous sommes citoyens des cieux » (Ph 3,20)….L’expression « citoyens des cieux » nous invite à lever les yeux et à garder un sens d’éternité. Dans notre vie quotidienne, nous pouvons vite être absorbés par les soucis, les problèmes de santé, la solitude, l’incompréhension… Mais Paul nous dit : « N’oubliez pas votre véritable patrie : c’est la communion avec Dieu, qui s’accomplira pleinement dans la vie éternelle. »

Le pape François affirme souvent : « Le Carême est un chemin qui nous conduit vers la joie de la Résurrection ; il nous prépare à accueillir la vie nouvelle que le Christ nous offre. »

Alors, ne nous laissons pas engloutir par le découragement. N’oublions pas que notre horizon, c’est la rencontre définitive avec Dieu.

  1. L’Évangile de la Transfiguration : un avant-goût de la Résurrection

Le cœur du message de ce dimanche est l’Évangile de la Transfiguration (Lc 9,28-36). Jésus emmène Pierre, Jacques et Jean sur la montagne pour prier, et là, ils entrevoient sa gloire divine.

  1. a) « Il est beau que nous soyons ici »

Pierre, émerveillé, s’écrie :« Maître, il est bon que nous soyons ici ! »

Quand on est en prière et qu’on ressent la présence de Dieu, on voudrait rester là, sur ce « petit nuage ». Mais la Transfiguration n’est pas faite pour nous détacher de la réalité ; c’est plutôt un éclairage qui nous aide à vivre nos épreuves. Les disciples vont bientôt voir Jésus rejeté, arrêté et crucifié. Or, le souvenir de cette gloire transfigurée sera pour eux une ancre, un point d’appui dans la tempête.

  1. b) Un encouragement pour la route

La Transfiguration est un « avant-goût » de Pâques. Elle montre que derrière la Croix, se profile déjà la lumière de la Résurrection. Et c’est la même chose pour nous : dans le Carême, nous ne sommes pas en train de faire des efforts pour souffrir pour le plaisir, mais pour nous purifier, pour laisser Dieu illuminer nos vies, et pour avancer vers la joie pascale.

Benoît XVI a écrit : « La Transfiguration nous rappelle que la joie la plus profonde ne naît pas des choses, mais de la rencontre avec la personne du Seigneur. »

  1. La signification de la Transfiguration pour notre Carême

Que signifie pour nous cette Transfiguration en plein temps de Carême ?

  1. Un appel à la prière
    Jésus monte sur la montagne pour prier. Il se met à part, s’éloigne du bruit, pour être en communion profonde avec son Père. De la même façon, le Carême nous propose de prendre du temps pour la prière personnelle, pour des moments de retrait où nous laissons la Parole de Dieu nous transfigurer de l’intérieur. Comme les disciples, nous sommes appelés à accompagner Jésus dans ce tête-à-tête avec le Père.
  1. Un chemin de conversion
    La Transfiguration est un changement profond qui anticipe déjà la Résurrection. Le Carême est justement ce temps pour accueillir la grâce d’une transformation intérieure. Il ne s’agit pas de prétendre être parfaits en quarante jours, mais de laisser le Christ agir en nous, nous purifier, nous éclairer.
  2. Un avant-goût de la joie pascale
    Les Apôtres ont goûté, l’espace d’un instant, la gloire du Christ. Parfois, le chemin de Carême peut paraître austère, avec ses renoncements et ses efforts spirituels. La Transfiguration nous rappelle que nous ne sommes pas faits que pour la pénitence : nous sommes faits pour la gloire avec le Seigneur. Notre effort spirituel trouve son sens et son accomplissement dans la joie pascale.
  3. La force pour affronter l’épreuve
    En contemplant la Transfiguration, Pierre, Jacques et Jean découvrent une lumière plus forte que la nuit de la Passion à venir. De même, si nous gardons en nous le souvenir vif de la gloire du Christ, nous pourrons traverser nos épreuves, nos souffrances, avec l’espérance et la certitude que Dieu est présent, qu’il ne nous abandonne pas.
  1. Laissons-nous illuminer et transmettre la lumière

Chers frères et sœurs, la Transfiguration nous montre que Jésus est la Lumière du monde, et qu’il veut partager cette lumière avec nous pour faire reculer nos ténèbres intérieures. Au milieu de nos fatigues, de nos inquiétudes, de nos deuils, cette lueur nous rappelle que la souffrance n’aura pas le dernier mot.

Saint Jean-Paul II disait : « N’ayez pas peur ! Ouvrez, ouvrez toutes grandes les portes au Christ ! »

Dans ce temps de Carême, ouvrons nos cœurs et laissons Jésus nous transfigurer. Demandons-lui la grâce de la confiance d’Abraham, la force du psalmiste qui se laisse guider par la « lumière » du Seigneur, et la joie de saint Paul qui se sait citoyen du Ciel.

Puissions-nous, comme Pierre sur la montagne, dire nous aussi : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! » – non pas pour fuir le monde, mais pour mieux y retourner, le cœur rempli de la lumière du Christ, et la transmettre autour de nous.

Amen.

 

Homélie du Père Clément, IIe dimanche de carême, année C2025-03-17T14:41:05+01:00
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